Dans le Traité Avot (6, 2), les sages relient le terme « ‘Harout » (paroles gravées sur les Tables de la Loi) au terme « ‘Hérout » (liberté), en nous expliquant : « Les paroles de la Loi qui étaient gravées sur les Tables de la Loi sont source de liberté. En acceptant, délibérément, de se soumettre à la Volonté divine, le croyant rencontre la Transcendance, et telle est la source de la pérennité d’Israël.
Cette prise de conscience de la coïncidence entre l’Eternel et l’éphémère construit le devenir d’Israël. Mais il faut, à cet égard, éviter les malentendus. Y a-t-il contradiction entre cette liberté, voulue par le Créateur et désirée par la créature, et une Histoire universelle qui dépasse l’individu, pour s’inscrire dans une orientation messianique, annoncée par la parole prophétique ?
Ici, se situe la remarque du ‘Hafets ‘Haïm dans son « Séfer Al HaTorah » à propos des cinq dernières plaies d’Egypte. Le Rambam dit que Pharaon n’avait plus de libre-arbitre pour ces plaies, comme punition pour n’avoir pas obéi après les 5 premières plaies. Le ‘Hafets ‘Haïm dit que l’on ne peut pas perdre le libre-arbitre, car on ne peut pas punir quelqu’un qui n’est pas libre. Ce qui lui manquait, selon le ‘Hafets ‘Haïm, c’est la Si’ata Déyichmaya, l’aide de D.ieu, Qui aide l’homme à utiliser sa liberté. C’était cela sa punition, perte de l’aide divine, mais libre-arbitre toujours !
De plus, s’il existe un déterminisme qui, d’après certains penseurs modernes, prévoyait les difficultés de l’époque, en particulier les catastrophes de l’année écoulée du fait du coronavirus, rappelons, pour mémoire, un livre cité déjà dans cette chronique, « La bombe P. » de Paul Ehrlich, paru il y a quelques décennies, qui craignait à un « effondrement de la civilisation » actuelle. Plus récemment, dans une conférence au Collège de France (faite le 18 Juillet 2019), le professeur épidémiologiste Arnaud Fontanet évoque le potentiel catastrophique d’une pandémie semblable à celle que nous vivons aujourd’hui. Dans un livre paru il y a quelques années (Pour un catastrophisme éclairé, 2002), le philosophe Jean-Pierre Dupuy prévoit les possibilités d’une catastrophe mondiale. Des chercheurs, des scientifiques, envisagent les possibilités, mais qui apparaissent si irréelles qu’elles ne sont pas crues possibles. « Un scénario considéré comme plausible par les meilleurs connaisseurs du sujet peut apparaître si improbable à la majorité d’entre nous qu’il est ramené à une sombre prophétie de ‘marchands de peur’. » (Cité, ainsi que les textes précédents, dans une chronique de Stéphane Foucort, le lundi 4 Janvier 2021). On aurait envie ici de plagier Galilée qui, après son procès, a dit de la terre : « Et pourtant elle tourne », et de continuer ainsi la chronique citée : « Pendant une année, le Covid 19 nous aura plongés dans un monde de crainte et de solitude, de danger et d’étrangeté » (ibid). Où se trouve ici notre liberté ? Ou bien y a-t-il un déterminisme qui nous guide malgré nous, sans notre accord ? Savons-nous vers quel précipice nous progressons ?
A ce stade, on ne peut plus apparemment parler de libre arbitre si nous sommes entrainés, acceptons d’être entrainés, dans l’engrenage des collapsologues ! Ce n’est pas précisément la réponse de l’aventure messianique d’Israël. Il ne nous appartient pas de nous insérer dans une analyse historique, qui nous dépasse. Il y a un Créateur Qui tient les fils de l’Histoire, et la dirige, en relation avec l’activité de la créature. La Révélation a eu lieu au Mt Sinaï, il y a un écho rabbinique qui commente et explique la Révélation. Il nous revient de continuer sur la voie de la tradition. Il nous semble important d’éviter les maladies, de faire ce qui est opportun pour les habitants de l’univers, et, de la sorte, de nous insérer dans un devenir historique, prévu par l’annonce des prophètes. C’est la voie traditionnelle de la Torah, et elle nous assure dans le monde ici-bas et dans le monde à venir.