Voici un exemple concret d'un cas traité par des tribunaux rabbiniques, afin d'apprendre à voir et assimiler peu à peu le "Daat Torah", le fait d'avoir un esprit et une réfléxion de plus en plus en accord avec la Torah.
Question :
Yaakov, qui voyageait en Israël sans bagages, a accepté de prendre une petite valise pour alléger son ami, Naftali qui lui, partait avec toute sa famille. En sortant de l’avion, Yaakov a oublié la valise dans le compartiment et ses réclamations à la compagnie n’ont servi à rien : le bagage reste porté disparu.
Naftali aurait volontiers oublié l’incident mais il lui avait confié des objets dont il estime la valeur à plus de mille euros. Les deux amis consultent un rav. Il leur fait savoir que Yaakov n’est pas forcément obligé de rembourser cette somme.
Naftali ne comprend pas pourquoi. Il est en effet, versé dans le Talmud, et ne dit-on pas à propos des chomrim, des dépositaires, même non rémunérés, qu’ils ne peuvent se décharger en arguant, ‘’j’ai oublié où je l’ai mis’’ (Baba Métsia 35 et 42) ?
Psak et explications :
La réponse du rav est juste mais il faut rajouter certaines conditions et répondre à l’interrogation de Naftali. Le Talmud est en effet explicite à ce sujet et le Choukhan ‘Aroukh 291 rapporte cette règle, à savoir qu’un oubli est une péchi’a, une faute grave, impliquant une obligation de rembourser (sans attendre) la valeur de l’objet confié.
Or, certains décisionnaires considèrent qu’il ne faut pas s’en inspirer pour le cas d’un oubli par étourdissement. Ils font en effet, la différence entre un dépositaire qui cache ce qu’on lui a confié et oublie l’emplacement, et notre cas, à savoir un moment de distraction, qu’ils considèrent comme une chose presque incontrôlable dans la vie d’un homme (Chvout Yaakov 2 ; 148). C’est donc selon eux un oness, un cas de force majeure pour lequel un dépositaire n’est pas redevable. Par contre Yam Chel Chlomo (Betsa 2; 6) compare totalement les deux cas et à son avis Yaakov devra tout rembourser à Naftali comme s’il avait oublié l’endroit où il l’avait entreposé.
Il est clair que dans un cas de controverse entre les décisionnaires, on ne pourra exiger de Yaakov un remboursement.
La situation va se compliquer si Naftali ne croit pas entièrement Yaakov et qu’il le soupçonne éventuellement d’avoir été négligent (poché’a). Dans ce cas, le Beth Dine, aura une autre conclusion, à savoir, Yaakov devra payer deux tiers (comme compromis pour ne pas avoir à jurer).
Rav Yossef Simony
Cette rubrique propose de vous faire partager des cas traités, couramment ou non, dans les baté-din. L’unique but est de faire prendre conscience de la possibilité que donne la Torah de régler n’importe quel conflit financier selon des logiques très réglementées. Nous vous recommandons donc de ne pas tirer de conclusions personnelles de ces enseignements, car un détail et une parole peuvent changer toute l’issue du psak-din.