Il y a quelques mois, lors d’une visite de contrôle chez la dermatologue, j’ai du faire retirer un tout petit grain de beauté, dont la couleur posait problème : “je ne l’aime pas celui-là, il est bien trop foncé”, a-t-elle dit en entourant mon bras au stylo. J’ai donc été chez un chirurgien pour le faire retirer. Et je suis vite passée à autre chose, les vacances de Pessa’h en famille m’attendaient. Quelques semaines plus tard, à des milliers de kilomètres, la nouvelle est tombée tel un couperet : “c’est un mélanome, prenez rendez-vous sans attendre avec l’oncologue”.

On m’a vite rassurée en me disant que ce n’était pas grave et qu’à priori, je n’aurais pas besoin de traitement, puisque la source du problème avait déjà été retirée. J’ai passé plusieurs mois à me rendre à l’hôpital pour faire des examens complémentaires, qui ont confirmé que tout allait bien. Je suis retournée chez l’oncologue avec tous mes résultats d’examen et c’était assez comique, parce que nous n’avions pas grand-chose à nous dire (et pourtant je suis une bavarde !). Selon lui, je n’avais plus besoin de revenir le voir, je n’aurais qu’à me rendre deux à trois fois par an chez le dermatologue pour m’assurer que d’autres grains de beauté n’auraient pas la même idée de dégénérer.

Je me suis alors posé la question de savoir si je devais faire quelque chose à la fin de ce parcours médical de 3 mois. Est-ce qu’il y avait lieu d’organiser une Sé’oudat Hodaya ? Un repas de remerciement pendant lequel je devrais prendre la parole pour raconter les bienfaits d'Hachem et Le remercier devant tous les invités. 

Est-ce que vraiment ce n’était pas exagéré d’organiser une fête, pour un petit grain de beauté ? Après tout, il y a des épreuves plus difficiles et de plus grands miracles qui méritent d’être salués. Moi par exemple, je suis divorcée depuis plusieurs années et si demain je me remarie, alors oui il y aurait de quoi dire merci à Hachem. Je n’ai pas d’enfant, à l’heure où mes amies fiancent leurs aînés ; alors oui, si ça m’arrive demain, je raconterai à qui veut l’entendre, sans jamais me lasser, tous les bienfaits du Maître du Monde.

Et puis, je me suis rappelée ce que j’ai ressenti au moment du diagnostic. Comment oublier cette impression que le Ciel me tombait sur la tête ? Moi qui avais déjà perdu mon père de la maladie, j’avoue que je me suis demandé au moment où j’ai lu les mots de “mélanome” et “malin”, où se trouvait Hachem et s’Il serait à mes côtés pendant cette épreuve ? 

C’était sans compter sur le cours d’un Rav qui m’a profondément touchée. Dans la Paracha de Béréchit, un passage est écrit comme s’il s’agissait d’une partie de “cache-cache”. Hachem donne “des instructions” à Adam en lui expliquant que tout lui est permis, sauf le fruit de la Connaissance. 

Et ensuite ? C’est comme si Hachem n’était plus présent, Adam et ‘Hava transgressent en toute liberté et partent ensuite se cacher, gagnés par la honte. Après ce péché, D.ieu s'adresse à Adam et lui demande "אֵיּכָּה ?" (Béréchit 3: 9), ce qui signifie "Où es-tu ?".

Ce mot exprime la question de D.ieu à Adam, qui se cache de Lui après avoir enfreint le commandement. La question est bien sûr rhétorique, car Hachem sait où se trouve Adam, mais elle vise à pousser Adam à réfléchir à ses actions et à sa situation spirituelle.

Plus encore, Hachem nous enseigne ici qu’Il voilera Sa face à certains moment et époques et que nous aurons pour mission de Le chercher, de Le dévoiler, en restant fidèle à Ses enseignements.

Lors d’une épreuve personnelle, d’une guerre, d’un attentat, nous sommes nombreux à nous demander : “Où est D.ieu ?” C’est humain comme question. Mais nous… “Où sommes-nous ?” 

On se rappelle tous du lieu où l’on se trouvait et de ce qu’on faisait le samedi 7 octobre 2023. Mais est-ce qu’on se rappelle où l’on en était dans notre relation à D.ieu ? 

Et si finalement, la plus grande de nos épreuves était de rester fidèles à Hachem et à Ses Lois, même quand on a le sentiment qu’Il n’est pas là ? Même quand on Le prie jour après jour et qu’on a le sentiment que nos Téfilot (prières) ne sont pas entendues... Ou quand on est seul à croire en Lui, quand toute l’humanité semble se retourner contre nous !

Alors oui, il ne s’agissait que d’un petit grain, mais comme je cherche à reconnaître tous les bienfaits d’Hachem, même dans les détails, je décide de Le remercier et de le faire savoir. 

Hasard du calendrier… ma Sé’oudat Hodaya a eu lieu le soir de Roch ‘Hodech Eloul. Eloul ou le mois de l’introspection, celui où l’on réfléchit si durant toute l’année qui s’est écoulée l’on a réussi à évoluer sur le plan spirituel, à s’améliorer et si l’on s’est rapproché d’Hachem.

Merci Maître du Monde de m’avoir fait entrer et sortir de l’hôpital en bonne santé, merci de me donner des amies en or qui sont toutes venues assister à ma Sé’oudat Hodaya et se réjouir avec moi. Et merci d’avoir mis dans ma vie ma fabuleuse amie Sandra, qui a roulé une centaine de kilomètres, avec ses enfants assis à l’arrière de la voiture, juste pour venir attendre avec moi et m’accompagner chez l’oncologue, sans même que je ne le lui demande.

Je n’ai peut-être pas (encore) de gentil mari ni d’enfants qui gazouillent, mais j’ai la santé, j’ai la Émouna (foi) et je suis emplie de gratitude envers Hachem pour tous Ses bienfaits.

Ce mois de Eloul, plus que jamais, je veux dire à Hachem que je serai au rendez-vous. Et vous ?

(Témoignage anonyme, reçu à Torah-Box)