Dans leur folle tentative d’anéantir le peuple juif, les nazis espéraient éteindre une civilisation vieille de plusieurs millénaires, le peuple élu porteur du message de D.ieu. Pourtant, face à ses ennemis, le peuple juif a choisi la vie. Après la guerre, nombre de survivants meurtris dans leur chair et leur esprit ont relevé un défi inouï : se relever de leurs cendres et fonder de nouvelles familles. Un acte de foi mais aussi une revanche spirituelle de la lumière sur les ténèbres.
Durant les sombres années de la Shoah, ce sont deux tiers du peuple juif qui disparurent dans les cendres des camps et des persécutions. Des familles entières sont décimées, des villages sont rayés de la carte d’Europe, des lignées ancestrales sont interrompues, des dynasties anéanties.
Si dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, certains rescapés ne peuvent envisager de se reconstruire (ou vont même recourir au suicide), d’autres vont entreprendre l’impossible : se relever de leurs cendres et bâtir à nouveau des familles.
Les lignes qui suivent vous présentent certains de ces parcours hors du commun.
Sang, feu et colonnes de fumée : L’exemple du Rabbi de Tsanz-Klausenburg
Pour beaucoup de survivants qui avaient tout perdu, l’idée de fonder à nouveau une famille représentait plus qu’un défi personnel, il s’agissait avant tout d’une mission sainte : redonner vie aux communautés ravagées, poursuivre la chaîne millénaire des générations du peuple juif.
L’un des exemples les plus frappants de cette ambition est sans conteste celui de Rabbi Yékoutiel Yéhouda Halberstam, le fameux Rabbi de Tsanz-Klausenburg. Rescapé des camps de concentration où il perdit son épouse et ses onze enfants, le Rabbi de Tsanz consacra le reste de sa vie à la reconstruction spirituelle et matérielle du peuple juif. Monté en Israël en 1960, il fonda des écoles, des synagogues, des institutions et un hôpital qui continuent aujourd'hui encore de rayonner. Il se maria une seconde fois et eut encore 7 enfants ! Le Rabbi fonda le quartier de Tsanz à Netanya, où vit et fleurit jusqu’à aujourd’hui une belle et grande communauté ‘hassidique composée de milliers de familles, qui à leur tour perpétuent la chaîne des générations.
À ceux qui l’interrogeaient sur son incroyable capacité à relever la tête après le drame qui s’était abattu sur sa famille, sa communauté et son peuple, le Rabbi répondait : “Je reconstruirai ce qu’ils ont détruit”.
Chaque naissance était pour le Rabbi une victoire sur les ennemis du peuple juif. Lors d’un discours, il déclara : “Chaque enfant est une étoile qui brille dans le ciel, un témoignage que le peuple juif est éternel !”
Rav Israël-Méïr Lau, le petit "Loulek"
Rav Israël-Méïr Lau, ancien Grand Rabbin ashkénaze d’Israël, est un autre exemple vivant de cette revanche spirituelle. Rescapé du camp de Buchenwald, il fut l’un des plus jeunes survivants de la Shoah. Sauvé par son frère aîné Naftali, il grandit avec le poids de cette mémoire, mais aussi avec une mission sacrée : perpétuer l’éternité du peuple juif. C’est ainsi que ce jeune rescapé monta en Israël, se maria et eut 8 enfants – ses fils et ses gendres occupant tous d’importants et prestigieux postes rabbiniques. En plus de ses fonctions officielles au Rabbinat d'Israël, le Rav Lau consacra sa vie à perpétuer la mémoire de la Shoah à travers le monde, notamment par l'édition de son livre "Loulek", où il relate son sauvetage miraculeux des griffes génocidaires nazies.
Lors de l’une de ses interventions publiques, Rav Lau déclara un jour : “Chaque enfant juif qui naît est un coup porté à ceux qui voulaient nous faire disparaître.”
Survivre et faire vivre
Mme Dorette Blum est la fille du docteur Charles Merzbach, figure prépondérante de la renaissance du judaïsme français d’après-guerre, et de Elle Suzy Meyer, la petite dernière de la grande famille Meyer d’Alsace. Durant la guerre, c’est depuis la Belgique que Dr Merzbach orchestra le sauvetage de milliers d’enfants juifs persécutés par les nazis sous l’égide d’une organisation clandestine fondée en 1942, le Comité de Défense des Juifs (CDJ). Dorette a grandi à Paris, avec ses 9 frères et sœurs, dans un immeuble cossu de l’avenue Malakoff, auprès de parents exceptionnels, qui ont transmis à leurs enfants joie de vivre, ténacité, et un amour sans limites pour la Torah. Aujourd’hui, sa descendance compte plus de 90 membres.
La Rabbanite Simone Kohn, rescapée de la Shoah, a récemment partagé l’histoire passionnante de sa vie face aux caméras de Torah-Box. Elle y raconte son enfance bouleversée par la guerre, marquée par une fuite incessante pour échapper aux nazis. Sauvée miraculeusement avec son frère et sa sœur aînés, Mme Kohn et son mari ont ensuite dédié leur vie à transmettre les valeurs du judaïsme partout en France, notamment avec la création du séminaire de jeunes filles à Marseille. Rav Philippe et Mme Kohn ont eu le mérite d’élever une famille de 10 enfants, grâce à D.ieu, dans la Torah et l’amour des Mitsvot !
Le livre Eikh Lo Yada’ti ("Comment n’ai-je pas su", paru en français sous le titre : "Un jour, j’ai compris") relate comment les 4 enfants de la famille Horowitz, une famille juive orthodoxe d’Anvers en Belgique, ont grandi dans l’amour et la chaleur de leur parents, en ignorant absolument tout du sombre passé de leurs parents, tous deux rescapés d’Auschwitz. Ce n’est qu’à l’âge adulte alors que les enfants étaient déjà eux-mêmes devenus parents, qu’ils découvrirent ce qu’avaient enduré leurs parents durant la Shoah. Aujourd’hui, de très nombreux descendants composent la famille Horowitz, preuve là encore de l’exceptionnel résilience de ces Juifs déterminés à perpétuer envers et contre tout la chaîne des générations.
Face aux ténèbres, la lumière juive
L’histoire des familles juives après la Shoah n’est pas seulement une leçon pour le peuple juif. Elle porte un message universel : face aux ténèbres et à la destruction, le peuple juif rallumera le flambeau, il se relèvera de ses cendres pour illuminer l’humanité du message dont il est porteur.
Comme le Rabbi de Tsanz-Klausenburg et Rav Lau l’ont exprimé, chaque naissance est une déclaration d’espoir. Chaque enfant est une étoile qui éclaire l’avenir. La lumière du peuple juif continue ainsi de briller éternellement, en dépit des forces qui s’emploient à l’étouffer.
À travers leurs familles nombreuses éduquées dans la voie de leurs ancêtres, ces survivants de la Shoah ont prouvé que le message d’Israël résonne encore. Puissent leur descendance et la nôtre être aussi nombreuses que les étoiles du ciel !