Dimanche matin, 20 décembre, Esther Horgen, 52 ans, franco israélienne, conseillère matrimoniale, installée à Tel Ménaché en Cisjordanie depuis 20 ans, est sortie comme chaque jour faire sa marche dans la forêt proche de sa maison. Esther ne reviendra jamais de cette promenade, sauvagement assassinée par un palestinien de Djénine. Elle laisse un mari, six enfants et des parents effondrés, une famille exemplaire, une vie pleine de sens, d’amour d’Israël.
La Rabbanite Yémima Mizra'hi, qui s’est rendue aux Chiva' (7 jours de deuil) d’Esther, raconte :
« Hier, je me suis assise auprès des parents d’Esther, âgés de 93 et 94 ans, des 'Olim de France, ces émigrants valeureux, patriotes, si humbles, si dignes. Ils m’ont demandé de lire un texte que leur fille avait écrit en français, à la suite du meurtre d’un enfant qui n’avait pas encore fêté sa Bar Mitsva et qu’elle avait intitulé : La Peur. Ainsi Esther écrit :
« Par où commence la terreur, le terrorisme ? Il commence avec des idéaux élevés, sublimés. Il commence avec une foi en quelque chose auquel je crois si fort que je dois le partager avec le monde entier. Mais là, arrive la peur. Le terroriste est un peureux.
Pourquoi ?
Parce qu’il a tellement peur que son idée ne passe pas, ne soit pas adoptée par les autres (soit parce que cette idée au fond n’est pas justifiable, soit parce qu’il n’en est lui-même pas totalement persuadé), qu’il est obligé d'exprimer cette idée par la violence et par la force, pour qu’on l’écoute. »
Et Esther, cette femme noble et lumineuse continue :
« Chaque fois que j’entends qu’il y a eu un attentat, je me demande, quand donc, la dernière fois, ai-je voulu imposer mon idée, ma conception avec violence à mon interlocuteur ?
En fait, comme je ne suis pas assez sûre de moi, de mon idée, je l’impose à mon entourage, à mes enfants et je le leur dis avec violence et fanatisme, parce que moi-même je suis pleine de peur. Peur qu’ils ne comprennent pas ma « conception », qu’ils n’y adhèrent pas.
Je deviens violente, car je suis moi-même pleine de terreurs n’ayant pas réglé les choses en moi-même.
Devant le terrorisme, nous n’avons pas de réponses. Mais si je comprends que je peux faire naitre de moi de la lumière, de la tolérance et avant de « jeter » une idée, une volonté, aussi sublime soit-elle, sur mon enfant, ou sur mon mari, j’épure en moi jusqu’au bout cette idée, je la clarifie en moi, alors je suis une religieuse lumineuse, pas fanatique.
Lorsqu’on voit un enfant poignardé un mois avant sa Bar Mitsva, on se joint à la prière de sa maman, à la prière du monde entier, mais n’oublions pas la Téfila (prière) pour nous-mêmes ; n’oublions pas d’être des gens qui aiment, altruistes, qui donnent, plein de lumière. »
Des centaines de messages de condoléances ont afflué de toutes parts, parmi lesquels on en retiendra un, le plus étonnant, qui révèle la personnalité hors du commun de cette femme de bien. Des ouvriers arabes qui avaient travaillé récemment chez elle ont demandé à transmettre à la famille Horgen leurs sincères condoléances : Esther les avait reçus et traités avec infiniment de respect et de bienveillance alors qu’ils travaillaient chez elle.
Et la Rabbanite Yémima conclut :
« Tu vis, Esther, et tu dis ici quelque chose de formidable ; tu décris le remède le plus efficace contre la peur et la terreur.
Que ton souvenir soit bénédiction. »