Question 

Chalom Rav Malka,

J’ai une question compliquée à vous poser. Notre père est veuf. Il habite chez moi depuis déjà plusieurs années, car il est atteint de la maladie d’Alzheimer. Au début, son état de santé était assez bon, mais celui-ci s’aggrave peu à peu. Il ne sait plus rien gérer. Ma vertueuse épouse prend soin de lui avec dévouement et je m’efforce de gérer les soins médicaux et toutes les choses le concernant. Bien entendu, c’est un très lourd fardeau. J’ai eu récemment une vive dispute avec mes frères au sujet d’une forte somme d’argent nécessaire à l’achat d’un médicament spécifique pour notre père. Il s’agit d’un remède très cher et tout nouveau dont on n’est pas suffisamment sûr de son efficacité. J’ai pensé qu’il valait la peine de l’essayer, mais mes frères m’ont dit que je n’avais pas le droit de prélever tant d’argent de l’héritage commun pour quelque chose dont on n’est pas certain que cela l’aidera. Qui a raison ?

Réponse

Il est très difficile de répondre à une telle question sans en connaître tous les détails. Cependant, je vous répondrai de manière générale, car il est bon de comprendre un principe important concernant ce problème. Dans le cas de quelqu’un se trouvant dans la même situation que votre père, le Beth Din (tribunal rabbinique) ou le Rav local devront nommer un tuteur, c’est-à-dire une personne qui sera responsable de tous les problèmes pécuniaires. Je n’aborderai pas maintenant la question de savoir sur quels sujets s’exerce son autorité, mais assurément le genre de décision que vous avez mentionnée fait partie de ses attributions. Si, avant que la maladie n’empire, votre père vous faisait confiance pour n’importe quel problème, y compris la gestion de son argent, vous êtes alors le tuteur. Mais de toute manière, il vaut mieux régler de tels litiges en les soumettant à votre Rav ou les portant devant le Beth Din de votre région de telle sorte que l’un ou l’autre puisse arbitrer régulièrement les différends s’élevant au sein de votre famille. 

Réponse détaillée

Selon la Halakha, l’organisme responsable de la nomination d’un tuteur est le Beth Din qui, dans ce domaine, traite principalement des questions concernant la gestion de l’héritage d’orphelins mineurs, mais également de la gestion des biens de gens considérés comme « non doués de raison », à savoir de personnes ayant perdu leur lucidité. (Choul’han 'Aroukh, ’Hochen Michpat, 285. 2, 290. 27, 225. 20, etc.) Le principe de la Halakha est qu’il n’est pas nécessaire que ces individus soient jugés comme « non doués de raison ». Il suffit qu’ils ne soient plus capables de gérer leur fortune et que, par exemple, arrivés à un âge avancé, ils se mettent brusquement à acheter toutes sortes d’objets inutiles ou à dilapider des sommes énormes à des fins étranges, comportements essentiellement différents de ceux qu’ils avaient habituellement. Lorsque le Beth Din ou le Rav sont mis au courant, il leur incombe de nommer un tuteur afin que celui-ci gère leurs biens.

Généralement, une personne souffrant de la maladie d’Alzheimer la développe sur une longue période. Dans de nombreux cas, elle aura auprès d’elle un membre de sa famille proche qui la soutient et en qui elle a confiance. Ce peut être évidemment son conjoint, mais également son fils ou sa fille, un ami intime ou même un voisin. Dans le cas, par exemple, d’un conjoint, il est fort probable que le malade se soit fié entièrement à lui avant même que la maladie ne se développe et, d’autant plus, après que l’affection a progressé. Et naturellement, au fur et à mesure que le mal s’aggrave et qu’il devient de moins en moins compétent, il s’ensuit que la personne la plus proche assume de plus en plus de pouvoirs et le remplace même en ce qui concerne la gestion des finances. Cette personne est considérée comme son tuteur puisqu’il en exerce les fonctions et continuera à les occuper tant que le Beth Din ne juge pas nécessaire de le remplacer. 

Tous ces propos concernent la situation que vous décrivez, mais dans le cas où, par exemple, le père a été victime subitement d’un accident vasculaire cérébral (AVC) et que, par la suite, il a perdu totalement ses capacités fonctionnelles, l’un de ses fils décide alors de l’héberger chez lui. Celui-ci supervise dorénavant son emploi du temps et prend toutes les décisions concernant les soins médicaux qui lui sont prescrits. Peu à peu, il s’occupe de la gestion de ses biens. S’il en est ainsi, ce n’est pas parce que son père a confiance en lui qu’on lui attribuera automatiquement le rôle de tuteur, bien que ce dernier désire habiter justement chez lui pour toutes sortes de motifs. En effet, son père est considéré comme « non doué de raison. » Aussi, est-ce le Beth Din qui devra vérifier si le fils mérite d’être le tuteur. 

C’est pourquoi, dans tous les cas, même dans celui de quelqu’un qui, en charge du malade, détient les pouvoirs d’un tuteur, il convient toujours, pour toute décision importante, de consulter une autorité rabbinique ou de s’adresser à un Beth Din

Références : Choul’han 'Aroukh, ’Hochen Michpat, chap.290 ; Pit’hé ’Hochen Yéroucha VeIchiyout, chap.5. 

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