L'asservissement des enfants d'Israël tend à sa fin et voilà que l'Éternel frappe l’Égypte de la neuvième plaie qui est l’obscurité. Rachi nous dit, au nom du Midrach, que Hachem a choisi ce châtiment pour qu'Il puisse anéantir ceux des enfants d'Israël qui ne voulaient pas sortir d'Égypte. Parce que s’ils étaient morts d'une autre manière, alors les Égyptiens auraient affirmé que même les enfants d'Israël ont été punis par la main d'Hachem. Cette lourde obscurité leur a permis d'enterrer leurs morts en silence, sans être découverts. Mais là, j'aimerais éveiller votre attention sur l'étrange attitude, en tout cas à première vue, des 80% des Bné d’Israël qui désiraient rester dans ce pays d'esclavage. Comment se fait-il qu'après avoir subi tant de souffrances physiques et psychologiques, ils aient préféré rester prisonniers chez Pharaon ?

L'épreuve de la sortie d'Égypte : sortir vers l'inconnu !

Le Rav Azriel Tauber raconte dans son livre Pirké Ma’hchava qu'après la Shoah, il discutait souvent avec sa maman de ce qu'ils avaient vécu durant ces années de cauchemar, opprimés par les Allemands. Une des questions autour de laquelle ils ont débattu était la suivante : de qui la situation était la plus éprouvante ? Celle de sa maman qui était enfermée dans les camps de concentration, ou celle des enfants (le Rav et ses frères) qui se déguisaient en non-Juifs et qui se cachaient un peu partout pour échapper aux Nazis ? La conclusion à laquelle ils sont arrivés est que malgré les énormes souffrances qu'ont subies les prisonniers dans les camps, les circonstances dans lesquelles ils se trouvaient étaient moins dures que celles de leurs frères ”nomades”.

En effet, ils avaient une vie réglée : le matin ils se levaient, allaient travailler, le soir ils mangeaient (même si la nourriture était très pauvre). Dans cet enfer, il y avait une certaine routine qui cadrait leur vie et leur procurait un "sentiment de sécurité".

Par contre, le Rav et ses frères vivaient dans le néant total. Ils étaient à chaque instant confrontés à l'incertitude : où manger ? Où dormir ? Quoi faire ?? Ils n'avaient personne sur qui compter, rien sur quoi se reposer. Ce sentiment d'insécurité profonde et si affectant remplissait leurs journées et leurs nuits d'amertume et de peur de l'avenir.

Nous pouvons comprendre maintenant pourquoi il était si difficile pour les enfants d'Israël de quitter l'Égypte. Il est vrai que là-bas ils étaient maltraités, battus, ils voyaient leurs enfants se noyer dans le Nil, mais ils avaient une certaine routine qu'ils connaissaient, ils savaient à quoi s'attendre. Les quatre cinquièmes des enfants d'Israël étaient incapables d'abandonner cet acquis pour sortir vers le désert inconnu et tellement apeurant. Ce n'est qu'une minorité qui a fait preuve d'une totale confiance en Hachem en partant et laissant derrière eux des années de dépendance physique et psychologique. Cet acte a été considéré par L’Éternel d'une grandeur immense comme il est écrit : ”Je te garde le souvenir de l'affection de ta jeunesse, de ton amour au temps de tes fiançailles, quand tu Me suivais dans le désert, dans une région inculte” [1].

C'est à ce moment-là que les enfants d'Israël ont prouvé leur déconnexion de la culture idolâtre dans laquelle ils étaient plongés et l'adhésion à la croyance en un seul D.ieu, dans lequel ils ont eu totalement confiance.

Ce que les Égyptiens ont essayé d'annuler durant ces nombreuses années d’asservissement était le libre arbitre, la Émouna (foi) en la parcelle divine que nous détenons et qui nous permet de dépasser les limites du corps et de la nature. Le Juif n'est en aucun cas prisonnier de ses habitudes, ni de ses traits de caractère. Il est venu dans ce monde pour grandir, changer, et façonner sa Néchama (son âme).

Le mariage : sortir vers l'inconnu !

Réussir dans son mariage n’est certainement pas une mission facile. S’unir à son conjoint et l’aimer comme on s'aime soi-même demande avant tout de l'accepter comme il est. L'accepter comme il est ? Oui, exactement. C'est la devise du mariage. Même si de nombreuses personnes pensent qu'elles se marient pour changer leur conjoint, cela est une erreur fondamentale.

Par contre, s'investir dans un travail personnel sur nos traits de caractère, en tournant l'œil critique vers nous-même serait très positif. L'homme et la femme sont extrêmement différents l'un de l'autre, que ce soit au niveau de leur essence, au niveau physiologique, ou au niveau de l'éducation qu'ils ont reçue. Ces différences sont à l'origine de nombreux conflits qui peuvent dégénérer en de graves problèmes de couple si l’on n’apprend pas à les gérer.

Pourquoi est-il si difficile d'accepter la différence ?

Le Rav Yéchoua Attia, dans son livre : ”Sur le chemin d'un mariage réussi”, nous éclaire en expliquant que notre cerveau repousse automatiquement toute perception étrangère à nos perceptions antérieures qui nous sont familières. C'est pour cela que nous avons tendance à nous opposer aux demandes de notre mari, que nous avons des difficultés à nous adapter à son caractère, ou encore à adopter son chemin.

Voici les 5 étapes du processus d'adaptation à un nouveau concept, ou à l'acceptation de quelque chose qui ne correspond pas à nos aspirations :

1- Le cerveau repousse automatiquement ce qui est nouveau.

2- Le cerveau comprend mais s'oppose. Il n'accepte pas de devoir changer.

3- Le cerveau accepte MAIS a des difficultés pour appliquer. 

4- Le cerveau est prêt à adopter un nouveau chemin.

5- Le cerveau adhère à cette nouveauté et l’intègre complètement.

Prendre conscience que l’acceptation de la différence est un processus qui demande au cerveau d’élaborer des informations nouvelles, nous permettra de mieux comprendre nos réactions et surtout de mieux comprendre notre conjoint quand il s'oppose à nous.

La Torah nous donne un conseil extraordinaire (en vérité ce n'est pas seulement un conseil mais aussi une obligation) pour apaiser la colère ou encore éviter qu'elle nous envahisse : celle de ne jamais juger son prochain avant de se mettre à sa place !

Chabbath Chalom à toutes !

 

[1] Yirmiyahou (Chap.2, verset 2)