Dans notre paracha Ki-Tissa, il est écrit : « Ceci sera donné par quiconque passera le compte ; un demi-shekel, selon le poids du sanctuaire, soit vingt guéra ; un demi-shekel comme don à Hachem. » (Chemot, 30:13)
Rachi explique sur les mots « Ceci sera donné » : Il [Hachem] lui montra [à Moché] la forme d’une pièce en feu qui pesait un demi-shekel, et Il lui dit : « Ils donneront comme ceci. »
Hachem demanda à Moché d’enjoindre au peuple d’accomplir la mitsva de Ma’hatsit Hashekel – donner un demi-shekel pour le Michkan. Cette mitsva devait servir d’expiation pour les fautes des Bné Israël.
Rachi rapporte un Midrach nous informant qu’Hachem montra à Moché l’apparence de la pièce. Le Midrach raconte que Moché avait du mal à se représenter un demi-shekel, donc Hachem lui fit une représentation en feu. Il se passa la même chose pour la Menora – Moché n’arrivait pas à se l’imaginer alors Hachem lui en montra le modèle.
Les commentateurs s’interrogent sur la difficulté à concevoir mentalement la forme d’une pièce. On peut comprendre que pour la Menora, Moché Rabbénou eut besoin d’une référence, mais qu’y a-t-il de compliqué à visualiser l’aspect d’une pièce ?
Rav Zalman Sorotskin zatsal propose une réponse intéressante, dans son commentaire sur le ‘Houmach[1]. Quand ‘Hazal affirment que Moché ne parvint pas à concevoir la pièce, ils ne font pas référence à son apparence physique. En réalité, Moché avait beaucoup de mal à saisir qu’une pièce, symbole de l’argent, puisse servir de réparation pour une faute.
Ne dit-on pas que l’argent est la racine de tous les maux ? C’est peut-être une exagération, mais il est souvent utilisé de manière préjudiciable et est à l’origine de plusieurs défauts comme la jalousie ou la cupidité.
Ainsi, Moché voulait comprendre comment ce qui est la source de tant de mal et d’ennuis peut aider l’homme à se rapprocher de son Créateur.
Hachem lui répondit à travers l’image d’une pièce faite en feu. Le feu est un exemple classique de ce qui peut entraîner énormément de bien ou provoquer de gros dégâts. Le feu a tué de nombreuses personnes et a causé des dommages considérables. Pourtant, il a aussi permis aux hommes de se chauffer et donc de survivre en hiver et de cuire leur nourriture.
Hachem véhiculait à Moché le message suivant : l’argent est au niveau spirituel ce que le feu est dans la matérialité. En effet, la richesse peut être nuisible, mais elle peut être élevée et devenir un ‘hefets chel mitsva – un objet utilisé pour accomplir une mitsva. On peut pratiquer la charité avec ses biens et ainsi aider d’autres personnes. L’argent est nécessaire pour soutenir l’étude de la Thora, pour bâtir et entretenir des maisons d’étude et des synagogues.
Dans le cas du ma’hatsit hashekel, l’argent était utilisé pour les mitsvot relatives au Michkan – un usage si noble pouvait certainement servir d’expiation pour les fautes du peuple juif.
Un enseignement similaire peut être tiré de la Méguilat Esther. Haman proposa au roi A’hachvéroch dix mille pièces d’argent pour que celui-ci l’autorise à éliminer le peuple juif.[2] Sur ce verset, la guemara cite Rech Lakich qui affirme qu’Hachem savait qu’Haman proposerait cette somme pour avoir le droit de tuer les Juifs. C’est pourquoi Il fit précéder l’argent des Bné Israël, sous forme du ma’hatsit hashekel qu’ils allaient donner chaque année[3].
La mauvaise utilisation qu’Haman allait faire de l’argent fut contrebalancée par le peuple juif qui en fit le meilleur usage.
L’exemple du ma’hatsit hashekel nous apprend comment considérer l’argent – c’est un moyen pour accomplir la mitsva de tsedaka. Et le souci de Moché Rabbénou concernant l’utilisation négative de la richesse vient nous rappeler son potentiel dévastateur.
Puissions-nous tous mériter de ne l’utiliser que pour le bien.
[1] Oznayim LaThora, 30:13, rapporté par rav Issakhar Frand chlita.
[2] Méguilat Esther, 3:9
[3] Méguila, 13b.