Depuis leur plus tendre enfance, nos enfants ont été habitués à tout ce que nous leur donnons, à ce qu’ils reçoivent… et à ce qu’ils prennent. Notre devoir, en tant que parents, aurait sans doute été de leur apprendre à donner eux aussi et à ‘recevoir’de la bonne façon (pour une meilleure compréhension du sujet, voir le " Discours sur la Bonté " de Rabbi Dessler).
L’avons-nous vraiment fait ? Il n’est pas facile de répondre et, dans notre société où _ comme le dit aussi Rabbi Dessler _ nous n’avons que des droits et presque aucun devoir, quasi impossible.
«Chétizkou livnoth bayith nééman beIsraël ! " disons-nous aux jeunes mariés : " Puissiez-vous mériter de bâtir un foyer juif modèle ". Mais nos jeunes se préparent-ils vraiment à ‘construire’_ ou s’apprêtent-ils simplement à s’installer dans le décor que nous aurons planté pour eux ?
" Tire, tire l’aiguille, ma fille… demain, tu maries… " chantait-on autrefois. Verrait-on, aujourd'hui, une jeune fiancée tirer l’aiguille et s’abîmer les mains qui, pour le mariage où elle sera la reine de la soirée, la vedette du grand show que sont devenues les noces, doivent être soignées à l’extrême, comme d’ailleurs, toute son apparence ?
A l’aube de leur vie nouvelle, qu’attendent-ils, ces jeunes ? Ce qu’ils vont recevoir _ de leurs parents, de leur entourage, l’un de l’autre, bien sûr, et, plus généralement, de la vie ? Savent-ils que " C’est sur le ‘Hessed que tient l’univers " (Tehilim 89, 3) ?
Savent-ils que le vrai bonheur, ce n’est pas de ‘prendre’, mais de ‘donner’? Que pour bâtir, il faut investir, être prêt à supporter les inconvénients liés à la construction ?
Quel conseil, alors, pouvons-nous donner aux jeunes qui se marient ?
Voici ce que disait toujours Rabbi Dessler aux jeunes couples, le jour de leur mariage : " Veillez soigneusement, mes chers amis, à garder toujours en vous ce grand désir de donner plénitude et bonheur à l’autre. Car sachez qu’au moment où vous commencerez à avoir des exigences l’un envers l’autre, votre bonheur ne sera plus qu’un souvenir " (Mikhtav MéEliyahou I, page 39).
Par conséquent, ajouterions-nous aujourd'hui, apprenez à vous débarrasser de votre ego, apprenez à voir l’autre, votre partenaire, et les autres, tous les autres. N’attendez pas de vos parents qu’ils continuent à vous gâter (oui, je sais que cela leur fait plaisir, à eux ; du reste, même si vous ne l’attendez pas, ils continueront à le faire). Ne trouvez pas normal qu’ils se décarcassent pour vous (ils le feront mais vous, vous ne devez pas trouver cela normal). Retroussez vos manches (oui, je sais, votre costume est tout neuf et ne s’y prête pas…) et apprenez à vous débrouiller… et à construire.
Vous verrez, contrairement à ce qui semble à première vue, que vous n’en retirerez que de la satisfaction. Essayez de songer à ce qui pourrait faire plaisir à vos parents, à vos proches, autour de vous (je ne parle absolument pas de cadeaux mais de bien autre chose… !). Sachez refuser, lorsque vos parents ‘insistent’pour vous inviter (j’ose toutefois espérer que vous avez assez de bon sens pour saisir les nuances entre une invitation lancée parce que " les pauvres chéris, ils ne savent pas se débrouiller tout seuls/ils travaillent tellement dur/ils ne peuvent rester seuls/etc. " et l’insistance d’une maman qui s’ennuie après ses enfants et qui a réellement besoin de les avoir une fois auprès d’elle). Sachez qu’ils seront finalement très fiers, et très heureux, de voir que vous savez voler de vos propres ailes et que vous avez du plaisir à être ‘tout seuls’tous les deux.
Et, surtout, imprégnez-vous bien de l’idée que, comme le dit encore Rabbi Dessler, c’est à ceux à qui l’on donne que l’on s’attache, et qu’on apprécie particulièrement les choses pour lesquelles on s’est investi…
Travaillez, prenez de la peine… Bâtissez votre monde sur le ‘Hessed : c'est ainsi et ainsi uniquement que vous deviendrez bâtisseurs et mériterez un bayith nééman beIsraël, un foyer modèle et impérissable.
Mme Eve ZERBIB