Les maîtres nous enseignent dans la Guemara : « On peut connaître l’homme grâce à 3 éléments : sa coupe, sa poche et sa colère » (Traité Erouvin 65b). Le lien premier, apparent, entre ces 3 termes est basé sur une racine linguistique semblable en hébreu : deux lettres apparaissent dans ces 3 vocables : le Khaf et le Samèkh : Koss-coupe, Kiss-poche et Kaass-colère). Cette racine implique une idée de présence, de manifestation concrète, comme on le remarque dans le mot « couvrir » (en hébreu : Kassot) ou « chaise » (en hébreu Kissé). Cette racine sémantique précise une idée d’un substrat, base solide, soutien, support d’une autre réalité concrète.
Pour revenir aux trois termes évoqués plus haut – coupe, poche, colère – des observateurs facétieux ont fait remarquer que ces trois concepts sont à la source de l’époque moderne : « coupe » exprime la mesure relative, excessive ou insuffisante, du monde matériel, « poche » se réfère bien sûr à l’argent et « colère » évoque le caractère, le psychisme de l’individu. Ces observateurs ont donc remarqué que ce sont 3 Juifs (d’origine, mais nullement représentatifs du judaïsme, bien évidemment) qui ont ainsi marqué l’époque contemporaine : Einstein (théorie de la relativité), Marx (lutte contre le pouvoir de l’argent) et Freud (analyse psychologique de la conduite de l’homme).
Les sages, dans leur présentation succincte des 3 idées, traduisent, en fait, de façon assez schématique les réactions mondiales à la crise du coronavirus. Aspect technique, sanitaire dans un premier temps, puis problème économique extrêmement grave, et en fin de parcours, une crise sociale, un désordre dans la gouvernance, qui crée des problèmes humains à grande échelle. Ces difficultés apparaissent différemment dans les divers pays, mais pour l’observateur objectif, d’une façon ou d’une autre, les aspects négatifs de la situation sont malheureusement assez semblables. On a l’impression qu’à l’occasion de cette crise si grave, toutes sortes de difficultés cachées, enfouies, apparaissent ouvertement, au grand jour. En Israël, la crise actuelle entre les secteurs laïques et la population orthodoxe illustre malheureusement ce problème. Et il est essentiel de s’interroger sur la cause de cette crise, et de se demander comment un problème apparemment sanitaire se transforme en un affrontement idéologique. Il est probable que des insuffisances, des erreurs, de graves fautes ont pu être commises par certains, malgré des intentions assurément positives, mais de là à accuser les religieux de vouloir empoisonner les gens, la distance est incommensurable ! Il faut savoir raison garder ! C’est ici que le passage vers l’aspect psychologique semble dévier dans des directions inquiétantes.
Un grave problème inédit se pose à l’humanité et le résoudre n’est pas facilement réalisable : il ne s’agit pas d’idéologie, mais de mentalité. Une situation qu’il est difficile de gérer entraîne nécessairement des dérives dangereuses et incontrôlables. Il est nécessaire de ne jamais oublier l’ultime but de l’Histoire, et d’inclure cette lecture dans une perspective plus large. Quand l’on ne sait plus comment réagir, on se laisse aller à toutes sortes de réactions fantaisistes. La haine vouée au Président des Etats-Unis a ainsi dépassé les proportions rationnelles : on l’a accusé d’être un malade mental, accusation ridicule pour un tel personnage ! Il ne faut pas perdre de vue les faiblesses de l’homme, mais si l’on se réfère à des valeurs transcendantes, l’équilibre peut être rétabli. Les problèmes physiques risquent de se transformer en problèmes psychologiques, et c’est une impasse qu’il importe d’éviter. Dans d’autres contrées, les conséquences de la crise sanitaire se font aussi sentir d’une façon ou d’une autre.
Mais le croyant sait qu’au bout du tunnel, il y a une lumière. C’est cette FOI qui nous protège, à chaque étape de notre existence. Le Netsiv de Volojine, auteur du commentaire HaAmek Davar, propose une présentation parallèle des fils d’Adam Ha-Richon et des fils de Noa’h : le plus matériel, Caïn et Ham ; le moyen, qui représente l’immense majorité de l’humanité, Hével et Yafet ; et le représentant de la spiritualité, Sheth et Chem. Si l’humanité se laisse entraîner par la matérialité, alors, Caïn tue Hével, mais pour que l’humanité puisse subsister, il faut que Yafet trouve sa place dans les tentes de Chem, pour avoir, au moins, une étincelle de spiritualité. L’humanité ne pourra survivre que si elle se réfugie dans le chemin de l’élévation vers le Créateur. Toutes proportions gardées pour le peuple juif, ne nous égarons pas dans des querelles inutiles. Nous devons tendre, pour notre gouverne, à une unité dans le peuple, pour aboutir à réveiller l’étincelle spirituelle. En hébreu, le terme E’had (UN) a la même valeur numérique (13) que le terme Ahava (AMOUR). Restons unis dans l’AMOUR pour mériter l’AMOUR de D.ieu, en récitant ensemble la formule qui a toujours uni le peuple juif : « Ecoute Israël, l’Eternel est notre D., l’Eternel est UN ».