Nous avons commencé à aborder le concept d’Ochek, qui consiste à priver autrui d’argent ou d’objets qui lui appartiennent légitimement. Il existe de nombreux cas dans lesquels on peut commettre la faute d’Ochek.
Refuser de payer un prêt constitue la transgression d’Ochek. On inclut le refus direct de rembourser le prêt ou de renier qu’on l’a contracté, en prétendant que le prêt n’a jamais existé. Un individu qui souhaite rembourser son emprunt, mais en est incapable, n’est pas coupable d’Ochek.
Qu’entend-on par « incapable » de rembourser un prêt ? Si on n’a pas assez d’argent pour assurer nos besoins élémentaires de nourriture pour 30 jours, nous vêtir et nous loger de manière décente pendant 12 mois, et qu’on ne possède aucun bien, on peut reporter le paiement. Si un individu se retrouve dans une situation où il sent qu’il sera peut-être « incapable » de rembourser le prêt (et en conséquence, il évite de transgresser Ochek en ne remboursant pas le prêt), il devra consulter un rabbin orthodoxe pour clarifier la règle dans ce cas spécifique.
Il est important de relever qu’une telle pauvreté n’invalide pas le prêt indéfiniment. On est simplement dispensé dans ce cas de la transgression d’Ochek. Il va de soi que dès que l’emprunteur retrouve des ressources financières suffisantes, il se retrouve dans l’obligation de rembourser l’emprunt.
Il est essentiel de connaître la gravité de refuser de rembourser un prêt. Les rabbins décrivent un homme qui commet cette faute comme un Racha, un « pervers. » L’illustre Rav, le ‘Hafets ‘Haïm[2] ajoutait que celui qui détient illicitement l’argent d’autrui ne réussira pas dans sa malhonnêteté. Il finira par perdre ses bénéfices illégaux.
Refuser de payer le loyer d’un logement ou d’objets que l’on a loué entre également dans cette catégorie d’Ochek. Il peut y avoir des cas où un individu considère qu’il est justifié de tromper quelqu’un d’autre sur le plan financier. Par exemple, si un locataire n’apprécie pas la conduite de son propriétaire, il peut se sentir justifier d’éviter de s’acquitter du dernier paiement après avoir quitté l’appartement. Il peut tenir le raisonnement suivant : le propriétaire lui a causé beaucoup de soucis et il mérite d’être libéré de l’obligation de payer le dernier paiement. Cette attitude est incorrecte, et agir de cette façon constitue du vol. C’est même le cas s’il tente d’éviter le propriétaire sans refuser directement de payer, dans l’espoir que le propriétaire finira par abandonner l’idée de le poursuivre.
Refuser de payer le salaire d’un employé constitue aussi une transgression d’Ochek. (De plus, il y a une Mitsva distincte de payer un employé à temps - ce thème sera abordé dans une future série). C’est même le cas si l’employeur a perdu de l’argent et estime avoir perdu plus d’argent que ses employés. (Le refus de payer un salaire en raison d’une banqueroute est une affaire plus complexe - il faudra consulter un rabbin orthodoxe pour connaître la règle dans un tel cas).
Le refus de restituer de l’argent ou des biens qui ont été déposés aux fins de bonne garde, entre aussi dans la catégorie d’Ochek. Un cas fréquent : lorsqu’on reçoit un dépôt avec un sous-entendu que si l’acheteur devait changer d’avis, son dépôt serait remboursé. Si le client change d’avis, le vendeur ne peut refuser de rembourser le dépôt. A nouveau, on pourrait tenir le raisonnement que dans certains cas, ce n’est pas bien grave d’agir ainsi - par exemple, si le dépôt est une petite somme d’argent. Or, nous avons vu qu’il est défendu de voler quoi que ce soit, même de faible valeur.
Un thème fréquent soulevé dans ces scénarios : un individu a souvent une forte inclination à se justifier pour conserver de l’argent ou un objet. Or, dans de nombreux cas, agir ainsi est interdit. Il est essentiel de reconnaître son inaptitude à être totalement objectif lorsque n’importe quelle somme d’argent est en jeu. De surcroît, il faut s’habituer à interroger un Rav dans des situations où règne une mesure d’incertitude sur la validité de l’action que l’on compte entreprendre.
[1] Une bonne partie des informations de cet article sont extraites de l’ouvrage : Halachos of Other People's Money de Rav Yisroel Pinchos Bodner.
[2] Son véritable nom était Rav Israël Méir Kagan. Il est connu universellement comme le ‘Hafets ‘Haïm, d’après son célèbre ouvrage sur les lois du Lachon Hara (propos interdits).