La Paracha de cette semaine, Nasso, est bien connue des lecteurs de la Torah car, d’une part, elle évoque des sujets fondamentaux de notre tradition (le statut du nazir, la bénédiction des Cohanim…), et, d’autre part, elle est la Paracha la plus longue de toute la Torah avec près de 176 versets (à l’instar des 176 pages du plus grand traité du Talmud et des 176 versets du plus grand Téhilim 119).
Notre Paracha doit sa longueur notamment à l’énumération de toutes les offrandes apportées par les chefs de tribu en l’honneur du Sanctuaire. Les douze chefs de tribu ont apporté, chacun à tour de rôle, les mêmes offrandes durant 12 jours, et la Torah s’attèle donc à énumérer ces offrandes dans les mêmes termes douze fois.
Les commentateurs n’ont pas manqué de s’interroger sur l’opportunité d’une telle répétition, alors que l’on sait la tradition de concision du texte biblique et le choix très précis des mots employés, tous porteurs de sens. Dans ces conditions, pourquoi de telles répétitions ?
Notre tradition veut probablement attirer notre attention non pas sur le contenu matériel des offrandes qui sont effectivement toutes identiques, mais davantage sur les ressorts intérieurs de chacun des chefs des tribus qui étaient mus par un dévouement et un amour de D.ieu uniques et personnels.
Le Midrash détaille ainsi l’orientation d’esprit de chacun des princes. Certes, la composition des offrandes était identique mais l’intention et la symbolique qui animaient à chaque fois le cœur et l’esprit des chefs de tribu étaient à chaque fois spécifiques et uniques.
Aussi, comme nous le savons, ce que l’Eternel recherche dans notre pratique c’est avant tout le cœur, et c’est précisément ce que souligne cette répétition des mêmes versets. Tout se passe comme si la Torah nous disait : chaque fois que vous servirez Hachem de tout votre cœur, avec une volonté authentique, l’Eternel considérera votre prière, votre Mitsva comme une pierre précieuse unique au monde. Peu importe que vous répétiez chaque jour les mêmes paroles dans vos prières, que vous répétiez les mêmes gestes, dès lors que vous y mettez tout votre cœur, vous accomplissez à chaque fois un acte unique, précieux et chéri par l’Eternel.
Cette leçon est valable dans le domaine de la « 'Avodat Hachem », du « service divin » mais elle trouve une application toute particulière en matière d’éducation.
En effet, les parents sont bien souvent confrontés à la difficulté de conserver un regard neuf à l’égard de l’ensemble de leurs enfants. S’il est vrai qu’il est naturel de suivre les progrès des aînés et d’accompagner leur évolution avec émerveillement, cette spontanéité peut avoir tendance à s’émousser avec les enfants plus jeunes qui grandissent dans le sillage des plus grands sans susciter le même enthousiasme. Or, chaque enfant est porteur d’un univers qui lui est propre, ses progrès ont une importance capitale à ses yeux, et sont parfois le fruit d’efforts que nous ne soupçonnons pas. Aussi, est-il très important d’accueillir l’évolution de chaque enfant avec un égal émerveillement. Les enfants puisent dans le regard de leurs parents, dans les félicitations qu’ils reçoivent une énergie qui les accompagne durant toute leur vie, et qui leur donnent la force d’atteindre des objectifs très élevés.
De même que l’Eternel a accordé la même importance et les mêmes égards aux cadeaux des chefs de tribus, furent-ils tous identiques, de même, en tant que parents ou éducateurs, nous devons nous efforcer d’accueillir les cadeaux de tous nos enfants, leurs attentions à notre égard, leurs progrès avec la même bienveillance, le même enthousiasme.
Puisse l’Eternel nous permettre de réussir dans cette voir et de donner à nos enfants, comme à chaque être autour de nous, l’importance qui lui revient.