« Et maintenant Israël, qu’est-ce qu’Hachem te demande ? Uniquement de craindre Hachem, ton D.ieu, de marcher dans Ses voies et de L’aimer, et de servir Hachem, ton D.ieu de tout ton cœur et de toute ton âme. » (Dévarim, 10:12)
Tandis qu’il leur rappelle tous les événements survenus dans le désert, Moché informe les Bné Israël de ce qu’Hachem attend d’eux – la crainte d’Hachem est citée en priorité. La Guémara rapporte une Braïta au nom de Rabbi Méir qui affirme que le mot « qu’est-ce que » — מה doit être lu מאה – cent. Il en déduit qu’il convient de réciter cent bénédictions chaque jour.[1]
Plusieurs questions peuvent être soulevées sur cette Guémara. Tout d’abord, quel rapport peut-on trouver entre ce verset et l’obligation de dire cent Brakhot par jour ? Et peut-on ajouter une lettre au mot « Ma » pour créer un nouveau mot ? Si la Guémara transforma le « Ma » en « Méa », c’est qu’il y a un rapport entre ces deux termes. Quel est-il ?
L’auteur du Divré Yoël[2] explique qu’il y a un lien profond entre la crainte de D.ieu énoncée dans ce verset et les Brakhot. L’expression « Yirat Hachem » nous fait naturellement penser à la peur d’Hachem, mais elle implique plus que cela ; il s’agit d’être conscient de Son omniprésence et du fait qu’Il nous dirige[3]. D’ailleurs, le mot « Yira » signifie également « voir » — il faut craindre Hachem Qui nous surveille constamment.
Le Divré Yoël écrit que l’allusion du verset aux cent bénédictions à réciter journalièrement nous monte qu’en disant les Brakhot avec concentration, on gagnera inévitablement en Yirat Hachem. Comme nous le savons, presque chaque domaine de la vie est accompagné d’une bénédiction. Dès notre lever, nous remercions Hachem pour des choses que l’on pourrait facilement considérer comme normales, comme notre capacité à se lever, à voir, à être vêtus... Puis on récite les diverses bénédictions sur la nourriture, ainsi que sur le corps humain. Si l’on se concentre sur ce que l’on dit, on sera forcément imprégné d’une profonde révérence et l'on verra Hachem dans chaque domaine, à chaque instant.
Le Divré Yoël explique ensuite le lien entre le mot « Ma » et l’idée des cent (Méa) Brakhot. Il souligne que le mot « Ma » fait allusion à l’expression de Moché Rabbénou et Aharon Hakohen qui firent preuve d’une extrême humilité. L’une des fois où le peuple juif se plaignit, ils répondirent : « Véna’hnou Ma Chétalinou Alénou » — Que sommes-nous pour que vous vous plaigniez à nous ?[4] La Guémara[5] affirme qu’il s’agit d’une plus grande marque d’humilité qu’Avraham Avinou qui avait déclaré qu’il était « cendres et poussière ». Ainsi, le Divré Yoël précise que le fait de réciter les Brakhot avec concentration nous mène à la modestie, car nous réalisons ainsi que tout est cadeau d’Hachem. Un tel effacement nous imprègne automatiquement de Yirat Hachem. Ainsi, la Guémara estime que la façon d’atteindre le « Ma » (la modestie) de Moché et d’Aharon est de réciter les cent Brakhot.
Que signifie ce chiffre – 100 ? Le Sfat Émet[6] explique que c’est une référence aux Méa Adanim – cent socles qui étaient la fondation du Michkan. De la même manière que ces cent socles étaient la base du service divin dans le Michkan, les cent bénédictions quotidiennes sont la base de la Yirat Chamaïm.
Pour terminer, rapportons la fameuse histoire du Rav à qui un disciple demanda quelle était la différence entre ses Brakhot et celles du Rabbi. Ce dernier lui demanda pourquoi il faisait les Brakhot. « Pour pouvoir manger », répondit l’élève. Et le Rav de répondre que pour sa part, il « mangeait pour pouvoir faire la Brakha. » Ainsi, le bénéfice spirituel de la Brakha est bien plus important que le profit matériel apporté par la nourriture.
Puissions-nous tous mériter de réciter nos Brakhot avec concentration et de profiter des divers bénéfices qu’elles engendrent.
[1] Ména’hot 43b.
[2] Divré Yoël, Parachat Térouma, rapporté dans Métivta, Ména’hot 43b, Kaftor Vapéra’h, p. 22.
[3] Note importante : Nous ne sommes pas censés être paralysés de peur par un Être puissant et malveillant. Il faut, par contre, être conscient que nos actions ont des conséquences.
[4] Chémot, 16:7.
[5] ’Houlin 89a.
[6] Sfat Émet, Térouma 5632, rapporté dans Métivta, Ména’hot 43b, Kaftor Vapéra’h, p. 21.