Un verset de la Torah dit : « Parle, de grâce (Na) au peuple : que chacun ait à demander à son voisin, et chacune à sa voisine, des vases d’argent et des vases d’or. » (Chémot 11, 2)

Expliquons-le à l'aide d'une parabole. Un jeune garçon travaillait chez un patron en échange d’un modeste salaire. À la fin du mois, le patron le paya avec des billets vieux et froissés. Le jeune garçon, qui ne s’y connaissait pas trop en argent, était persuadé que le patron l’avait dupé en le payant avec des billets qui ne valaient rien, et refusa donc de recevoir son salaire avec de tels billets. Le patron tenta de lui expliquer qu’il se trompait, que ces billets avaient exactement la même valeur que des billets neufs, mais en vain. Le jeune homme s’entêta et prétendit que son patron lui faisait du tort, car après un mois de travail et tant d’efforts de sa part, il le payait avec des billets de seconde zone.

Lorsque le patron comprit qu’il ne parviendrait pas à expliquer à l’enfant que les billets étaient valables, il tenta d’enrôler le père du jeune garçon. Il lui montra les billets et lui demanda : « Ces billets ne sont-ils pas bien ? Ton fils ne veut pas les accepter ! » « C’est exact, répondit le père, tu as raison, ces billets sont excellents. Si tu me devais de l’argent, je les aurais reçus avec plaisir, mais comme c’est mon fils qui a travaillé chez toi, de grâce, paie-le avec de l’argent qu’il peut apprécier. Son travail vaut le coup pour lui s’il comprend que ses efforts ont été récompensés, même s’il est dans l’erreur ! »

D’après cette parabole, Rabbi Chlomo Ganzfried, dans son ouvrage Apiriyon, explique les propos de Rachi sur le verset mentionné ci-dessus : « Le terme Na (de grâce) ne peut que signifier une requête. Je te demande instamment, préviens-les à ce sujet, afin qu’Avraham, ce juste, ne dise pas : on les asservira et on les opprimera. Il a accompli (cette part du décret) envers eux : "Après cela, ils sortiront avec une grande richesse" (cette deuxième partie), Il n’a pas accomplie envers eux. » Le Saint béni soit-Il désire tenir sa promesse à Avraham, à savoir que le peuple d’Israël quitte l’Égypte avec de grandes richesses. Ne serait-ce que pour qu’Avraham ne dise pas qu’Il n’accomplit pas Sa promesse ? Le fait même de la promesse ne garantit-elle pas son accomplissement ?

Voici son interprétation : la promesse du Saint béni soit-Il à Avraham Avinou : « Et ensuite ils sortiront avec de grandes richesses » ne visait pas de grandes richesses sous la forme d’argent et d’or, mais la Torah et les Mitsvot, telles sont les grandes richesses qu’ils s’apprêtaient à recevoir lors du don de la Torah au Mont Sinaï. Mais les Bné Israël, au vu de leur état d’esprit à cette époque, alors qu’ils étaient plongés dans un dur labeur en Égypte, ne pouvaient saisir que la Torah et les Mitsvot constituaient de grandes richesses, et ils l’entendirent au sens propre, à savoir de l’argent et de l’or. En conséquence, Avraham pourrait invoquer que de même qu’Il avait accompli ainsi sa promesse d’un travail éreintant, selon leur entendement, de même la promesse de grandes richesses avait été accomplie envers eux, en fonction de leur compréhension de l’époque : de l’argent et de l’or au sens propre.

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Les histoires suivantes illustrant la relation des grands Sages en Torah à l’argent uniquement comme instrument contribuant au service divin, et non comme un but en soi :

Rabbénou Aharon Yéhouda Leib Steinman occupait le poste de Roch Yéchiva à Kfar Saba. L’état des finances de la Yéchiva était catastrophique, et pendant près de six mois, il ne reçut pas de salaire. Une fois, le directeur de la Yéchiva rencontra la Rabbanite et lui demanda comment ils s’en sortaient dans une telle situation, sans salaire. Elle répondit qu’ils réduisaient leurs dépenses au minimum : le Chabbath, elle achetait une aubergine : elle cuisait la moitié et faisait griller la seconde moitié. L’aubergine cuite était utilisée à titre de « viande » et la moitié grillée à titre de « poisson ». En entendant ces propos, le directeur lui donna un peu d’argent qu’il avait sur lui, sur le compte du salaire qu’il devait au Roch Yéchiva. Lorsqu’elle rentra à la maison et rapporta l’anecdote au Roch Yéchiva, il ne fut pas satisfait qu’elle eût divulgué leur mode de vie et leurs restrictions. Au bout d’un certain temps, lorsque les finances de la Yéchiva s’améliorèrent, le directeur de la Yéchiva voulut payer au Roch Yéchiva tous les salaires qui ne lui avaient pas été versés, mais le Roch Yéchiva refusa de les accepter en déclarant : « Suis-je un ouvrier ? Cette période est derrière nous, et, grâce à D.ieu, nous avons réussi à vivre également sans cet argent. Je n’en ai plus besoin ! »

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« La Sandakaout (l’homme qui tient le bébé lors d’une Brit-Mila) favorise la richesse ». On demanda un jour au Steipler : « Si c’est le cas, pourquoi le Rav n’est-il pas riche ? Le Rav a souvent été invité à être Sandak ! »

Le Steipler montra du doigt l’étagère de livres, où étaient rangés les ouvrages du Kéhilot Ya-acov qu’il avait eu le privilège d’écrire et s’exclama : « Et ça, ce n’est pas la richesse ? »

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On raconte que Rabbi Hillel de Kolmaï avait l’usage de poser sur la table du Séder les manuscrits de ses ‘Hidouché Torah qu’il avait composés. Lorsqu’on l’interrogea sur le sens de cette coutume, il répondit : « Il est fixé dans le Choul’han Aroukh que l’on doit dresser la table avec de la belle vaisselle selon ses moyens, et voici la "belle vaisselle" dont je dispose selon mes moyens. »

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L’élève du Rav Yé’hezkel Avramsky, lui montra un jour la montre en or qu’il avait reçue de sa fiancée. « Quel est le prix de la montre ? », demanda le Rav. « Cinq cents dollars », répondit l’élève. Rabbi Yé’hezkel regarda longuement la montre, et s’exclama sur un ton ému : « Tu pourras désormais comprendre l’intention du verset : "L’enseignement de Ta bouche est plus précieux pour moi que des monceaux de pièces d’or et d’argent". Un mot de Torah vaut bien plus que mille montres comme celle-là… »