Pourquoi dois-je m’endeuiller pour le Beth Hamikdach ? Je ne suis pas vraiment importuné de l’absence du Beth Hamikdach ni attristé par ce Temple détruit il y a deux mille ans ?
Tu n’es pas différent d’un grand nombre de Juifs, surtout de ton âge, qui ne ressentent pas de sentiment de regret de l’absence du Beth Hamikdach. Il est en réalité difficile de se sentir triste pour des pierres qui ont existé dans le passé et ne sont plus.
Mais notre tristesse n’est pas focalisée sur des pierres, ni sur des ustensiles. Ce n’est pas la splendide structure anéantie qui nous perturbe, ni les ustensiles manquants qui nous attristent. Il est toujours possible de reconstruire des bâtiments et de façonner de nouveaux ustensiles.
Le Beth Hamikdach symbolise quelque chose, et nous prenons le deuil pour ce qui aurait dû être et n’est plus. Le Temple symbolise un idéal : la situation parfaite dans laquelle le peuple juif est lié au D.ieu d’Israël en Erets Israël, une relation authentique et parfaite, une relation qui influe sur l’identité de la vie dans sa totalité, sur chaque homme sur le plan personnel et sur le peuple juif en général.
Le Beth Hamikdach n’est pas simplement un joli bâtiment. Avant sa construction, le service divin était réalisé dans l’enceinte du Michkan, le sanctuaire, dans une tente recouverte de tentures en peau et en tissu. Le Beth Hamikdach est un lieu où repose la Chékhina, la Présence divine. Qu’est-ce que cela signifie ?
Lorsque la Présence divine repose, D.ieu est proche des enfants d’Israël et vit, si l’on peut dire, auprès d’eux. Il influe sur eux directement et au quotidien, contrairement aux situations où D.ieu est éloigné d’eux.
A titre d’illustration, prenons l’exemple d’un père qui marche main dans la main avec son père, et d’un père qui observe son fils par la fenêtre de temps en temps.
Lorsque le peuple juif se tourne vers D.ieu, lorsque le peuple juif se plie dans son cœur à la Direction divine, et prouve aussi son attachement par ses actes, D.ieu est proche.
Le service divin a lieu au Temple, où se trouvent des représentants du peuple, les Cohanim, qui servent D.ieu. Ils sont chargés du service dans le Temple et sont l’expression de la relation entre le peuple et D.ieu.
Bien entendu, le service au Beth Hamikdach n’est pas suffisant. Les prophètes mettent souvent en garde le peuple qui sert D.ieu au Temple, tout en étant très éloigné au niveau du cœur. Lorsque les tribunaux déforment la justice, lorsque les hommes ne se conduisent pas avec droiture et justice, le service du Temple n’a aucune valeur.
Mais lorsque le peuple est entier dans ses actes selon la Torah, qu’il est fidèle à son D.ieu, le D.ieu d’Israël, la Présence divine a un sens dans le Temple. La perfection et l’union authentique règnent.
Lorsque le peuple juif ne respecte pas ces critères requis pour cet état de perfection, lorsque des fissures se sont infiltrées dans la fidélité du peuple juif à D.ieu, lorsque la morale est perdue, et l’unité étiolée, ils n’ont plus eu droit à la Présence divine. Le Temple fut détruit.
Le sens du deuil n’est par conséquent pas lié à la destruction d’un bâtiment. Il est à chercher dans l’absence de perfection et l’absence d’unité. Le deuil consiste à reconnaître ce qui nous manque et à aspirer à une autre situation.