Question d’une internaute : "Bonjour Mme Seyman, les vacances approchent et en tant que femme divorcée et mère de famille, j'ai un problème assez critique. Voilà, je me suis remariée et avec mon second époux, nous avons une vie plutôt équilibrée, tandis que mon ex-mari est plutôt en mode "célibataire de 50 ans". Nous essayons de donner à nos enfants un mode de vie sain, nous faisons Chabbath et essayons de leur donner des valeurs de morale et de religion juive. Nous avons donc réservé des vacances dans un club Cachère avec toutes les activités saines que ça comprend pour les 2 semaines où ils sont avec nous. Mais mon mari qui les prend deux semaines en vacances, les amène à Ibiza !!!! C'est une ville de dépravation, il n'y a même pas de "Beth ‘Habad" ni de synagogue. Il a prévu de sortir tous les soirs en club et de les laisser devant la télé à l'hôtel. Je déprime à l'idée de savoir mes enfants dans ce contexte horrible et il ne veut bien sûr pas concéder la garde des grandes vacances… Que dois-je faire ? Comment les y préparer ? Aidez-moi svp !
Réponse de Mme Nathalie Seyman
Le divorce parental peut engendrer de nombreux problèmes dans la vie des enfants qui le vivent. Mais heureusement, ces problèmes ne sont pas inévitables, car ils dépendent beaucoup du comportement des ex-conjoints et d’une certaine harmonie dans l’éducation malgré la séparation. Mais que faut-il faire lorsque l’un des deux ne joue pas le jeu ?
Risques de conséquences du divorce sur l’enfant
Il est impératif de comprendre l’importance du rôle et des habiletés des parents pour aider leurs enfants à faire face au divorce, car ce sont eux qui peuvent atténuer ou, au contraire, être à l’origine des conséquences négatives plus ou moins sérieuses sur les enfants. La plupart des enfants réagissent au divorce de leurs parents en manifestant des émotions douloureuses, dont la tristesse, la peur de l’abandon, la culpabilité, la colère, l’inquiétude et l’amertume. Ils ressentent un sentiment de perte lorsque l’un de leurs parents déménage et doivent gérer le deuil du couple parental et de l’image de la famille unie idéalisée.
Lorsqu’après le divorce les parents sont en conflit intense et en désaccord permanent, s’ajoutent alors la confusion, les idées fausses, le sentiment d’être en conflit de loyauté et le fait de se sentir pris en otage. Ce sont des sentiments destructeurs pour la construction identitaire de l’enfant ! L’enfant a besoin d’idéaliser son père ET sa mère pour se développer sainement. On ne peut pas dire à un enfant qu’il ne doit pas écouter l’un ou l’autre de ses parents, il en va de son équilibre psychologique. Ce que les parents doivent réaliser, c’est que celui qui désavoue l’autre sape sa propre autorité, car l’enfant perd confiance, non seulement dans le parent désavoué, mais aussi dans celui qui désavoue. Il ne peut renier un de ses deux parents. En conséquence, il reniera les deux ! C’est tout le système éducatif intériorisé par l’enfant qui est détruit, il ne peut plus s’appuyer sur quoi que ce soit, il n’a plus de bâton de soutien. Alors, bien sûr, il n’est pas toujours facile de s’entendre avec son ex-conjoint au sujet de l’éducation, des vacances scolaires, etc. Mais dans l’intérêt de l’enfant, il est pourtant essentiel de trouver des solutions respectant les droits de chacun.
Un divorce = 2 éducations ?
Un divorce, c’est une évidence, sépare les conjoints. Mais il ne doit pas séparer les parents. Évidemment, lorsque l’on ne vit plus ensemble, les différences éducatives se font sentir. Et ce n’est pas si grave s’il y a une différence entre « chez papa » et « chez maman ». Je dirai même qu’elle est inévitable. L’important est que l’enfant comprenne qu’il y a un cadre pensé et posé pour lui dans chaque foyer. C’est cela qui le rassure et le structure. Il faut essayer de s’entendre sur les grandes lignes éducatives, et non sur les détails, car c’est dans les détails que s’expriment la singularité et la créativité de chacun. L’essentiel est que les mêmes règles de vie et interdits s’imposent à l’enfant dans ses deux maisons.
