Cette semaine, une amie à moi, dont les deux fils sont enrôlés, m’a dit, la gorge nouée : « ce sont nos enfants qui nous protègent alors que dans la nature des choses, ça devrait être le contraire ; ce sentiment est horrible à vivre pour un parent. » Ses mots m’ont bouleversée. C’est tellement vrai. Notre armée, ce sont nos enfants. Ce n’est pas comme dans tous les pays du monde, un choix de carrière. Non ! En Israël être soldat, c’est la suite du cursus scolaire. Se battre contre des ennemis sanguinaires, c’est ce à quoi notre jeunesse est préparée, savoir manier une arme pour défendre sa propre vie, c’est ce que nos enfants font depuis 75 ans.
Cela fait plus d’un mois que nos fils se battent sur le front pour que nous soyons en sécurité dans nos maisons, plus d’un mois que nos frères font preuve d’un courage digne des plus grands guerriers pour affronter nos ennemis et anéantir la sauvagerie et l'absence d'humanité qu’ils incarnent, plus d’un mois que ces jeunes n’hésitent pas à sacrifier leurs vies au profit de notre paix, plus d’un mois qu’ils n’ont pas vu, ni parfois même entendu leurs propres familles.
Torah-Box est leur famille. Torah-Box est le frère qui vient danser avec eux, chanter, rire. Torah-Box est le papa qui vient bénir, enlacer et donner l’espoir d’un lendemain meilleur. Torah-Box est la maman qui, sans prononcer le moindre mot, comprend, console et apaise.
Cela fait un mois que notre équipe sillonne les routes d’Israël pour remonter le moral des troupes sans regarder si les destinations peuvent représenter un risque, sans réfléchir à la fatigue… Nous nous sommes rendus dans une base où les 'Hayalim étaient véritablement en plein combat. Nous servions à manger à 200 d’entre eux, pendant que 200 autres se battaient et revenaient avec des terroristes qu’ils venaient de capturer, et à ce moment-là les 200 premiers les relayaient au combat. Lorsque l’on voit de nos propres yeux, nos enfants d’une vingtaine d’années revenir avec ces monstres entre les mains, nous comprenons alors la justesse de nos actions, nous sommes au bon endroit et nous faisons tout ce qu’il y a de plus juste.
Cela fait plus d’un mois que nous distribuons à nos soldats de quoi tenir physiquement et surtout spirituellement… Des milliers de sandwichs que notre équipe de bénévoles prépare sans relâche chaque semaine, des confiseries, des boissons qui montrent combien on les aime, combien ils sont importants pour nous. Des milliers de 'Hallot récoltées dans tous les foyers d’Israël et redistribuées à nos vaillants guerriers pour leur dire qu’on les attend à la maison, que leur chaise peut être vide à la table de Chabbath, la place qu’ils ont dans nos cœurs, ne fait que grandir. Nous avons organisé des dizaines de soirées pizzas, où des patrons de pizzerias se sont déplacés avec leur four, leurs provisions pour régaler nos frères. Des dizaines de barbecues, la marque de fabrique de notre magnifique pays, car toute occasion aux couleurs de notre drapeau, se fête autour de grillades. Imaginez l’euphorie !
Mais nous avons également distribué tellement de forces spirituelles, des Tsitsiot, des Kippot, des Téfilines. C’est ce que notre magnifique armée réclame le plus. « Amenez-nous des protections ». Nous avons même équipé une base de livres d’étude, une bibliothèque entière à leur demande. « Nous sommes partis précipitamment de chez nous, sans avoir le temps d’emporter nos Séfarim. »
Notre équipe répond à chaque demande, aussi difficile soit-elle, elle relève chaque défi.
Dès le début de la guerre, nos soldats, malheureusement, ont été confrontés à des scènes d’une barbarie sans nom, des images qu’ils n’auraient jamais du voir, des odeurs qu’ils n’auraient jamais du sentir… La patrouille, responsable d’identifier les corps des victimes, s’est tournée vers nous en nous suppliant de les aider à supporter l’insupportable. Nous avons tout de suite réuni les fonds nécessaires pour leur procurer du matériel de qualité qui puisse alléger leurs souffrances lors de leurs missions si douloureuses ; entre autres choses, nous leur avons fourni des masques spéciaux qui permettent aux soldats de ne pas avoir à sentir l’odeur des scènes atroces dans lesquelles ils sont plongés, des scènes atroces qui marqueront leurs êtres à jamais.
Notre équipe se déplace dans le Nord, le Sud du pays, à la frontière du Liban, de la Syrie… dans des bases un peu éloignées, oubliées… On ne sait pas ce qu’on va trouver à l’arrivée, des soldats d’une humeur joyeuse, des soldats peinés qui viennent de vivre un drame au sein de leur bataillon, des soldats fatigués dont le moral est en baisse, ou des soldats qui ont besoin d’être renforcés, mais Hachem est avec nous, à chaque occasion, nous voyons à quel point Il nous accompagne en chargeant toujours nos coffres, nos bouches et nos cœurs des éléments qui réjouiront assurément nos soldats.
Nous avons visité des dizaines de bases militaires, de points de surveillance, depuis le début de la guerre, et nos missions ont pris des allures aussi différentes qu’elles sont nombreuses. Nous nous adaptons aux besoins du bataillon que nous rencontrons. Certains ont besoin de chanter, de danser, d’exprimer cette Sim'ha qui fait battre chaque cœur juif en toutes circonstances, cette Sim'ha qui nous a été volée en ces fêtes de Sim'hat Torah le 7 octobre dernier, et que nous récupérons de droit car elle est notre essence et notre identité. Certains ont besoin de parler, d’être écoutés, renforcés, compris. Alors nous nous efforçons de combler ce manque, d’être là pour eux. D’autres ont uniquement besoin d’être accompagnés, de chasser cette solitude qui peut être présente même lorsqu’on est nombreux, cette solitude qui peut briser si elle n’est pas entendue et acceptée. Lorsque les mots n’ont plus leur place, les silences sont parfois plus salvateurs, ces silences que seules deux âmes connectées, partagent et comprennent. Une étreinte, un regard plein d’espoir, une sourire empli de reconnaissance, une bouche qui bénit et un cœur qui aime, c’est ce que nous distribuons sans relâche dans nos bases militaires depuis plus d’un mois.
Notre équipe ne quitte les soldats qu’une fois assurée que chacun a rechargé sa réserve d’énergies positives, que le moral des troupes est remonté, que les cœurs sont réchauffés. Lors de ces visites, l’émotion est véritablement palpable, les cœurs s’unissent telle une famille heureuse de se retrouver et de partager ce moment ensemble. On ne veut pas que l’instant se termine, encore une tape sur l’épaule, une bénédiction, un paquet de confiseries qui s’était échappé du lot, une mise de Téfilines avant de se dire au revoir. Nous nous promettons de nous revoir lors de la Guéoula définitive avec la venue du Machia'h. Nous nous serrons dans les bras les uns des autres tels des frères qui ne veulent pas se quitter mais qui continueront à se porter dans leurs cœurs, et à se protéger mutuellement, chacun avec son arme.
Nous démarrons et à bout de forces dans la voiture, le silence s’installe, c’est un silence de bien-être, de solidarité et d’union. On ne parle pas, mais on se comprend, on sait. Et en jetant un dernier coup d’œil dans les rétroviseurs, nous voyons nos combattants aux visages lumineux, des visages qui iront jusqu’à la victoire, au nom d’Hachem et de son infini Kavod.
Nous prions pour que chacun soit protégé par son ange personnel, et que chacun revienne en bonne santé dans son foyer. Amen véamen !