La Haftara de cette semaine poursuit l’esprit de consolation entamé depuis le chabat qui suit Ticha Be’Av. Nous sommes actuellement à la troisième des haftarot de consolation, toujours issues de Isaïe.
Notre texte est la suite de la Haftara « Roni Akara » que nous lisons lors des chabat Noah’ ou Ki-Tetse.
Dans le texte de cette semaine, le prophète Isaïe décrit la construction majestueuse du futur Beth Hamikdach (Temple) avec des pierres précieuses, et l’épanouissement spirituel des enfants d’Israël. Il nous rappelle également l’importance de la tsedaka, et la maîtrise par Hachem des conflits entre les nations aussi bien que de la paix.
Le prophète Isaïe lance un vibrant appel au peuple pour qu’il se rapproche encore davantage de l’étude de la Torah, comparé successivement à l’eau, au vin et au laitl. La piété d’Israël permettra ainsi l’avènement messianique, et la reconnaissance d’Hachem et d’Israël par les autres nations.
Liens entre la Haftara et la paracha
Comme nous l’avons vu jusqu’à présent, ces haftarot de consolation possède bien souvent des points communs avec les sections de la Torah que nous lisons en parallèle. Notre haftara ne fait pas exception à cette règle.
Tout d’abord, le prophète Isaïe nous rappelle que l’étude de la Torah est indispensable à la vie heureuse de Bné Israël. De même, la paracha débute sur la nécessité de choisir la voie de la bénédiction à travers l’accomplissement des mitsvot.
Ensuite, la paracha insiste sur la bénédiction matérielle que recevront les Juifs s’ils observent la Torah (Dévarim 15-4), et, dans le même sens, le prophète Isaïe insiste sur l’opulence dans laquelle vivra le peuple juif à l’époque du Machiah’, incarnée notamment par les pierres précieuses de toutes sortes qui composeront le troisième Beth Hamikdach (Isaie 54-12).
Enfin, rappelons l’importance de la Tsedaka, condition de notre délivrance, rappelée dans nos deux textes. (Dévarim 15-8, Isaïe 54-14).
L’écho de la haftara
La promesse de consolation contenue dans notre haftara est éternelle, et elle vient nous rappeler le futur merveilleux qui attend les enfants d’Israël, bien au-delà de ce que l’imagination peut appréhender.
Cette promesse débute dès les premiers versets de notre texte, dans lesquels Isaïe évoque les différentes pierres précieuses qui viendront (rapidement b’H) constituer le troisième Beth Hamikdach. Ces pierres prennent différents noms dans notre texte « Kadkod » (pierres de Kadkod), « avnei ekdah » (pierres de Ekdah), « avnei ‘hafets » (pierres précieuses).
Nos Sages nous enseignent dans le Midrach que cette description laissa circonspect certains lecteurs qui se demandèrent comment il serait possible qu’une telle opulence soit présente dans le futur Beth hamikdach. Et nos maîtres de nous rappeler que rien n’est impossible à l’Eternel qui a construit le monde, certains de ces « perplexes » ont ainsi pu apercevoir en vision la beauté de ces pierres façonnées par les anges et qui sont gardées en réserve pour les Temps futurs. (Baba Batra 75a).
Mais au-delà de la construction matérielle du Beth Hamikdach, ces pierres précieuses qui seront à la base du Temple, sont le symbole matériel des mitvot et des bonnes actions des hommes. Ces dernières sont, en effet, la matière première grâce auxquelles le Temple sera construit. Les bonnes actions accomplies par les Bné Israël sont tels des diamants aux yeux d’Hachem, les anges eux-mêmes les protègent et les gardent en réserve, et elles agissent dans les mondes supérieurs afin d’hâter la délivrance. (Kli Paz cité dans Le Midrach raconte la Haftara)
De même, Rabbi Moche Cordovero voit dans les larmes versées par les Juifs, à travers l’histoire de l’exil, autant de pierres précieuses que l’Éternel garde devant Lui et qui serviront à bâtir le Troisième Temple.
Le verset de la Haftara qui suit cette description d’opulence est bien connu car il est intégré dans notre liturgie « Tous tes enfants seront instruits par la Torah de Hachem, et la paix sera grande parmi tes fils ». Lorsque nous récitons cette phrase, nous lui associons bien souvent cette interprétation des Sages du Talmud qui précise « Al tikré banayikh ela bonayikh ». Jouant sur la similarité des mots et des sonorités, ils suggèrent de ne pas lire « tes enfants » mais « tes bâtisseurs ».
Et de fait, cette interprétation pend tout son sens à la lumière de ce que nous venons de dire. Tous ceux qui étudient la Torah, pratiquent les mitsvot et s’efforcent d’accomplir les bonnes actions contribuent à façonner les pierres précieuses qui permettront de bâtir, rapidement avec l’aide d’Hachem, le futur Temple.
Rappelons également que dans le langage de nos Sages, l’épouse est bien souvent qualifiée de « bayit » ou « akeret bayit », et le couple est évoqué par la métaphore d’une « construction » mutuelle (« binyan ‘adei ‘ad »). A la lumière de ce que nous venons de voir, nous comprenons que le secret de l’entente conjugale qui est si précieuse aux yeux d’Hachem est le fruit d’une construction spirituelle. Cette dernière suppose non seulement une grande confiance en D.ieu dans le quotidien, mais aussi un exercice assidu des bonnes actions, de la générosité, et de l’ouverture à autrui.
Toutes ces qualités d’âme et de cœur s’exercent au premier niveau dans le couple, avant d’irradier l’ensemble du peuple, elles participent pleinement de la réussite spirituelle du peuple Juif et de sa capacité à construire le troisième Temple.
Enfin, le Hafets Hayim complète pour sa part cette analyse et nous indique comment chaque Juif est un bâtisseur de son avenir spirituel au quotidien. Il nous invite à considérer que lorsque l’âme de chaque juif retourne dans les cieux, elle trouvera refuge dans une demeure façonnée par toutes les bonnes actions et les mitsvots que les hommes accomplissent sur terre. La qualité de cette maison apportera ainsi un apaisement et un bonheur intense à à ceux qui y résident.
Aussi, la responsabilité collective de participer à l’édification du Beth Hamikdach à travers l’étude de la Torah, les mitsvot et nos bonnes actions, se doublent d’une responsabilité individuelle quant à la manière dont nous bâtissons nos couples et dont nous éduquons nos enfants, « nos bâtisseurs ». Finalement, notre capacité à bâtir le troisième Beth Hamikdach est le reflet de notre construction intérieure. Celle-ci repose sur notre capacité à coïncider avec l’essence de nôtre âme en prenant notre part dans l’aventure spirituelle de notre peuple. Mais avant de voir loin et grand, il faut passer l’épreuve de notre environnement immédiat, et notamment bâtir des couples heureux et solides, conformément à ce verset de la Torah « Qu’elles sont belles tes demeures Yaakov, tes petits sanctuaires Israël ».