Dans une synagogue de Jérusalem, deux familles fêtent les fiançailles de leurs enfants. Les invités arrivent, heureux de s’associer à cette joie. Comme le veut la coutume, le fiancé se doit de prendre la parole et prononcer un « Dvar Tora ».
Le fiancé à qui nous donnerons le prénom de Moshé, se lève et ses copains commencent à l’applaudir et à chanter. Moshé sourit et fait signe à ses amis d’arrêter pour qu’il puisse enfin s’exprimer. Il est ému, on le comprend. Il regarde la feuille où il avait mis par écrit son commentaire, il ferme les yeux et commence son discours :
- Si je suis tel que vous me voyez aujourd’hui, dit Moshé, je le dois à mon instituteur du cours moyen première année. Si sa réaction avait été différente, j’aurais été, moi aussi, certainement différent et très loin du jeune homme que vous avez devant vous.
Dans les yeux des invités, on pouvait y lire un certain étonnement. En effet, Moshé était connu comme un élève brillant, assidu dans l’étude et très respectueux des mitsvot. Que signifier ses propos ?
- Je me dois de vous donner des explications, continue Moshé. Voici donc toute l’histoire :
« Lorsque j’étais au cours moyen première année, j’avais un copain assez riche. Un jour, il arriva avec une montre magnifique, dernier cri. Il était heureux d’exhiber aux yeux de toute la classe le splendide cadeau qu’il avait reçu de son oncle venu d’Espagne.
Et moi, de mon côté, je me mis à l’envier. Ma famille n’avait pas les mêmes moyens que mon copain et je savais pertinemment que même dans mes rêves les plus fous, je ne recevrai jamais un pareil cadeau. C’est alors qu’il me vint une idée. Et le destin va me donner un sérieux coup de main. En fait, je pensais que la montre de mon copain serait mieux à mon poignet qu’au sien. Et lorsque la cloche sonna l’arrêt du cours et le début de la récréation, mon copain eut l’ingénieuse idée de laisser sa montre sur le pupitre.
Bien entendu, à son retour, la montre n’y était plus. Et là, c’est l’incompréhension. Qui avait eu le courage de subtiliser un objet qui ne lui appartenait pas ? On connaissait tous les élèves de l’école et ils étaient tous issus de familles honorables. Comment un tel vol pouvait subvenir dans cette classe ?
Notre instituteur arrive et on le met au courant de la nouvelle ! Son visage exprimait la déception. Il nous demande de nous mettre chacun à côté de son pupitre. Quant à lui, il rejoint son bureau. Il nous regarde avec amour et sévérité en même temps.
- On vient de m’annoncer, dit-il, qu’un de vous aurait volé une montre. J’ai peine à le croire tellement j’ai confiance en chacun de vous. Mais je me dois d’éclaircir cette histoire et vite. J’ai donc une question à vous poser et elle est très simple…
Qui à volé la montre ?
Un silence profond répond à la question.
- Je vois, dit l’instituteur, vous ne me laissez pas le choix. Je vais donc passer à côté de chacun de vous et inspecter vos poches.
Moi, continue Moshé, je sentis ma dernière heure arriver car c’était moi qui avais pris cette satanée montre.
L’instituteur commence ses recherches. Il est, à présent, tout près de moi. Mon cœur bat très vite. Que va-t-il advenir de moi ? Je vais être renvoyé de l’école et mes parents vont être déçus par mon attitude qui ne reflète en rien l’éducation qu’ils m’ont donné.
La main de mon instituteur plonge dans la poche de mon pantalon et bien entendu, il sent l’objet tant désiré.
Moi, je ferme les yeux. Les larmes commencent à poindre car j’attends la sentence. Mais celle-ci ne vient pas. L’instituteur prend la montre de mon pantalon et la glisse subrepticement dans la poche de sa veste. Et, sans rien dire continue sa recherche. Une fois la recherche terminée, il regagne son bureau. Un sourire radieux auréolait son visage.
- Je suis heureux de vous annoncer que le voleur ne fait pas partie de notre classe et j’en suis soulagé. Cela prouve que les cours que vous prenez ici, dans cette école vous sont productifs et que vous êtes d’excellents élèves. Je suis fier de vous. Fier de savoir que vous vous respectez. Fier de savoir que vous êtes loin d’envier ce que votre copain possède mais qu’au contraire vous êtes heureux pour lui. Fier de constater que vous avez compris que voler ne fera pas de vous quelqu’un de plus riche. Je suis fier, enfin d’être votre instituteur.
- Toutes les paroles qui venaient d’être prononcées m’étaient en fait destinées, continue Moshé, notre fiancé. Mais personne ne le sut. Et c’est là toute la grandeur de mon instituteur.
Cette attitude honorable m’a littéralement transformé. Il n’était plus question de le décevoir. C’est la raison pour laquelle, je suis devenu le jeune homme qui est devant vous aujourd’hui.
La leçon qu’il faut tirer de cette histoire est la suivante : Lorsqu’un professeur doit remettre un élève sur les bonnes rails, il ne faut pas qu’il oublie qu’il s’adresse à un être en devenir et que de sa réaction dépendra le futur de cet élève.
Cette histoire véridique a été rapportée par le Rav Fanger.