Les Parachiot de Tazria et Métsora développent longuement la plaie de la Tsaraat, qui affecte l’individu par l’apparition de taches blanches sur sa peau. Il doit alors traverser une période d’isolation et suivre ensuite un processus de purification. ’Hazal affirment que cette épreuve survient à cause des fautes de la personne, plus particulièrement à cause du Lachone Hara (propos négatifs)[1]. La procédure que doit entreprendre le lépreux lui montre l’aspect destructeur de son acte et lui enseigne comment s’améliorer à l’avenir pour éviter de récidiver.
Celui qui a émis des propos médisants peut tirer deux leçons principales durant la période de lèpre qu’il traverse. Tout d’abord, « il a entrainé la séparation entre un homme et son prochain (par son Lachone Hara), donc la Torah lui enjoint de rester seul »[2]. Le fait de parler négativement sur l’autre brise inévitablement des amitiés, sépare les gens. Mesure pour mesure, l’auteur de ces mauvaises paroles est contraint de vivre seul pendant un certain temps, à l’écart. La peine qu’il vit reflète celle qu’il cause en brisant des relations. Deuxièmement, les tâches servent à lui montrer le tort que le colporteur fait à son âme. La lèpre n’est pas une maladie courante ; c’est la manifestation physique d’un malaise spirituel, preuve irréfutable que le fauteur s’est souillé spirituellement et doit donc faire des progrès.
De nos jours, il n’y a plus de Tsaraat, ce qui peut, superficiellement, sembler positif. Néanmoins, les commentateurs soulignent l’inverse exact ; la lèpre était un bienfait d’Hachem puisqu’Il communiquait très clairement au fauteur sa transgression et le besoin de se repentir. Sans ce cadeau, il est immensément plus difficile de savoir que l’on a mal agi. Le Lachone Hara est l’une des fautes les plus dures à éviter. En effet la Guémara affirme que tout le monde trébuche dans le Avak Lachone Hara[3]. Puisque cette transgression est si répandue, comment remplacer la Tsaraat ? Comment savoir quel tort on se cause en parlant de la sorte et à quel point les paroles négatives touchent notre entourage ?
Rav Lapidot, dans son livre Divré Émet, répond à cette question[4]. Il souligne que le lépreux devait aller chez un Cohen qui le guidait à travers son processus de Téchouva. Nous avons un Cohen qui continue de nous aiguiller quant à la façon de rectifier la faute du Lachone Hara – il s’agit du ’Hafets ’Haïm dont les ouvrages à ce sujet[5] sont les plus hautes autorités statuant sur la manière de préserver sa langue du mal. Le ’Hafets ’Haïm lui-même écrit au nom du Maharcha que la Guémara précitée (« tout le monde trébuche dans le Avak Lachone Hara ») fait référence à toute personne qui ne fournit pas d’effort pour canaliser sa parole[6]. En revanche, celui qui apprend les lois et la Hachkafa (conception, idéologie) de Chémirat Halachone peut éviter cette faute pernicieuse. Même si personne n’est affecté par la Tsaraat, il est évident que si l’on ne travaille pas dans ce domaine, on dira inévitablement du Lachone Hara – ou au moins du Avak Lachone Hara.
Le Divré Émet nous apprend donc qu’il incombe à chacun d’entre nous d’étudier les lois régies par le ’Hafets ’Haïm sur la médisance.
Plusieurs Guédolim[7] signèrent un document recommandant à chacun de fixer un temps d’étude pour les livres « ’Hafets ’Haïm » et « Chémirat Halachon ». De plus, ils chargèrent chaque directeur d’institution d’inclure des cours sur ce thème dans l’emploi du temps habituel[8].
Dans le même ordre d’idées, le Roch Yéchiva de Manchester, Rav Yéhouda Zéev Ségal mit en place un agenda pour l’étude de ces deux ouvrages et, peu avant son décès, il lança le projet du livre Un jour une Halakha qui propose l’étude quotidienne et courte de Halakha et de Hachkafa.
Ces Rabbanim réalisèrent que l’apprentissage constant à ce sujet était la seule façon d’éviter la transgression de l’interdit de Lachone Hara.
Pour conclure, celui qui disait du Lachone Hara était, auparavant, frappé par la lèpre et aidé par le Cohen sur le processus à suivre pour faire Téchouva. De nos jours, nous ne bénéficions plus d’un message si clair. Nous devons donc nous tourner vers les mots du Cohen – le ’Hafets ’Haïm – pour savoir comment améliorer notre langage grâce à l’étude régulière de ses livres édifiants.
Puissions-nous tous être capables d’éviter toutes formes de propos négatifs.
[1] Arakhin, 15b – 16a.
[2] Arakhin, 16b.
[3] Baba Batra, 165a. Avak signifie poussière. On traduit Avak Lachone Hara par « poussière de Lachone Hara », parce qu’il ne s’agit pas des propos interdits par la Torah, mais d’une forme de discours interdite par nos Sages, du fait de sa ressemblance au Lachone Hara ou de la probabilité à en venir à des paroles interdites par la Torah. Voir ’Hafets ’Haïm, Hilkhot Lachone Hara, Klal 9, pour une analyse approfondie sur le Avak Lachone Hara.
[4] Rapporté dans le Léka’h Tov, Parachat Tazria, p. 107.
[5] Le Séfer ’Hafets ’Haïm évoque les lois relatives au Lachone Hara et Chémirat Halachone expose la conception de la Torah à ce sujet.
[6] Chémirat Halachone, Ch. 15
[7] Parmi eux, Rav ’Haïm Chmoulevitz, le Steipler, le Beth Israël, Rav Wozner, etc.
[8] Y compris le Rav d’une communauté, le directeur d’une Yéchiva Kétana ou d’un séminaire.