Comme nous les Juifs le savons, il n’y a ni coïncidence, ni hasard. En réalité, dans le Lachone Hakodech, la langue sainte, le terme même de « Mikré » (hasard) signifie : « Kara Mi Hachem » - c’est le fait de D.ieu. Le concept de Hachga’ha Pratit - le fait d’être guidé depuis les Cieux, fait partie de notre héritage juif. Tout est orchestré d’en Haut, même si nous ne sommes pas conscients de la main de D.ieu qui nous guide.
Chaque matin, lorsque nous récitons nos Brakhot, nous disons : « Hamékhine Mitsa’adé Gavèr - béni soit Hachem, notre D.ieu, qui prépare les pas de l’homme ». Malheureusement, dans notre société contemporaine, nous courons si vite que cette petite voix, ce message d’en-Haut, la conscience de l’existence d’une Force Supérieure qui nous guide n’est plus audible… Nous n’entendons pas, nous ne voyons pas. Nous passons notre temps à « courir », même sans savoir où. Courir est devenu notre mode de vie. « Pourquoi, pourriez-vous interroger quelqu’un, pourquoi courez-vous ? » Ils vous lanceront un regard incrédule. « De quoi parlez-vous, protesteront-ils, nous vivons une vie ordinaire », et cette réponse répond à toutes les questions. L’absurdité est devenue la norme et, le plus tragique de tout, c’est que nous n’en sommes pas conscients.
L’autre jour, j’ai demandé à notre technicien en informatique s’il avait vu le dernier iPhone pour lequel les gens avaient fait la queue toute la nuit.
- Oui, m’a-t-il répondu.
- Alors, qu’a-t-il de si particulier ?, poursuivis-je.
- Eh bien, il est plus rapide que la version précédente, me répondit-il.
Je tentai d’intégrer tout ça. « Plus rapide que la version précédente ! ». Où les gens courent-ils ? Pour un peu plus de vitesse, vous faites la queue toute la nuit, vous dépensez de l’argent que très souvent vous n’avez pas pour quelques minutes de plus de rapidité ! Quelqu’un qui nous observerait de l’extérieur penserait que c’est une pure folie, mais nous sommes devenus si dépendants que nous ne le savons pas, nous le ne reconnaissons pas.
Était-ce hier seulement que les gens annonçaient la venue d’une nouvelle ère, un monde dans lequel les gadgets de la modernité libéreraient l’homme qui aurait du temps pour poursuivre des buts plus importants et chargés de sens.
Il y avait tant de promesses : le micro-onde, le fax, et puis une promesse immense : l’ordinateur… L’ordinateur allait révolutionner le monde, nous libérer de l’esclavage, de nos bureaux et de nos affaires, il deviendrait plus efficace, mais surtout, le monde entier deviendrait un petit village. Les pays deviendraient des voisins vivant en paix. Oui, les espoirs étaient infinis. Ceci s’est-il produit ? Oh oui, appelez n’importe où et une voix informatisée vous répondra en vous expliquant d’appuyer sur tel ou tel bouton, mais une voix humaine qui pourrait vous aider et vous guider n’est jamais disponible. Oui, les nations sont devenues voisines, mais ce sont des voisins inclinés à se détruire mutuellement. Oui, l’ordinateur nous a libérés, il nous suffit d’appuyer sur un bouton, Google, et tout est là ! Mais dans le processus, nous avons oublié comment lire et faire des recherches sur un sujet spécifique.
D’après les lois de la logique, nous devrions avoir plus de temps pour nous-mêmes, mais nous sommes plus occupés que jamais. Pourquoi ? Qui nous vole notre temps ? Ce même ordinateur ! Nous sommes assis, scotchés à l’écran, et certains vont sur des sites répugnants. Nous initions des conversations ridicules, séductrices, ordurières, le « chat room » est devenu notre nouvel ami. Il n’y a pas si longtemps, les parents pouvaient être sûrs de savoir que leurs enfants étaient dans leurs chambres, en sécurité, mais maintenant, avec le clic d’une souris, ils peuvent se retrouver dans les lieux les plus corrompus et dépravés susceptibles de les marquer à vie. L’ordinateur est devenu le lieu le plus rapide et le meilleur canal de diffusion du Lachone Hara’, des scandales et du mal. Il suffit d’envoyer un blog et en, un instant, vous pouvez détruire des vies. Ce que Hitler a fait en quelques années, l’ordinateur le fait aujourd’hui instantanément, et toutes sortes de « fous » apprennent comment tuer et fabriquer des bombes, détruire des bâtiments, et tuer des gens au hasard. Leurs cibles peuvent être les écoles, les salles de cinéma, les centres commerciaux. Plus il y a de monde, mieux c’est pour eux… Ces tragédies sont devenues si fréquentes que nous y sommes désormais habitués et leur impact peut être ressenti partout. Je n’ai pas besoin d’évoquer les conséquences tragiques et destructrices qui ont émergé de ceci, notre société dominée par la technologie informatisée. Ces tentations qui séduisent jeunes comme vieux. Les répercussions se ressentent dans tous les domaines de la vie. Chaque segment de la société est touché.
Une génération entière a grandi sans apprendre à parler. Ils communiquent par e-mail, s.m.s. ou whatsapp. Les enfants n’appellent plus leurs parents ou grands-parents, ils envoient des messages ! Et ce ne sont pas les seuls : maris et femmes, amis, famille et associés d’affaires ont cessé de parler. La raison en est simple : personne ne veut écouter la voix de l’autre.
Il y a fort longtemps, dans une autre vie, je me rappelle de mon cher et révéré père, le Rav, Gaon et Tsadik Avraham Halévi Jungreis, conseillant aux gens en Yiddish : « Kein Mohl, nisht ofen telephone », « pour les conversations importantes, jamais au téléphone » ! Et il expliquait : « Il est important d’avoir un contact visuel et une expression chaleureuse sur le visage. Cela fait toute la différence, en particulier lorsque des critiques sont communiquées. »
De nos jours, entendre une voix humaine serait un merveilleux cadeau. Mais hélas, cela appartient au passé. Le silence verbal est devenu un mode de vie, même lorsque nous marchons, que nous sommes assis au restaurant, les Blackberries et iPhones ne nous quittent pas.
Ouvrons les yeux.