Deux mille ans. Pour nous, les mortels, deux mille ans, c’est une éternité. Il s’agit d’une période qu’il nous est difficile de concevoir, pour nous qui vivons dans ce monde quelques années seulement, quelque soixante-dix ou quatre-vingt ans.
Une telle période est obligée de combler le vide, et comme l’ont dit nos Sages : « Il a été décrété sur le défunt qu’il sera oublié ». Près de deux mille ans se sont écoulés depuis la destruction du Second Temple, et plus de 2500 ans depuis la destruction du Premier Temple, et chaque année, nous prenons encore le deuil. Chaque année, dans la période entre le 17 Tamouz et le 9 Av, nous tentons de nous rappeler de la Jérusalem construite (avec le Temple) et d’en avoir la nostalgie. Nous avons la coutume de respecter quelques lois dont le but est de nous rappeler cette période dont nous devons avoir la nostalgie.
Mais sommes-nous vraiment en deuil de cette perte ? Est-ce que la longue période qui s’est écoulée n’a pas fait son effet et cette grande perte a été oubliée ?
Il est peut-être important de nous rappeler l’objet de notre deuil.
La Michna dans le traité Avot évoque dix miracles qui avaient lieu régulièrement dans le Beth Hamikdach. « Le vent ne l’emportait pas contre la colonne de fumée », est l’un de ces miracles. Est-ce que quelqu’un parmi nous a déjà vu de la fumée s’élever droit vers le ciel et le vent, peu importe sa puissance, ne parvient pas à dévier cette fumée qui se dirige vers le ciel ? La Michna poursuit en racontant un miracle supplémentaire au Beth Hamikdach. « Les pluies n’éteignaient pas les bois de l’autel. » Avez-vous déjà observé de fortes pluies s’abattre sur du feu qui ne s’éteint pas ? Ces miracles nous renseignent sur une autre réalité qui avait lieu dans le Beth Hamikdach, une situation à laquelle nous ne sommes pas reliés, que nous ne connaissons pas.
Il y a environ deux mille ans, ici dans les lieux où nous vivons et sur la même terre que nous foulons aujourd’hui en l’an 5783, nos ancêtres vivaient une autre réalité. C’était une réalité où des événements exceptionnels se déroulaient régulièrement, une réalité où la spiritualité et la proximité de D.ieu étaient disponibles et à portée de main.
Dans la réalité où ils vivaient, il était suffisant de se rendre à Jérusalem, et ceux qui respectaient les 613 Mitsvot devaient l’accomplir 3 fois par an à Pessa’h, Chavou’ot et Souccot, pour ressentir cette immense spiritualité. Le sentiment d’élévation qui régnait alors partout n’est pas perceptible pour nous. Le judaïsme enveloppait l’homme avec une exigence qui nous est totalement inconnue aujourd’hui.
Cette réalité n’est pas inaccessible, elle dépend de la force des actions de chacun d’entre nous, qui apportons encore une brique qui nous rapproche de cet état d’élévation.
Respecter autrui, éviter de proférer des propos négatifs sur autrui, tenter de mieux comprendre ce que le Saint béni soit-Il attend de nous dans le monde, sont tous des moyens qui nous aideront à revenir à ces jours merveilleux et permettront à chacun d’élargir son Temple personnel.
Est-ce que nous éprouvons assez de nostalgie pour cet état de fait ? Cette réalité où nous pouvons sentir la proximité avec le Saint béni soit-Il de première main ? Est-ce que nous tentons, par nos actes, de nous rapprocher de cette situation et de la revivre ?
Ce sont des questions qui sont censées nous accompagner en cette période, et avec l’aide de D.ieu, nous aurons également le privilège de vivre cette situation d’élévation.