Il me demande pardon maintenant, après m'avoir fait subir une terrible injustice. Je nourris de la colère et ne peux lui pardonner. Que faire ?
À l'approche de Yom Kippour, les Juifs ont l'usage de se demander pardon l'un à l'autre, afin d'arriver, le jour saint, dénués de colère ou de ressentiment.
Les Sages de la Michna nous l'ont appris : le jour de Yom Kippour ne pardonne pas les fautes de l'homme et son prochain, tant qu'on n'a satisfait son prochain.
Donc, si nous avons porté atteinte à un homme, que nous le regrettons à présent du fond du cœur, et que nous nous repentons, D.ieu ne nous pardonne pas cette offense, même le jour de Kippour, si on n'a pas abordé la personne, lui avons demandé pardon, et déployé tous les efforts possibles pour nous faire pardonner.
En revanche, les fautes entre l'homme et D.ieu, sont pardonnées à Kippour. Il est possible de faire Téchouva à ce sujet, de les regretter du plus profond du cœur et de s'engager à ne plus commettre ces fautes, et ainsi Hachem nous les pardonne.
Et ici intervient le moment difficile…
Que se passe-t-il quand quelqu'un qui vous a profondément blessé, vous a fait subir une terrible injustice, décide de faire bonne figure et vient vous demander pardon avant Yom Kippour ou à un autre moment ?
Comment puis-je lui pardonner ? Mon cœur est encore plein de colère et d'humiliation face à l'acte qu'il a commis… Bonne question…
La réponse se divise en deux pans.
Tout d'abord, sachons que même si nous ne lui pardonnons pas de tout cœur, que nous sommes très en colère et très blessés, si nous nous contentons de dire : je te pardonne, nous avons déjà accompli un acte très remarquable.
Ce principe repose sur un texte de nos Sages selon lesquels ce que l'on a dans le cœur ne compte pas.
Si un homme énonce quelque chose, mais que dans son cœur, il pense autrement, on ne prend pas en compte ce qu'il ressent dans son cœur, mais uniquement ce qu'il a dit.
Prenons l'exemple d'une transaction financière. Je paie à quelqu'un de l'argent et conviens avec lui qu'en échange de cet argent, il me vend sa voiture. Après avoir pris mon argent, il ne peut me présenter l'argument suivant : dans mon for intérieur, je voulais te rendre l'argent et non pas te vendre la voiture. Car ce qui est logé dans le cœur ne compte pas.
Il en va de même pour le pardon. J'ai demandé pardon ? Je l'ai demandé ! Tu m'as dit que tu pardonnais ? Tu l'as dit ! L'histoire est finie. Ce que tu ressens ne s'applique pas à cette histoire.
Malgré tout, il va de soi que nous devons nous efforcer que notre prochain nous pardonne également du fond du cœur, et vice-versa : si quelqu'un nous a blessés et nous demande pardon, nous devons tenter de lui pardonner de tout cœur, et pas seulement de manière superficielle.
Comment procéder ?
Il existe plusieurs moyens : on peut se remémorer des bonnes actions que cet homme a faites pour nous. On peut le juger positivement et comprendre que son geste a été une erreur, un moment d'inattention ou d'impatience.
Essayons de penser combien de fois nous ne nous sommes pas très bien conduits avec nos amis ou notre famille, et en réalité, personne n'est parfait, ni nous-mêmes, ni celui qui nous a offensé.
Mais le meilleur conseil est de croire.
Croire au Créateur de l'univers : si j'ai subi un revers, c'est que je le méritais.
Je l'ai mérité parce que je ne me suis pas bien conduit en une autre occasion, ou du Ciel, une sanction a été décrétée à mon encontre. Toute peine de cœur, toute tristesse, toute atteinte psychologique, physique ou monétaire, est une sanction du Ciel.
Rien n'a lieu dans ce monde-ci sans que Hachem ne le décide, et s'Il a décidé que ceci devait nous arriver, il y avait une bonne raison pour cela.
Et notre ami qui nous a blessés ?
Il n'est qu'un messager. Il est le balai par lequel D.ieu a frappé.
Si votre ami vous frappe avec un bâton, allez-vous vous mettre en colère contre le bâton ?
Non !
Il va de soi pour vous que le bâton n'est pas coupable. C'est uniquement un instrument utilisé par votre ami pour vous frapper.
De la même façon, l'ami n'est qu'un instrument aux mains de D.ieu qui a décidé de nous infliger de la peine, pour nous punir d'un écart de langage de la veille, ou d'un manque de respect dans le Birkat Hamazone après le petit-déjeuner. Il nous punit afin que nous nous repentions, pour nous inciter à nous améliorer et expier nos fautes.
Alors plutôt que de nous mettre en colère contre le bâton, disons à D.ieu : nous avons compris le message, nous sommes désolés de nous être écartés du droit chemin. Nous promettons de revenir vers Toi de tout cœur.
Et l'ami ? Nous lui pardonnons, bien entendu.
Il importe de comprendre qu'il ne s'agit pas d'être pigeon. Si quelqu'un vous importune de manière systématique, éloignez-vous de lui. En cas de nécessité, adressez-vous à un tiers pour qu'il s'occupe de lui dans le but qu'il vous laisse tranquille. Retenons que l'essentiel est ce qui se passe entre nous et le Créateur de l'univers, tout le reste n'est que le résultat de cette relation.