La Torah parle, dans la présente Paracha, des lois relatives à la lèpre et elle nous informe du processus de purification et de repentir que celui qui est touché doit entreprendre. Le verset précise : « Quand une personne (Adam) aura dans la peau de sa chair une Séeth ou une Sapa’hath ou une Bahéreth, qu’il y aura dans la peau de sa chair une affection de Tsaraat, il sera amené à Aharon le Cohen. »[1] Le Natsiv souligne l’emploi de terme « Adam » quand on parle du lépreux. Il rapporte un passage du Zohar qui liste quatre terminologies pour parler de l’être humain : Adam, Ich, Guéver et Énoch. La plus élogieuse et élevée de ces appellations est Adam, qui fait référence à un homme respectable.

Pourquoi la Torah parle-t-elle ainsi du lépreux ? On sait que celui-ci est puni pour avoir commis de graves fautes, comme le Lachon Hara ou pour avoir fait preuve de mesquinerie ou d’arrogance. Il doit entamer un long processus de purification lors duquel on lui montre ses erreurs. Il ne s’agit donc visiblement pas de l’individu le plus vertueux qui soit. Alors, pourquoi lui réserver les plus nobles attributs ?

Rav Nissan Alpert[2] propose une réponse intéressante. Ce qui différencie l’homme respectable des autres individus n’est pas la fréquence de ses échecs ou de ses fautes, mais plutôt son désir d’admettre son erreur et de s’améliorer. Le lépreux qui est prêt à entreprendre le long processus de purification et de repentir, est quelqu’un qui est disposé à changer et à s’élever ; c’est l’élément qui détermine la grandeur de l’individu. On ne distingue pas forcément celui qui n’a jamais commis de faute.

Cette idée revient souvent dans les commentaires de nos Sages. La Guémara[3] présente le cas de celui fait dépendre des Kidouchin[4] d’une certaine occurrence. Par exemple, un Racha (mécréant) invétéré qui veut établir des Kidouchin à condition qu’il soit Tsadik. On aurait pensé que cet engagement n’est pas validé étant donné qu’il est connu pour être Racha et que concrètement, son comportement n’a aucunement changé. Pourtant, la Guémara tranche que ces Kidouchin sont valables, car cet homme eut peut-être des pensées de repentir. Notons que pour effectuer une véritable Téchouva, l’individu doit passer par plusieurs étapes, dont celle du Vidouï (aveu de sa faute) ; or cet homme ne s’est pas confessé explicitement. Néanmoins, le fait même qu’il ait peut-être décidé de s’améliorer montre qu’il peut devenir Tsadik en un instant. Sa volonté de changer et de s’élever semble donc être l’élément clé pour définir sa vertu.

Prenons un autre exemple qui illustre bien cette idée. Toute l’année durant, nous disons, après le verset de Chéma Israël, les mots « Baroukh Chem Kévod Malkhouto Léolam Vaèd » à voix basse. Ceci, parce que quand Moché Rabbénou monta aux  Cieux pour recevoir la Torah, il entendit les Anges louer Hachem en ces termes. Par égard pour leur éloge, nous les disons également, mais du fait du niveau sublime des Malakhim – par rapport à celui de l’être humain – nous les récitons à voix basse. Cependant, à Yom Kippour, nous les disons à voix haute, car nous sommes comparés aux Anges en ce saint jour. On comprend difficilement pourquoi dès le début du jeûne, dès Arvit de Kippour, nous les récitons à voix haute, bien que nous soyons juste après un repas copieux et que notre niveau angélique ne soit donc pas des plus évidents ; tandis qu’à la fin de cette journée, juste après le pinacle de Kippour – qui est atteint lors de la prière de Néila – nous recommençons à dire « Baroukh Chem… » à voix basse dans la prière de Arvit qui suit Yom Kippour. Il semblerait qu’après avoir jeûné et prié durant toute une journée, nous soyons plus spirituels, plus élevés qu’au départ. Les commentateurs expliquent ce qui fait toute la différence : au début de Yom Kippour, nous sommes portés par la volonté de nous amender, d’amorcer le chemin vers la Téchouva et la pureté alors qu’à la fin de cette journée, nous retournons à notre situation initiale, dans laquelle nous n’avons plus les mêmes opportunités de nous améliorer. C’est donc notre dynamique qui est déterminante – allons-nous de l’avant ou non ?

Ce qui définit la grandeur de l’homme n’est dons pas sa vertu, sa perfection, mais son désir de s’améliorer et d’apprendre de ses erreurs. Puissions-nous mériter d’intérioriser cette leçon.
 

[1] Vayikra 13,2.

[2] Limoudé Nathan, rapporté par Rav Issakhar Frand.

[3] Kidouchin 49b.

[4] Il s’agit de donner un objet d’une valeur d’une Pérouta et de déclarer que la femme lui est Mékoudéchet (réservée) par cet objet.