Nous avons expliqué précédemment l’importance pour les parents de savoir respecter l’évolution naturelle de leur enfant, en évitant de brûler les étapes de son développement. Développons davantage cette idée.
Pour rappel, nous avions expliqué les deux processus complémentaires dans l’éducation : le Binyan, correspondant aux valeurs apportées aux enfants par leurs parents, et la Tsmi’ha, qui est le processus naturel de maturation de l’enfant, chez qui vont croître les éléments implantés en lui par ses parents.
Or, si une fois que les parents ont apporté ce qui était nécessaire à leurs enfants, ils n’ont pas la patience de voir le processus de Tsmi’ha se faire de lui-même, s’ils cherchent à précipiter l’ordre naturel de son développement, alors ils risquent de briser en lui l’élan qui le poussait à vivre pleinement son judaïsme. Car c’est la Tsmi’ha, cette capacité à faire s’épanouir à l’intérieur des éléments apportés de l’extérieur qui va assurer l’éclosion d’un judaïsme fort et plein de vie chez nos enfants.
Mais les parents qui agissent de manière opposée, qui n’apportent que peu de valeurs à leurs enfants en espérant qu’ils s’épanouiront d’eux-mêmes, commettent eux aussi une grave erreur. Car pour qu’il y ait croissance, il faut que quelque chose ait été planté au préalable. Ils obtiennent certes des enfants « épanouis », mais qui ne respectent rien et agissent à leur guise sans considération pour quiconque.
Toute la difficulté réside dans le fait de trouver un équilibre à mi-chemin entre l’ingérence excessive dans la vie des enfants et l’attitude de désintérêt pour leur sort. Or cet équilibre va s’obtenir justement en respectant l’ordre naturel de leur développement tel qu’il est défini dans les Pirké Avot (5, 21) : « A cinq ans [on lui enseignera] la Torah, à dix ans la Michna, à treize ans les Mitsvot, à quinze ans le Talmud, à dix-huit ans il se mariera…» L’on peut se demander pourquoi devrait-on s’en tenir à ces âges. Si notre enfant est très doué, pourquoi ne pourrait-on pas anticiper ? La réponse est que nos Sages ont défini ces « stations » en fonction des capacités intellectuelles et cognitives des enfants et non en fonction de critères sentimentaux ou intuitifs. Un enfant est mûr pour la lecture, on la lui enseigne. Puis son esprit se développe, il aborde des textes qui exigent de la réflexion, à savoir la Michna. A quinze ans, son esprit d’analyse et de réflexion lui permet de continuer avec le Talmud etc. Il s’agit d’étapes dans son développement intellectuel.
Dès que l’enfant sait prononcer quelques syllabes, son père devra lui enseigner des versets en hébreu, car l'apprentissage précoce du Lachone Hakodech est ce qui lui facilitera grandement l’accès à l’étude de la Torah.
Le roi Chlomo nous enseigne (Michlé 3, 1) : « il est un temps pour chaque chose ». Si ce principe s’applique à tous les domaines de l’existence, alors c’est encore plus vrai dans celui de l’éducation. De la même manière que l’agriculteur doit veiller à ensemencer son grain au moment propice, ni trop tôt ni trop tard, ainsi en est-il des parents qui doivent s’assurer qu’ils respectent les étapes de la croissance de leurs enfants.
C’est pourquoi il est si important d’enseigner le Lachone Hakodech à nos enfants le plus tôt possible. Les versets de la Torah sont empreints d’une Kédoucha que l’on ne retrouve pas dans leur traduction. Ainsi, au moment précis où l’enfant apprend la parole, on lui enseigne qu’il existe un domaine qui transcende sa vie de tous les jours et qui se nomme la sainteté. Évidemment, il faudra trouver les mots justes pour le lui expliquer, mais ceux qui seront parvenus à faire passer ce message à leurs enfants auront gagné quelque chose d’inestimable.
C’est là toute la signification du mot ‘Hinoukh : « éducation » et « inauguration » à la fois. ‘Hinoukh est à rapprocher du terme ‘Hanouka, comme dans l’expression « ‘Hanoukat Habayit », qui signifie l’inauguration d’une maison. Il s’agit de poser les fondements nécessaires à la bonne construction de notre édifice dès le départ, au moment propice.