Le calendrier hébraïque est le seul calendrier à être solaire (lié aux saisons, car dépendant de la révolution de la terre autour du soleil) et lunaire (car les mois, dans le judaïsme, sont liés au cycle de la lune). L’année civile est solaire, et le mois juif est lunaire. Comme la fête de Pessa’h, selon la Torah, doit être obligatoirement au printemps, il faut donc accorder le système lunaire au système solaire. Du fait d’un retard de 11 jours entre les 12 mois lunaires (354 jours) et les douze mois de l’année solaire (365 jours), il faut – pour combler le retard – ajouter 7 mois intercalaires, dans un espace de 19 ans. De ce fait, le calendrier hébraïque est équilibré et inclut les deux systèmes, le solaire et le lunaire, contrairement aux deux autres calendriers : le civil, qui ne connaît pas les mois lunaires, et le calendrier musulman qui ne connaît que les mois lunaires, et ne prend pas en considération les saisons, et donc les fêtes ne sont pas liées à une date solaire fixe.
Ce phénomène invite à la réflexion. Pourquoi est-il nécessaire que Pessa’h soit célébré au printemps, fait qui conditionne des dates solaires pour les autres fêtes ? Chacune des célébrations est, ainsi, liée à un évènement lié à la terre : Pessa’h aux semailles, Chavou'ot à la moisson, et Souccot à la récolte. Cette dimension, reliée au sol, nous enseigne un élément essentiel dans notre « 'Avodat Hachem », dans notre lien avec l’Éternel. La fête de la Sortie d’Égypte est une étape dans l’Histoire de la Création, et c’est pourquoi elle doit être liée au cycle solaire. Annoncée déjà à Avraham, la servitude en Égypte, qui prélude à la libération, est l’acte de naissance du peuple qui doit précéder la Révélation du Sinaï. Naissance dans la douleur – parallèle à la naissance de l’enfant – en parallèle avec la semence qui disparaît dans la terre, avant de réapparaître en toute beauté. La moisson, c’est la Révélation, le but – des semailles, le but de l’Histoire, pour parvenir ensuite à la récolte, à la Rédemption, à la récompense de l’utilisation féconde de la matière. L’Histoire humaine se reflète dans le devenir matériel.
L’histoire d’Israël s’insère dans le cycle historique. Pessa’h est la première étape, et la « Matsa » en est le symbole, dans la mesure où elle est l’ESSENCE même de la matière – essence première, mais nécessaire pour nous rappeler l’intervention divine dans l’Histoire, intervention de Celui Qui a créé le monde matériel. Le Tout-Puissant est l’Auteur du monde matériel, et nous comprenons ainsi pourquoi Pessa’h doit être au printemps, c’est-à-dire au début de la germination de la matière. L’élément matériel s’inscrit dans le temps, lui-même objet de la création. L’observance de la fête est un moment de la relation avec le Créateur, et l'événement historique dont il est le support est une concrétisation de ce lien. C’est cela que veut exprimer le Midrach qui dit que les 3 patriarches ont observé la fête de Pessa’h, AVANT l’évènement. Tandis que le mot « 'Hamets » (« fermentation ») exprime la matière qui s’inscrit dans la durée, le mot « Matsa » traduit la brièveté dans le temps, l’instantané (ce qui se traduit par le temps court nécessaire pour la fabrication de la Matsa). Pessa’h, début de l’histoire d’Israël, vient donc célébrer le début, instantané, et est donc lié au cycle de l’année solaire. Mais ce début appelle une suite, un SENS, une vocation : l’Histoire, elle, doit avancer. C’est le devenir, la durée de l’Histoire. Pessa’h est l’idée première qui doit conduire à un BUT. La Sortie d’Égypte annonce, promet, alors se manifeste la Révélation, qui doit exprimer la volonté du Créateur. La révolution de la Terre autour du soleil est voulue par le Tout-Puissant, le cycle des saisons rencontre donc les solennités juives, qui trouvent leur écho dans les événements de l’Histoire. C’est ainsi qu’il importe de comprendre l’ordre du calendrier hébraïque : début de l’histoire juive, également première Mitsva adressée au peuple (sanctification du cycle lunaire, ordonnée à Moché encore en Égypte), intégration dans l’ordre de l’année solaire, nécessité de manger ce qui symbolise la brièveté de l’instant, tous ces éléments traduisent l’importance de concrétiser dans le créé, l’élément matériel, dans le domaine de l’existence, la force de l’idée première, à la source de la Création. Ainsi, Pessa’h se poursuit au Sinaï et ne cesse de s’exprimer à Souccot, fête liée à la protection permanente de la Providence, qui doit annoncer la Rédemption finale. Le fidèle juif doit savoir qu’il est impliqué dans un devenir qui le transcende et qui assure sa proximité avec le Tout-Puissant. Il n’y a pas une fin de l’Histoire, mais un but à l’Histoire, annoncé par les prophètes. Le terme « Takhlit », le but, résume le mieux ce devenir, car il inclut à la fois l’idée originelle et sa réalisation pratique. Sachons être conscients de notre rôle cosmique, et reconnaissons le bonheur d’être les acteurs d'événements qui engagent la présence du Créateur dans Sa création !