Rubis, topaze, émeraude, escarboucle, saphir, diamant, opale, agate, améthyste, tartessienne, onyx, jaspe : 12 pierres précieuses d’une dimension exceptionnelle et d’une valeur inestimable ornaient le Pectoral (‘Hochen) du Grand Prêtre. Sur chacune étaient gravés le nom d’une tribu et les lettres des noms des Patriarches. Ainsi, tout l’alphabet hébraïque était représenté sur cet écran irradiant, placé sur la poitrine du Kohen Gadol, le Grand Prêtre, pendant son service dans le Temple.
Les pierres devaient être « entières » c'est-à-dire que la gravure des noms ne devait pas provoquer de résidus, chose impossible lorsque l’on taille un objet. On utilisait donc pour cela un petit ver de la grandeur d’un épi d’orge, le Chamir, qui permettait ce prodige. On le plaçait sur la pierre et il gravait à la perfection, avec la puissance et l’exactitude d’un laser, le tracé qui avait été inscrit préalablement à l’encre sur la pierre.
Le roi Chlomo aurait également utilisé le Chamir pour la taille des pierres du Beth Hamikdach qui ne pouvaient être coupées par un ustensile en fer. Ce Chamir était conservé précieusement dans un étui de plomb, seule matière qu’il ne dévorait pas... Etrangement, c’est cette même matière qui fait écran aux rayons X… (Certains pensent que le Chamir n’était pas une entité vivante mais un rayon.)
L’appétit du Chamir ?
Ouvrons un instant une parenthèse - tout en restant dans le domaine du minéral - pour évoquer un des plus grands mystères géologiques jamais vus sur terre : le rocher d’Al Naslaa.
A 8 heures de voiture de Riad, en plein désert saoudien, s'élève une masse rocheuse impressionnante vieille de 4.000 ans, de neuf mètres de hauteur. Délicatement en équilibre sur son étroit socle pierreux, la pierre monumentale est fendue en deux. Cette scission est parfaitement lisse et transperce d’un bout à l'autre cette pierre gigantesque large de 8 mètres. Comme si un immense sabre avait, aussi facilement que dans du beurre, traversé la roche de part et d’autre en une coupe parfaite. Autant le rocher est rugueux et recouvert d’aspérités, autant la coupure est nette à la perfection et placée exactement au bon endroit pour garder au rocher son équilibre.
Les géologues restent hébétés. Mais comme il faut des réponses, ils tentent sans beaucoup de conviction : tremblement de terre (comme si un séisme pouvait fendre si parfaitement un minerai…), visite d’extra-terrestres, érosion de la pluie…
Et qui sait ? Le Chamir à l'appétit minéral insatiable nous fait ici peut-être un signe de la main à travers les millénaires.
Le mystère reste entier et attire de nombreux touristes chaque année.
Cristallisation du Divin sur Terre
Mais revenons au Temple. A l’époque, la présence du Divin était une évidence qui émanait de chaque objet du Beth Hamikdach : elle emplissait le parvis, le Saint et le Saint des Saints avec toujours plus d’intensité pour arriver à sa « concentration » maximale dans l’Arche de l’Alliance, sous les ailes d’or des Chérubins. Là se trouvaient les deuxièmes Tables de la loi ainsi que les débris des premières.
Les matières les plus précieuses furent utilisées pour la construction du Temple : boiseries de cèdres, marbre, or, airain, tentures du lin le plus fin. Les dimensions, l’ordre et la propreté qui régnaient dans la maison de Hakadoch Baroukh Hou sur terre éveillaient spontanément dans le cœur de celui ou celle qui y pénétrait un sentiment de magnificence, de grandeur et de crainte du Ciel. Chaque élément y était parfaitement à sa place, sans fioritures superflues, et toutes les lignes architecturales épurées étaient rehaussées par la noblesse des matériaux.
Le beau était au service du Bien et ce n’est pas un hasard si le Temple était le foyer sublime d'où rayonnaient abondance et bénédictions pour le monde entier.
Aucun doute, on était bien dans la demeure sur terre du Très-Haut. Nier la Présence divine après être entré dans le Temple était absurde !
