Nulle époque n’a peut-être été exposée – autant que la nôtre depuis un an et demi – à ce problème essentiel : vacciner est-il nécessaire ? N’a-t-on pas vu des cas où le vaccin a été inutile, et, évidemment, des cas – en majorité – où le vaccin a eu des effets bénéfiques. Il ne nous appartient pas, dans le cadre de cette chronique, de donner des avis absolus. C’est ici le rôle des rabbins, responsables halakhiques, dans les diverses communautés, au regard des avis médicaux. Le but de cette chronique ici, dans le cadre des réflexions sur la Torah que l’on tente régulièrement de présenter, c’est de réfléchir, au niveau de la pensée traditionnelle, c’est d’essayer de comprendre ce qu’il nous importe de faire et, partant, de s’inscrire dans la pensée des ‘Hazal. Il ne s’agit pas d’exercer un magistère, ni d’imposer une conduite. C’est là le rôle des Maîtres en Torah, mais il s’agit de nous inscrire dans la voie qui nous mène à l’intention du Tout-Puissant.
Deux remarques préalables méritent d’être exprimées. D’abord, on se souvient peut-être de la lecture faite par le Hazon Ich (Emounah Ouvitahon, Chap. 2, à la fin) du reproche adressé à Yossef en prison, d’avoir demandé au Maître Échanson de le recommander à Pharaon. Le Hazon Ich explique que le tort de Yossef – qui à cause de cela est resté encore 2 ans en prison – n’a pas été de faire une tentative pour être libéré, car une tentative est justifiée, mais le tort a été d’avoir fait une tentative fausse, en s’adressant à quelqu’un qui n’était pas fiable. L’erreur de Yossef n’était pas la tentative – justifiée – mais la tentative n’était pas valable, car l’adresse était fausse. S’adresser à un médecin, oui, mais à condition que l’on sache qu’il y a une chance que le médecin soit un bon médecin, ce qui n’était pas le cas avec le Maître Échanson.
Une seconde remarque préliminaire est une interrogation sur l’efficacité de notre effort. Connaissant notre faiblesse et notre insuffisance, méritons-nous que l’Eternel écoute notre prière ? Soyons modeste, mais là aussi, il importe, cependant, de ne pas nous sentir vaincus à l’avance. Certes, les desseins du Tout-Puissant nous sont inconnus, mais il est certain qu’Il attend nos prières, et nos efforts pour nous protéger des dangers. Notre travail, notre « Avodat Hachem », est de Le reconnaître en toute circonstance, et de savoir Lui parler, et de reconnaître, en tout cas, l’efficacité de notre effort.
Au-delà de ces deux préliminaires - effort souhaitable mais valable, prière sincère et méritant d’être écoutée – la réflexion est plus aisée. Il apparaît clairement que, dans l’économie spirituelle de la Torah, la « Hichtadlout », l’effort personnel, a une place essentielle, et la vaccination ne peut que s’insérer dans cette direction ! Il est évident que dans une perspective cosmique globalisante, le concept même de maladie est inclus dans l’organisation de l’existence dans ce monde. Guérir les malades, accepter l’idée d’une insuffisance physique, encourager la recherche médicale, améliorer les conditions sanitaires, autant d’étapes essentielles et décisives dans la vie d’un croyant. La maladie est une épreuve, la guérir est un devoir. Éviter la contagion, la contamination, se protéger physiquement contre une épidémie ne peut que traduire une attitude positive à l’égard de la santé. N’oublions jamais que la Torah dit de l’Eternel : « Je suis l'Eternel ton médecin » (Chemot 15, 26). La maladie est, certes, envoyée par le Ciel, mais il ne faut pas négliger le moindre effort pour l’éviter.
Intégrée dans cette optique, la vaccination ne saurait être que positive, mais, répétons-le, seule une autorité rabbinique reconnue et acceptée dans la communauté peut donner un avis favorable et orienter le fidèle. Pour le simple fidèle, le monde matériel, créé par l’Infini, est un don magnifique entre les mains de l’être fini ; la maladie en est un avatar négatif, qu’il nous faut affronter. Le Tout-Puissant décide d’adresser un message à l’humanité. Il n’est pas toujours facile de lire, de comprendre ce message. Évitons de réagir de façon négative. Sachons y répondre, adressons-nous aux Sages de notre époque. En nous reliant à leur enseignement, en suivant leurs instructions, nous sommes assurés d’être dans la voie de la Vérité.