La reine Elisabeth II a définitivement quitté le palais de Buckingham à 96 ans. L'Angleterre, ce fut elle, et elle fut l’Angleterre, se déplaçant inlassablement aux 4 coins du monde pour représenter son peuple et son île chérie à travers le globe. Son règne de 70 ans, le plus long de tous les temps, a enjambé deux siècles, et l'on peut dire que d’un point de vue historique et personnel, elle aura « tout vu ».
Les Beatles, presque intimidés, vont venir sagement et bien coiffés en 1965 recevoir de ses mains l’Ordre de l’Empire Britannique, jusque-là réservé aux anciens combattants. Au portail de Buckingham, c’est leurs noms que la foule des fans hurle, dans une hystérie indescriptible. La reine perspicace sait très bien que ces 4 jeunes gens dans le vent constituent le produit d’exportation culturel le plus important du Royaume Uni, et qu’avec une vente de disques atteignant les 150 millions d’albums, beaucoup de royalties entreront dans les coffres du trésor…
Elle reçut d’ailleurs régulièrement toutes les pop stars du 20ème siècle, et fut leur muse à plusieurs reprises.
Comme en 1977, lorsque les irrévérencieux S. Pistols, groupe punk provocateur, lui offriront pour son jubilé d’argent un titre chocking au possible « God save the Queen/She ain’t no human being » (« D.ieu bénisse la reine, mais elle n’est pas humaine… »). Tout un programme pour critiquer les vues colonialistes, et ils diront même fascistes, de la monarchie anglaise. Elle y survivra, sûrement grâce aussi à son british humour.
Même à 92 ans, alors qu’elle reçut une personnalité politique étrangère qui s'enquit de sa santé, elle lui répondit avec un sourire espiègle : « Vous voyez, je suis encore en vie… »
Elle ne vint jamais en Israël pour ne pas se mettre en porte à faux avec le Foreign Office, qui suivait une politique très anti "implantations sionistes". Mais elle-même entretenait avec la communauté juive anglaise des rapports plus que chaleureux. Rav Pinter raconte que lors d'une réception, il s'esquiva de la longue file des invités pour éviter de lui tendre la main. Elle le chercha des yeux, connaissant parfaitement la liste des convives, et s'étonna de son absence. On souffla alors à l'oreille de sa majesté la raison de sa retenue : le rav ne pouvait serrer la main d'une femme, fût-elle la reine. Elle le fit alors appeler et croisant les mains derrière son dos, elle s'inclina devant lui...
Parmi les anciennes colonies du Royaume-Uni, nombreuses sont celles à n'avoir pas envoyé leurs condoléances à l’annonce de son décès : la politique impérialiste de la Grande-Bretagne, surtout à l’époque victorienne, laissa trop de blessures aux populations locales.
Étoffe d’une Reine
Elisabeth Alexandra Mary, Lilibeth pour les intimes, naît en mai 1926 et passe une enfance heureuse en Angleterre et en Écosse dans les domaines de sa noble famille, aux côtés de Margaret, sa jeune sœur. La petite Elisabeth est sérieuse pour son âge, disciplinée et étonnamment responsable. Churchill dit d’elle alors qu’elle n’a que 3 ans : « Elle a un air d'autorité et de réflexion époustouflant pour une enfant » : déjà quelque chose de royal se dégage de la petite fille. À priori, elle ne devait pas accéder au trône, si ce n’est les méandres et les surprises du destin qui placèrent la couronne sur sa jeune tête, à 25 ans.
En abdiquant pour épouser une femme 2 fois divorcée, son oncle Edouard VIII va renoncer à la couronne d’Angleterre et passer le sceptre au père d’Elisabeth, Georges VI. Ce dernier décède à 56 ans, transmettant le trône à sa fille aînée, Elisabeth. Pour la première fois, la TV retransmettra une cérémonie de couronnement royal aux habitants de la planète entière qui, les yeux rivés sur leurs postes, assisteront en direct au conte de fées.