Il ne faut pas que les différences de points de vue, de valeurs et de principes deviennent des sources de conflits, alimentés par la rancœur ou la rivalité. Le problème se pose lorsque l’un des parents refuse systématiquement tout de l’autre ou décide de faire exactement le contraire de ce qu’il fait, parfois juste par principe. Souvent, il s’agit d’une réaction agressive contre son ex-conjoint, et non un véritable choix éducatif et, dans ce cas-là, pour le bien de l’enfant, il est important de faire preuve de patience pour atténuer les rancœurs et tout faire pour essayer de rétablir la communication. Il faut réaliser que si l’écart entre les deux foyers est trop grand, alors l’enfant l’exprimera par son comportement, davantage que par des mots : tristesse, colère, mutisme, repli sur soi, agressivité, troubles psychosomatiques… Dans ces cas-là, il ne faudra pas hésiter à faire appel à un professionnel.
Comportement parental idéal après un divorce
En apprenant comment gérer leurs conflits en évitant d’y faire entrer l’enfant, exercer leurs fonctions parentales de façon efficace et nourrir des relations chaleureuses et affectueuses avec leur enfant, les parents peuvent avoir un puissant effet positif qui atténuerait significativement les effets toxiques du divorce. Toujours respecter l’autre, ne jamais le critiquer ou le rabaisser, et surtout faire en sorte que l’enfant garde son rôle d’enfant et non un rôle de confident, de messager ou de remplaçant du parent absent.
Mes conseils
- Essayez de parler avec votre ex-conjoint de manière cordiale, en montrant de la bonne volonté et pas avec l’idée d’attaquer son mode d’éducation. Discutez des valeurs importantes que vous souhaitez transmettre à vos enfants et ce que vous devez mettre en place ensemble pour y parvenir.
- Mettez en avant vos valeurs communes et parlez-en ensemble à vos enfants. Évitez d’intégrer votre second mari avec votre ex-conjoint, car, souvent, il peut y avoir de la rivalité parentale et cela peut mettre en échec toute tentative de médiation.
- Expliquez-lui l’importance de la transmission du judaïsme à vos enfants. Invitez-le à s’y intéresser et à comprendre pourquoi vous êtes tant à cheval sur ces valeurs. Amenez cela en douceur. Parlez avec lui de ce qui est très important pour vous (la Cacheroute, par exemple) et lâchez plus de lest sur d’autres points. Ne vous focalisez pas trop sur ces différences s’il n’est pas d’accord. Il y a beaucoup de couples mariés qui ont un niveau différent de religion. Ce n’est pas dramatique, tant que vous transmettez de votre côté le judaïsme. Ayez confiance en Hachem, cela viendra progressivement et peut-être avancera-t-il dans cette voie par le biais de ses enfants.
- Ne vous disputez pas avec lui devant vos enfants. Ne parlez jamais en mal de lui et même restez solidaire de lui, même si vous n’êtes pas entièrement d’accord avec ses choix. Il se sentira respecté dans son rôle de parent et accueillera avec plus de bienveillance vos propositions.
- Restez ouverte au compromis. Établissez des priorités, mais acceptez de lâcher prise sur certains points. Ne cherchez pas à avoir raison sur tout. Le sujet des vacances est un bon exemple pour commencer : établissez ensemble ce que vous ne voulez pas qu’il fasse (les laisser seuls le soir, les amener dans des lieux inadaptés pour les enfants…), mais acceptez-en d’autres. Et faites de même pour vos vacances à vous en contrepartie. Gardez en tête que tous ces efforts participent au bien-être de vos enfants.
- Expliquez à vos enfants les bienfaits de la Torah et des Mitsvot, amenez-les à des cours de Torah, tout ceci leur permettra de garder toutes ces valeurs, même à l’extérieur de chez vous.
- Si vos enfants essaient de tirer avantage des différences éducatives, sur le mode “Mais chez papa, j’ai le droit de…”, il suffit de répondre : “Chez ton père, ça se passe comme ça, ici, ça se passe autrement !”. L’enfant doit comprendre que, même s’il y a des différences, vous ne dérogez pas à vos règles.
Beaucoup de couples peuvent être confrontés à ces problèmes, divorcés ou non. Cela peut arriver avec les grands-parents, les amis, ou même l’école. L’important ce sont que les valeurs que nous transmettons à nos enfants soient comprises par eux et bien intégrées, afin qu’ils les conservent toujours selon les rencontres qu’ils feront et les modes de vie auxquels ils seront confrontés.
Béhatsla’ha !
Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante [email protected]. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme.