Question d’une internaute : La psychologue vient de nous annoncer que mon fils qui a tout juste 3 ans est autiste... Nous nous sommes rendus compte de ses problèmes de comportement il y a longtemps déjà, mais je pensais sincèrement qu'il n'avait qu'un simple retard ! On ne nous avait jamais parlé d'autisme. Je culpabilise, j'ai dû louper quelque chose à un moment donné, j'ai souffert pendant sa grossesse... Je me pose plein de questions : est-ce qu'il aura une scolarité normale, une vie "normale"...?
Je ne cesse de pleurer depuis la nouvelle, en me disant que je DOIS faire face, mais je ne me sens pas capable de surmonter cela... Merci par avance de vos conseils.
La réponse de Mme Nathalie Seyman
L’autisme est un trouble envahissant du développement, qui apparaît dans la jeune enfance, en général avant l’âge de 3 ans. Ce trouble touche la capacité de l’enfant ou de l’adulte à communiquer et à interagir avec les autres. Cela impacte donc directement la relation parents-enfant et les parents ont la sensation de ne pas parvenir à atteindre leur enfant, comme s’il y avait un mur qui se dressait entre eux et lui. Il est donc évident de comprendre leur désarroi face à une telle difficulté. Comment s’en sortir au quotidien ? Comment comprendre notre enfant tout en s'efforçant de garder une vie de famille ?
Ce qui se passe chez lui
Tout d’abord, ce qu’il est important de savoir est qu’il y a autant de formes d’autismes que de personnes souffrant d’autisme. Il y a différents degrés dans l’autisme selon les symptômes et sa sévérité. Alors évidemment, il y a des similitudes. Mais il n’en reste pas moins qu’il y a beaucoup de différences avec des évolutions différentes, des symptômes différents, etc. C’est pourquoi, il est très important de se centrer en priorité sur les ressentis de son enfant. Pour cela, il faut l’observer avec patience et amour. Comprendre comment il perçoit le monde est essentiel. Cela permet d’appréhender d’une autre manière ses peurs, ses colères ou ses comportements d’évitement. Il faut apprendre à comprendre ce qu’il se passe dans la tête de son enfant. C’est essentiel si on veut l’aider au mieux dans son développement.
Pourquoi sont-ils si hermétiques au monde extérieur ? Pourquoi vivent-ils dans un monde à part ?
Tout ce qui peut provoquer chez eux des émotions (en particulier tout ce qui est sensoriel) est très perturbant et ressenti comme une agression. On a remarqué chez les autistes la plupart de ces caractéristiques :
- Pour eux, la voix humaine n’est pas différente d’un autre son, elle ne retient pas plus leur attention qu’un autre son quelconque.
- Leur pensée est concrète, c’est ou blanc ou noir, mais jamais au milieu, ils ne comprennent pas les métaphores ni les faux semblants. C’est pourquoi, il est impossible pour un enfant autiste de jouer à faire semblant. On ne peut pas prendre une feuille de papier pour un avion, puisqu’il s’agit d’une feuille de papier.
- Ils sont très intelligents et, grâce à cela, peuvent très bien s’intégrer à la vie quotidienne. Mais cela implique qu’ils apprennent par cœur les règles de la vie en société, les mœurs, le savoir-vivre. C’est très difficile et très éprouvant, car ils doivent être sans cesse dans l’analyse des situations, cela leur demande une énergie énorme. C’est pour cette raison que le moins que nous puissions faire est de les comprendre et de rester patients face à leurs difficultés quotidiennes, mais de leur faciliter la voie à suivre.
- Ils ne sont pas capables d’analyser les émotions sur un visage. Une personne (bébé, enfant ou adulte) souffrant d’autisme ne peut pas (ou très difficilement, moyennant efforts) regarder un visage dans son ensemble. C’est beaucoup trop d’informations à intégrer pour une personne qui ne peut supporter la surcharge sensorielle. Il peut parvenir à se focaliser sur un élément du visage (nez, bouche, joue, etc.), mais jamais sur les yeux. C’est pourquoi, tous les sentiments qui passent par le visage (colère, joie, chagrin…) lui échappent. Donc le fait de ne jamais acquérir cette connaissance des émotions le rend étranger à tout ce qui peut les provoquer, à toute notion de ressenti ou de partage de ces émotions. Du coup, on a l’impression qu’il ne ressent rien ou qu’il est indifférent. Ce qui est évidemment totalement faux. Un enfant, qu’il soit autiste ou non, aime ses parents et est rempli d’amour pour eux. Mais votre fils a une particularité qui vous obligera à vous faire sortir des sentiers battus chaque jour passé auprès de lui. Il vous permettra de vous dépasser et de trouver une force en vous que vous ne soupçonniez pas avant lui. Il est un catalyseur de force et de vie.
Ce qui se passe chez vous
Lorsque l’on diagnostique ce trouble chez un enfant, le monde de ses parents s’écroule avec toutes les projections d’avenir qu’ils avaient pour lui.
- Ils peuvent ressentir de la colère et une grande injustice que ce trouble les touche dans leur chair. On ne peut jamais connaître les projets d’Hachem. Tout ce que l’on peut faire c’est parvenir à vivre avec et faire de son mieux avec les forces qu’Il nous a données.