Elisabeth est reine dans l’âme. Recevant les célébrités politiques, culturelles et cinématographiques du monde, c’est elle qui rayonne, la décence de sa mise rehaussant encore sa distinction naturelle. Même lorsqu’elle serre la main de Marilyn qui lui fait une révérence, de Catherine Deneuve le regard baissé, de Bardot complètement tétanisée, d’Elisabeth Taylor, de Sylvie Vartan, de Sophia Loren, la reine capte toute la lumière et éclipse leur beauté.
Her Majesty, c’est la dignité, la noblesse, le calme intérieur, le contrôle de soi. C’est avec sourire et aisance qu’elle endossera sa fonction royale pendant 7 décennies.
Rien n’est plus loin d’elle que la familiarité, et les personnalités les plus influentes de la scène internationale comme Kennedy, Chaplin, Churchill, s'inclineront spontanément devant son aura.
Roman-feuilleton
La cour d’Angleterre est un roman-feuilleton, avec les tenues uniformes et flashy de la reine - qui font sourire l’élégance française -, avec son protocole rigide décoiffé par les scandales internes, avec sa princesse belle et jeune, mariée à un prince indifférent, qui finalement s’échappera du palais, décédant à 36 ans dans un carrosse-bolide roulant trop vite.
Critiquée, adulée, la reine fut même mêlée à une sombre histoire d’espionnage, où une personne très proche de la cour s’avéra être un agent double, travaillant pour le KGB, lors de l’affaire « Philby ». Mais la souveraine tiendra bon le gouvernail, et restera impeccablement digne lors des tempêtes secouant le palais.
L’actualité aujourd’hui sera entièrement consacrée à ses obsèques. On a demandé aux personnalités du monde entier de ne pas prendre leur jet privé, pour ne pas encombrer les cieux anglais. Les yeux seront rivés sur Londres grouillante s’apprêtant à rendre hommage à celle qui fut certainement la dernière reine du siècle, dans toute l’acceptation du terme : celle que l’on craignait et que l’on aimait, qui incarnait tradition, continuation et responsabilité, et qui, même si elle tenait fermement à l'étiquette de son rang, savait également rire et être humaine.
En accompagnant Elisabeth à sa dernière demeure, le monde sait qu’il suit le cortège funèbre d’une époque révolue. Et c’est peut être pour cette raison que la foule est si nombreuse. La descendance d’Elisabeth n’a pas réussi à mettre de côté ses frasques pour l’honneur de la patrie et en cela, n’est plus digne du respect que la reine suscitait. Les Anglais se demandent même s'ils doivent continuer à financer l’entretien des gens de Buckingham, alors que ce qui s’y passe ressemble étrangement à ce qu’on peut voir dans la rue.
C’est sans doute là le plus grand regret de la reine : la passation des valeurs qu’elle représentait ne s’est pas faite. L’air du temps, les modes, l’attrait pour la laideur, le sans-gêne, a pénétré le palais qui s’est effrité de l’intérieur.
Rien ne résiste à l’érosion du temps et à "l'évolution" des mœurs, même pas le protocole de l’honorable maison britannique plusieurs fois centenaire. Et ô surprise, la partition très formelle que la cour exige de jouer engendre des réactions extrêmes, anti-autoritaires, au sein du peuple et dans sa propre demeure.
Alors qu’allons-nous donner à nos enfants, si même Elisabeth, la dernière véritable reine, n’a pas réussi à transmettre à sa descendance les valeurs auxquelles elle tenait tant ?
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Au seuil de la nouvelle année, quelques instants avant de faire retentir les trompettes de corne, de s’incliner devant la Justice parfaite et la Bonté infinie du Créateur, de saluer Son armée de constellations au garde-à-vous dans le ciel, remercions-Le encore une fois pour le cadeau inestimable qu’Il nous a octroyé : LE mode d’emploi du seul savoir-vivre possible dans ce monde.
Sans cette carte de route détaillée qui s’appelle la Torah, englobant tous les domaines de l’existence, ayant fait ses preuves depuis la nuit des temps, nous n’avons pratiquement aucune chance de réussir à transmettre des valeurs aux générations futures. Elles se dilueront bien vite dans la médiocrité ambiante.
Même les rois en ont fait les frais…