La paracha Matot nous dit : "Un homme, lorsqu'il fera un vœu à Hachem, ou jurera un serment pour assujettir une défense sur son âme, il ne profanera pas sa parole, comme tout ce qui sortira de sa bouche, il fera." (Bamidbar 30,3)
Joseph, le boucher juif, passe des jours tranquilles, quand soudain, une maladie pour laquelle les médecins sont impuissants vient frapper son épouse. Il lève les yeux au ciel et ne sait comment agir. Accablé par les douleurs de sa femme, il décide de prononcer un vœu pour sa guérison. Il émet explicitement le serment de donner à la caisse de charité communautaire de sa ville, la valeur de son fonds de commerce de boucherie, si son épouse retrouve la santé.
Quelques semaines plus tard, il se réjouit de constater que sa femme a retrouvé sa vitalité. Cependant, il pense que sa boucherie lui a assuré jusqu'à ce jour, une parnassa honorable. Envisager de céder son magasin et en donner la totalité du prix de vente à la tsédaka l'inquiète. Pourtant, se dit-il, j'ai fais le vœu de don de toute la boucherie à la charité publique ? Comment ferai-je sans mon outil de travail ?
Après mûre réflexion, il trouve une alternative qui lui permettrait de réaliser effectivement son serment devant D.ieu. Il rédige alors, une annonce, qu'il placarde dans la synagogue de sa ville, et dont les termes sont les suivants : « à vendre boucherie cachère pour 100.000 euros ». Il reçoit énormément de réponses… Mais, quand il ajoute que l'acquéreur devra aussi acheter un entrepôt attenant, pour 900.000 euros, les demandeurs abandonnent toute discussion.
Cependant, l'un d'eux considère que l'ensemble vaut bien le prix demandé, même si l'entrepôt est surévalué. C'est ainsi, que Joseph, notre boucher encaisse un million d'euros et s'empresse joyeusement d'offrir à la caisse de charité des pauvres de sa ville… 100.000 euros.
Pourtant toutes sortes de réflexions l'assaillent, et dans son dialogue intérieur, il se dit « mon vœu est relatif à toute la valeur de la boucherie. Dans l'annonce, seule la valeur de 100.000 euros était indiquée et j'ai bien donné cette somme en tsédaka. Ai-je commis un quelconque péché ? Quand j'écoutais les cris de douleur intenses de ma femme, pensais-je ainsi ? »
Quel enseignement peut-on tirer de cette anecdote ?
Il était difficile à Joseph de se départir de sa boucherie. Il a ingénieusement élaboré un stratagème qui consiste à introduire un élément étranger à son vœu, à savoir attribuer à son entrepôt la valeur de son magasin et afficher que celui-ci valait la modique somme de 100 000 euros. En publiant ses intentions dans sa synagogue, il estimait ainsi n'avoir rien à se reprocher. C'est pourquoi, à priori; il pensait avoir accompli son serment, avec toutefois, quelques doutes. Cette anecdote est un cas typique de détournement des termes exprimés à la fin du verset de notre paracha, «TOUT ce qui sortira de sa bouche, il fera ».
Finalement, formuler un vœu est un acte grave. Si Joseph ne fait pas téchouva sur ce point, il aura profané sa parole, passible de sanctions par D.ieu.
Moshé Taïeb