Dans la paracha Ki-Tissa (30, 12), il est écrit : "וַיֹּאמֶר ה' אֶל מֹשֶׁה קַח לְךָ סַמִּים נָטָף וּשְׁחֵלֶת וְחֶלְבְּנָה סַמִּים וּלְבֹנָה זַכָּה בַּד בְּבַד יִהְיֶה" (L’Éternel dit à Moché : « Choisis des ingrédients : du storax, de l’ongle aromatique, du galbanum, divers ingrédients et de l’encens pur ; le tout à poids égal»)
Ce passage traite du pitoum hakétoret (le rituel de l’encens) que nous récitons chaque jour durant les prières de Cha’harit et min’ha. La kétoret possédait une valeur inestimable et parmi tous les sacrifices que l’on apportait au Temple, c’est elle qui était la plus chère devant le Saint béni soit-Il. La preuve de cela est que le mizbéa’h ha’ola, l’autel sur lequel s’effectuaient les sacrifices des animaux, se trouvait à l’extérieur de la Tente d’Assignation, tandis que le mizbéa’h hakétoret, l’autel des encens, était placé à l’intérieur de la Tente d’Assignation, en face de l’Arche Sainte, une position révélatrice de son importance.
La raison de sa supériorité est qu’à la différence des autres sacrifices – tels le ’Hatat, le acham, le chelamin ou la min’ha – qui venaient expier une certaine faute, la kétoret, elle, avait pour seul but de procurer de la joie, comme il est dit dans le verset : « Huile et encens réjouissent le coeur » (Michlé 27, 9). D’ailleurs, dans le Temple, ces deux ingrédients vecteurs de joie étaient liés l’un à l’autre puisqu’au moment précis où le Cohen allumait la ménora avec de l’huile, l’encens était brûlée comme il est dit : « Et lorsque Aharon allumera les lampes vers le soir, il brûlera l’encens quotidienne » (Chémot 30, 8).
C’est pourquoi l’homme devra s’efforcer de réciter le passage de la kétoret chaque jour, matin et soir. D’ailleurs, il est écrit dans le Zohar :
« Rabbi Chimon bar Yo’haï disait : "Si les gens savaient combien l’offrande des encens est grande devant le Saint béni soit-Il, ils prendraient chaque mot du texte et le mettraient au dessus de leur tête comme une couronne d’or." » Celui qui lit attentivement le passage de la kétoret chaque jour à Cha’harit et min’ha, mot par mot afin de n’en sauter aucun, en comprenant ce qui sort de sa bouche, se verra épargné de toutes sortes de maux, de mauvaises pensées ainsi que d’une mort atroce. Et durant tout ce jour, il sera assuré de ne subir aucun dommage, il échappera au châtiment du géhinam et aura une part dans le monde futur (Méam Loez).
Le récit suivant, extrait du Zohar hakadoch (Parachat Vayéra) illustre à son tour la grandeur de la lecture du rituel de l’encens :
Un sage du nom de Rabbi A’ha se rendit un jour dans le village de Tarcha et fut reçu par l’un des habitants. Or une épidémie dévastait la ville depuis sept jours d’affilée. En apprenant la venue de cet illustre homme, les villageois se dirent : « Allons chez ce sage pour lui demander s’il n’a pas un moyen d’enrayer ce malheur. » Ils se rendirent donc chez Rabbi A’ha et lui dirent : « Notre maître, cela fait sept jours qu’une épidémie ravage la ville ; elle se propage et ne s’arrête pas. » Rabbi A’ha répondit : « Allons à la synagogue et prions le Saint béni soit-Il de mettre un terme à cette plaie. »
Alors qu’ils se dirigeaient vers la synagogue, des gens vinrent leur annoncer : « Untel et untel sont morts, untel et untel sont à l’agonie ! » Rabbi A’ha leur dit : « Le temps presse, ce n’est plus le moment de rester là. Sélectionnez quarante personnes parmi les plus vertueuses et vous vous diviserez en quatre groupes de dix hommes. Je serai avec vous. Dix se placeront à l’une des directions de la ville, dix autres dans une autre direction et ainsi de suite, aux quatre points cardinaux de la ville.
Ensuite, vous réciterez de tout votre coeur le rituel de l’encens et le passage des sacrifices et avec l’aide de D.ieu, l’épidémie s’arrêtera.
Ils procédèrent ainsi trois fois de suite. Ils passèrent aux quatre points cardinaux de la ville et récitèrent les passages indiqués et ensuite, Rabbi A’ha leur dit : « Sélectionnez quelques hommes qui iront dans les demeures de ceux qui étaient à l’agonie et qui y répèterons ce que nous avons dit. Lorsqu’ils auront terminé, ils ajouteront les versets : "Et Moïse dit à Aharon : ‘Saisis l’encensoir, mets-y du feu de l’autel, pose le parfum, et porte-le sur le champ au milieu de la communauté pour effacer leur faute; car le Seigneur a laissé éclater sa colère, déjà le fléau commence ! Aharon prit l’encensoir, comme l’avait dit Moïse, et s’élança au milieu de l’assemblée, où déjà le fléau avait commencé à sévir; et il posa le parfum, et il fit expiation sur le peuple. Il s’interposa ainsi entre les morts et les vivants, et la mortalité s’arrêta’’’ » (Bamidbar 17, 11-13). Ils agirent de la sorte et l’épidémie fut enrayée de la ville et même ceux qui étaient entre la vie et la mort furent guéris. Alors, ils entendirent une voix céleste qui disait aux forces maléfiques : « Arrêtez-vous en haut et ne venez pas sévir en bas car le jugement du ciel ne réside pas dans cette ville parce que ses habitants méritent l’annulation du mauvais décret. »
Après cela, Rabbi A’ha défaillit et s’endormit et il entendit qu’on lui disait : « Tout comme tu as enrayé l’épidémie de cette ville, tu dois leur dire de se repentir, car c’est à cause de leur mauvaises actions que celle-ci s’est déclarée. » Rabbi A’ha se leva et les fit se repentir totalement. Ils prirent sur eux de ne jamais délaisser la Torah. Ils changèrent aussi le nom de la ville qui s’appela dès lors Mata-Me’hassia, la ville de la miséricorde, car D.ieu avait eu pitié de cette ville et annulé le mauvais décret qui pesait sur elle.
La raison pour laquelle ils changèrent le nom de la ville est qu’ils se souviennent à chaque instant du mauvais décret qui s’était abattu sur eux à cause de leurs mauvaises actions et qu’ils ne retombent pas dans leurs fautes passées (Méam Loez).