Question de Salomon J.
Chalom Rav,
Je fais beaucoup d’efforts pour consacrer une partie de ma matinée à l’étude de la Torah, mais ma femme me le reproche. Elle trouve que je ne gagne pas assez pour me permettre un tel luxe. “Je ne me suis pas mariée avec un rabbin !”, “Tu as tout le Chabbath pour étudier à ta guise !”, me dit-elle encore. Pourtant, lorsque l’on s’est connus, je lui avais parlé de mon désir de m’adonner à l’étude avant de commencer le travail, et elle en était enchantée. Je me retrouve aujourd’hui devant un dilemme difficile, car renoncer à ce Limoud me ferait de la peine, mais d’un autre côté, il me cause des problèmes de Chalom Bayit.
Réponse du Rav Daniel Scemama :
Chalom Salomon,
Je me permets, avant de te répondre, d’apporter une considération générale.
Avant même de chercher à convaincre une femme de l’importance pour son mari de fixer un temps régulier d’étude de la Torah, il est important auparavant que lui-même, le concerné, en soit persuadé. Parce que si l’homme n’a pas de véritable aspiration personnelle, mais s’y adonne “afin de faire comme les autres” (par exemple), que peut-on attendre de son épouse qui, de par sa vision pragmatique, pourrait éventuellement percevoir dans ce genre d’occupation une perte de temps et d’argent ! C’est pourquoi la première démarche dans ce genre de discussions concerne d’abord le mari, qui est obligé de s’interroger sur le bien-fondé de son investissement. Après, dans un deuxième temps, on peut chercher à trouver les moyens de convaincre son épouse de la pertinence de ses aspirations.
Un des arguments de ta femme concerne la Parnassa (subsistance). Si effectivement, le temps occupé au Beth Hamidrach ne te permet pas de subvenir aux besoins de ta famille, d'après la loi, c’est elle qui a raison. Cela fait partie des obligations de tout père de famille, mentionnées explicitement dans le contrat de mariage, la Kétouba. Par contre, si ta femme te reproche un manque à gagner, afin de pourvoir vivre avec un plus haut niveau de vie (que celui qu’elle connaît avec toi depuis le début de votre mariage), même si d’après la loi stricte tu n’as pas d’obligation de t’interrompre, il sera malgré tout nécessaire de dialoguer. Il est toujours recommandé qu’un tel choix ne soit pas imposé, mais soit le fruit d’un accord avec ton épouse sur les nécessaires adaptations du niveau de vie.
Si, dans sa nature, un homme a un réel besoin spirituel de s’affairer dans le Limoud Hatorah (l’antidote contre le Yétser Hara’), la femme, dans son essence profonde, n’a pas cette nécessité (car elle a été créée accomplie). C’est pourquoi elle n’est pas ordonnée par cette Mitsva. Bien que de nombreuses femmes aient tout de même fait l'expérience de cette étude, pour d’autres, elle leur est totalement étrangère. Si c’est ton cas, il faudra s’y prendre avec doigté, en essayant de lui montrer les aspects positifs de cette occupation.
Ainsi, une femme sera sensibilisée lorsqu’elle constate chez son mari, grâce au fait qu’il étudie, un changement de comportement ou un apport favorable :
- un raffinement dans son caractère, du sérieux dans sa conduite, une droiture dans les relations humaines, une moralité parfaite ;
- ou encore lorsqu’il se met à étudier avec les enfants, avec son épouse, prononce un joli Dvar Torah à table, parvient à une maîtrise dans le domaine de la Halakha ;
- si le mari a un rôle communautaire dans lequel il dispense des cours, donne des conseils, écrit des essais toraïques, s’occupe de Chalom Bayit, etc.
Toute fille d'Israël ne peut que ressentir une satisfaction de voir son conjoint évoluer vers de vraies valeurs, et ne manquera pas de l’encourager dans ce sens.
- De plus, si la femme perçoit chez son mari, parallèlement à son étude, qu’il est attentionné, trouve du temps pour l’écouter et s’occuper de ses besoins, il est peu probable qu’elle le freine dans ce en quoi il désire s’investir ;
- une femme sera aussi sensible au fait que le mari lui montre combien son Limoud est réellement leur Limoud, et que c’est grâce à elle qu’il parvient à se consacrer à cette noble occupation. Le fait de le dire, de le montrer, de partager, de marquer la fin d’un traité par un repas dans lequel elle est investie, rend l’épouse une associée de son étude,
- enfin, il est très important aussi de toujours montrer un visage souriant au retour du Beth Hamidrach, car sinon la femme peut se dire : “Si en plus il n’est pas content, à quoi bon !”
Béhatsla’ha !