La paracha de Réé (14, 1) nous dit : בָּנִים אַתֶּם לַיהוָה אֱלֹהֵיכֶם לֹא תִתְגּדְֹדוּ (Vous êtes les enfants de l’Eternel votre D.ieu, ne vous tailladez pas le corps).
Le Yalkout Chimoni rapporte une interprétation différente des mots : « Lo titgodédou » [littéralement : « ne vous tailladez pas »], selon laquelle il s’agirait d’une défense de former au sein du peuple juif des groupes divisés les uns des autres [de la racine « agoudot » : des groupes].
On raconte qu’un homme vint trouver un jour le ’Hafets ’Haïm en lui demandant : « Comment se fait-il que notre peuple connaisse tant de coutumes et de mouvements différents les uns des autres ? Les ’Hassidim prient d’une certaine manière, les Mitnagdim d’une autre et les Séfaradim encore d’une autre façon. Même au sein des mouvements hassidiques, chacun d’eux opte pour une approche spécifique : certains prient avec enthousiasme et ferveur, d’autres plus calmement, voire avec austérité, etc. Ne serait-il pas préférable que toute la communauté juive s’accorde pour suivre un même rite ? »« En vérité, répondit le ’Hafets ’Haïm, vous auriez pu poser la même question au tsar en personne. Pourquoi a-t-il besoin de se doter d’armées différentes, elles-mêmes composées de régiments distincts ? Pourquoi donc disposer d’une infanterie, d’une cavalerie, d’une marine, d’une artillerie, etc. ? Ne seraitil pas plus sage de rassembler toutes ces troupes dans un seul corps militaire, de toutes les munir avec les mêmes armes et de nommer à leur tête un seul général en chef ? Je suis certain qu’en agissant ainsi, le tsar s’épargnerait beaucoup de tracas…
Mais la réponse, toute personne sensée la connaît : chaque unité militaire possède ses propres fonctions et doit remplir des missions spécifiques. Le but d’une armée est en effet de défendre le pays et de vaincre l’ennemi et pour ce faire, elle est obligée d’étendre ses champs de manoeuvre pour être présente sur tous les fronts. Et de fait, ce qu’un fantassin parvient à réaliser, aucun cavalier ne le peut, et vice-versa. Si le fantassin peut tenir tête à l’ennemi sur le front, le cavalier jouit quant à lui d’une capacité de mouvement beaucoup plus importante et peut ainsi poursuivre l’ennemi dans ses retranchements ou battre plus vite en retraite. De même pour l’artillerie : elle est capable d’atteindre l’ennemi à longue distance, ce qu’aucun autre soldat ne peut faire. Même les soldats qui sonnent du clairon ont leur propre importance car bien qu’ils ne mènent pas le combat, ils sont néanmoins capables de galvaniser les troupes au son de leur instrument.
« Quant à nous, enchaîna le ’Hafets ’Haïm, notre mission sur terre est de vaincre le Satan, qui nous incite à nous détourner de la Torah. Nous sommes donc continuellement en quête de stratégies pour le dominer et le vaincre. C’est la raison pour laquelle notre « armée » est composée de différentes troupes : une infanterie, une cavalerie, une artillerie, etc. Chacune d’elles a sa propre importance, car elle affronte l’ennemi à sa manière, avec les armes qu’elle maîtrise le mieux, et nul ne saurait se substituer à l’action de l’autre. Un groupe utilise la force de l’étude de la Torah, un autre celle de la prière et un troisième sa flamme et son enthousiasme. L’essentiel est que chacun de ces groupes sache que tous mènent un seul combat, à savoir une guerre contre le mauvais penchant. »