‘Hochen : capteur de Sainteté
De même que le Saint des Saints était l’endroit géographique sur terre où se trouvait la densité de proximité avec le Divin la plus intense, de même le Pectoral, le ‘Hochen en hébreu, qui constituait un des 8 vêtements du Grand Prêtre, était la pièce « vestimentaire » centrale du Kohen Gadol. Porté sur la poitrine, cet ornement en forme de carré parfait était constitué de 12 pierres précieuses serties chacune dans un châssis d’or.
Voir le Kohen Gadol dans ses atours était un éblouissement pour les yeux et pour l’âme. Il était la cristallisation de l’homme abouti.
Le Pectoral avait quelque chose de presque futuriste. A l’époque du Temple - oh ! bonheur -, on était « on-line » avec D.ieu et devant une question cruciale concernant 'Am Israël (par exemple si l'on devait oui ou non entrer en guerre contre un ennemi), on interrogeait le Kohen Gadol. Les lettres du ‘Hochen s’allumaient les unes après les autres, formant un message qu’il suffisait de lire pour recevoir la réponse irrévocable du Créateur. C’était comme si on recevait un SMS d’En-Haut, s’inscrivant sur la poitrine du Kohen Gadol.
D’aucuns s’étonneront que le ‘Hochen était porté sur la poitrine : la connexion ultime entre l’homme et son Créateur n’aurait-elle pas dû passer par le cerveau, l’organe humain le plus sophistiqué, celui qui génère l’intelligence et anatomiquement placé au plus haut du corps ? N’est-ce pas le front du Kohen qui aurait dû être orné de ces pierres plus que le cœur, source de passions ?
Nos Sages nous apprennent que si Aharon a mérité la prêtrise et de porter le ‘Hochen sur son cœur, c’est parce que c’est sans l’ombre d’un ressentiment qu’il vint à la rencontre de son jeune frère, Moché, apprenant que celui-ci guidera désormais le peuple vers la liberté. Aharon qui s’était occupé du 'Am Israël avec un dévouement sans limites pendant les longues années où son jeune frère avait dû partir en exil à Midyan, accueillit la nouvelle de l’élection de Moché au rang de libérateur du Peuple avec une joie sincère et profonde. C’est bien par le cœur que l’homme gagne ses lettres de noblesse.
L’avis du spécialiste
Il nous a paru intéressant d’interroger un gemmologue émérite qui travaille depuis 50 ans dans le domaine des pierres précieuses (spécialiste en diamant) et possède lui-même des mines en Guyane. Rafy Adès, en chat de Sloth Island, nous dit pourquoi d'après lui ces pierres justement ont été choisies pour orner le Pectoral. Ecoutons-le :
« Les 12 pierres portées par le Kohen Gadol sont bien distinctes et ne se ressemblent pas. Pour moi, elles symbolisent la puissance engendrée par la diversité du peuple juif. Ces pierres portent en elles des vertus merveilleuses et leur rayonnement décuple quand elles sont assemblées, un peu comme chaque instrument de musique apporte sa tonalité à l'orchestre. Un seul manque et la qualité du morceau n’est plus la même. Chaque juif apporte au peuple sa particularité. Par exemple, le jaspe est une pierre qui protège et absorbe toute influence négative. Le rubis, lui, génère énergie et compassion, etc. Chaque pierre et ses influences bénéfiques.
On peut dire que le diamant est le roi incontesté des pierres précieuses, pour sa rareté et étant le plus dur des minéraux. Le diamant brut se retrouve dans le lit d'anciens fleuves ou imbriqué dans des roches volcaniques. Son prix est déterminé par sa taille, sa couleur, son éclat et sa pureté. Les juifs d'Europe et du Moyen-Orient ont compris qu'ils pouvaient fuir persécutions et guerres en emportant quelques pierres dans leur poche et rebondir économiquement n'importe où sur la planète.
C'est ainsi que le diamant était la valeur d'échange très prisée entre commerçants juifs. Le diamant reste aujourd'hui encore une valeur refuge comparable à l'or. »
Microcosme de la Création
Le Temple réunissait tous les règnes de la nature : le minéral, le végétal (les encens), l’animal (les offrandes), et l'humain. En y pénétrant, on restait subjugué par le caractère sublime du lieu. Tout l’agencement de la demeure de D.ieu sur Terre chantait une symphonie à son Créateur.
Puissions-nous très bientôt mériter de voir sa reconstruction et que la Chékhina (Présence divine sur terre) réintègre au plus vite Sa maison.
Amen Véamen.