- Ensuite, les parents ressentent de la peur, liée au chemin à parcourir, à son avenir, à l’avenir de la famille. Malgré les progrès médicaux, l’autisme n’est pas encore bien connu et l’encadrement scolaire reste encore léger dans certains pays comme la France. Les parents savent qu’un parcours du combattant les attend pour scolariser correctement leur enfant et ce combat fait peur. Mais finalement, ce qui fait vraiment la différence dans l’évolution d’un enfant autiste, c’est l'implication des parents eux-mêmes. Leurs stimulations quotidiennes, leurs tentatives de communication, leurs encouragements, etc. valent plus que n’importe quel traitement ou institut. Et le fait de rester main dans la main dans cette épreuve apportera encore plus de bienfaits pour chaque membre de la famille.
- S’ajoute à cette peur une part de culpabilité d’être, peut-être, la cause de ce qui arrive à leur enfant. Pour commencer, il faut savoir que les causes de l’autisme sont jusqu’à aujourd’hui inconnues. Les chercheurs parlent de facteurs génétiques et environnementaux (substances toxiques, infections, etc.) pouvant influencer le développement du cerveau avant et/ou après la naissance, mais rien n’est probant.
Une chose est sûre : en aucun cas, l’éducation ou le comportement des parents face à l’enfant n’est responsable de l’autisme. Gardez en tête que, loin d’être la cause de son trouble, vous serez la raison de sa réussite. Vous êtes la meilleure chance d’épanouissement et de victoire de votre enfant. Concentrez-vous sur cet objectif et ne cessez plus de regarder l’avenir.
Mes conseils
- Une prise en charge précoce. Tout d’abord, je vous conseille de faire des bilans, des tests et de demander un autre avis pour être vraiment certaine qu’il s’agit bien d’autisme (car les diagnostics sont parfois trop vite posés de nos jours). Puis, commencez la prise en charge. Plus tôt votre fils sera encadré, mieux il s’intégrera au sein de la société.
- Documentez-vous bien sur l’autisme. De nouvelles méthodes voient régulièrement le jour. Il faut rester au courant de chaque avancée. Inscrivez-vous sur des forums de parents d’enfants autistes pour bénéficier de l’expérience des autres.
- Soyez bien entourés. Famille, amis, entourage, etc. Tous les soutiens sont importants. Ils permettent de tenir face au stress de ce que ce trouble peut engendrer chez ceux qui l'accompagnent, qui sont les parents, mais aussi les frères et sœurs. Par ailleurs, quand les familles bénéficient d’un soutien social, les déficits immunitaires liés au stress régressent.
- Chaque réaction de votre fils a une logique. De manière générale, quand un enfant souffre d’une interaction avec son entourage, il y a toujours une logique expliquant les problèmes qu’il rencontre entre lui et les autres. C’est pareil avec le trouble de l’autisme. Même s’il est plus difficile de trouver la raison, il y en a une. Et en prenant la peine d’y réfléchir, avec patience et créativité, il y a toujours un moyen de modifier cette interaction pour faire cesser la souffrance.
- Le virage à 180°. Parfois, lorsqu’une crise ne passe pas, essayez de procéder à un virage à 180°, c’est-à-dire à l’exact inverse de ce que vous avez déjà essayé. Cela permet bien souvent de le résoudre. Le mieux étant parfois d’accompagner votre enfant dans son émotion et non de la stopper.
- Chaque petite victoire est une grande victoire ! Encouragez-le, soyez fière de lui. Un petit pas fait la différence entre la Terre et la Lune. Ne minimisez jamais rien. Vous allez apprendre grâce à lui tout l’optimisme de la vie.
- Sachez déléguer. Dès que vous êtes à bout, en plein doute, sachez passer la main. Vous êtes forte, mais pas surhumaine. Votre enfant a besoin de vous. Vous devez prendre soin de vous et de votre santé impérativement.
- Oser penser à soi. Ce n’est pas facile de trouver du temps pour cela, mais pourtant, il est indispensable de trouver du temps pour soi. Un café avec des copines, un restaurant en amoureux, etc. Donnez-vous durant ces moments-là le droit de parler, de vous plaindre.
- Faites-vous suivre par un thérapeute. Seul ou en couple. Une thérapeute au fait des particularités de l’autisme est préférable, mais quel qu’il soit, il doit vous apporter une écoute bienveillante.
- Gardez la Émouna (foi en D.ieu). Hachem a de grands projets pour chacun d’entre nous, même si, sur le moment, cela nous semble incompréhensible et injuste. Ressourcez-vous dans la prière dès que vous vous sentez mal et en plein doute, Il sera votre plus grande source de force.
- Ayez confiance en vous et en votre enfant. Ce trouble ne l’empêchera pas de devenir quelqu’un de grand. Vous êtes son bâton de soutien et, grâce à vous, à votre confiance, à votre amour et votre bienveillance, il deviendra ce qu’il aura envie de devenir !
Je comprends votre désarroi. C’est tellement difficile lorsqu’une épreuve touche à ce que nous avons de plus précieux. Il est important que vous restiez entourée et que votre enfant soit suivi par les meilleurs professionnels. Mais restez positive, votre enfant a un avenir devant lui et vous serez très fière de lui avec l’aide d’Hachem.
Béhatsla’ha !
Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante [email protected]. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme.