Il est écrit dans les Maximes des Pères que les disciples d’Avraham, notre père, possèdent un œil désintéressé, un esprit humble et une âme modeste. En revanche, les disciples de Bil'am, l’impie, possèdent un œil envieux, un esprit hautain et une âme avide. Il faut comprendre la particularité de ces traits de caractère. Pourquoi distinguent-ils les élèves d’Abraham notre père de ceux de Bil'am l’impie ?
Il faut également comprendre le sens du verset (Deutéronome 23, 6) : « Mais l’Éternel, ton D.ieu, n’a pas voulu écouter Bil'am, et l’Éternel, ton D.ieu, a transformé pour toi l’imprécation en bénédiction etc. » Le Talmud ('Avoda Zara 4b) enseigne que Bil'am connaissait l’instant où l’attribut de rigueur domine dans le monde. Il choisit ce moment pour son imprécation. Les Tossaphistes expliquent comment D.ieu l’inversa en bénédiction. D.ieu transforma les mots de Bil'am ; sans cela il serait parvenu à ses fins, à D.ieu ne plaise. On est en droit de se demander comment un individu aussi vil et aussi bas que Bil'am pouvait connaître l’esprit Divin, le moment de rigueur. Cela ne nécessite-t-il pas un certain niveau spirituel ?
Rabbi Haïm Yossef David Azoulay affirme dans son commentaire des Maximes des Pères que les caractères des élèves de Bil'am sont en corrélation avec les trois traits de caractère mentionnés par rabbi Eli'ézer Hakappar : la jalousie, la concupiscence et la recherche des honneurs qui excluent l’homme de la société. Qu’est-ce que cela signifie ?
D.ieu nous donne à tous des forces pour accomplir notre mission dans ce monde. Ces forces nous sont propres, car notre mission est unique. Les uns sont généreux, les autres sont humbles, chacun selon ces forces. Cela dit, nous disposons du libre arbitre et ce que l’on peut faire dans le bien, on peut également le faire dans le mal. Nous sommes dans ce monde pour donner comme il est écrit (Psaumes 89, 3) : « le monde a été créé par la bonté ». Nous pouvons donc choisir de prendre ou de donner. Les disciples d’Avraham, notre père, font le choix de donner. Ils utilisent leurs forces pour apporter le bien dans ce monde. Avraham nous enseigne que l’on peut être soi-même tout en se consacrant aux autres. Plus encore, c’est en donnant que l’on se réalise véritablement. Avraham est devenu le père des nations, car il a prodigué la bonté tout au long de sa vie. C’était un pilier d’altruisme. La Torah nous raconte comment au troisième jour de sa circoncision, il reçut les anges avec enthousiasme et les servit avec abnégation. Les disciples d’Avraham poursuivent ce sacerdoce en propageant le bien autour d’eux. Les disciples de Bil'am, quant à eux, décident de prendre. Ils veulent s’accaparer le monde entier. Ce sont des preneurs. Les défauts qui les distinguent sont tous en rapport avec le fait de prendre. Lorsque l’homme se concentre sur le fait de prendre, il s’exclut d’un monde créé par la bonté. Il ne peut pas se réaliser. Bil'am était rongé par l’envie et ne voyait que le mal, car il ignorait la beauté de la générosité.
Nos Sages nous disent que nous devons nous demander : « quand est-ce que nos actes égaleront ceux de patriarches Avraham, Its'hak et Ya'acov ? » Ce n’est pas un conseil, mais une obligation. Cela signifie que c’est possible ! Comment ? Le Rav Haïm de Volozhin enseigne dans son commentaire des Maximes des Pères que les épreuves d’Avraham ont imprégné des générations. Avraham a légué ses victoires à ses descendants. Lorsqu’il s’est laissé jeter dans la fournaise ardente, il a implanté en nous la foi absolue. Lorsqu’il a tout quitté pour la terre d’Israël, il a ancré en nous le courage et la témérité. Nos actes peuvent égaler ceux des patriarches, car ces derniers sont inscrits dans nos gènes. Nous sommes bien plus que des disciples d’Avraham, nous sommes ses enfants. Il nous appartient donc de suivre sa voie en utilisant nos forces pour devenir nous aussi des piliers d’altruisme.