Tout en méditant, je surveille mon bébé de 5 mois sur son tapis. Il commence à se retourner, à ramper.
Je me souviens encore lorsque mon bébé commençait à passer de la position allongé sur le dos, à allongé sur le ventre, il fallait nous voir mon mari et moi allongés à côté de lui en train de l’encourager avec des petits slogans dignes des meilleurs capitaines sportifs « allez bébé allez bébé, tu vas y arriver, on sait que tu peux le faire ». Mais à aucun moment on n’a effectué la rotation à sa place. On était à ses côtés, on lui disait qu’il nous remplissait de joie et de fierté et que nous croyions en lui. Nous savions que son développement nécessitait qu’il y arrive seul. Et il y est arrivé seul.
Le but n’est pas la destination, l’état du produit fini, où le bébé sera sur le ventre, le but est le trajet, le voir passer du dos au ventre.
Je me souviens aussi lorsque mon mari a appris à mon aîné à faire du vélo. Il courait derrière lui les deux mains écartées comme prêts à le réceptionner en cas de chute, mais il le laissait pédaler seul. Il voulait qu’il se batte seul pour sa victoire, ça ne serait que comme ça qu’il la savourerait.
Le but d’un parent n’est pas de materner ou de faire les choses à la place de son enfant, pour qu’elles soient vite faites bien faites. Un parent doit apprendre à son enfant à être autonome, même si ça lui prend du temps, même si au début ce n’est pas parfait, même si ça implique sécher des larmes. Il doit être là pour lui et lui dire que la vie peut être dure par moment, elle peut sembler injuste, mais le principal c’est de continuer à pédaler, de continuer à marcher, même si parfois on tombe, l’essentiel c’est de se relever.
Lorsque Moché Rabbénou a passé le flambeau à Yéhochou’a, juste avant que le peuple entre en Erets Israël, il a donné ses recommandations au peuple « soyez forts et courageux », il a également employé ses termes pour parler à Yéhochou’a. Le mot courage en hébreu, Omets, provient de la même racine que le mot Léhitamets, fournir des efforts. En effet, le courage ne se définit pas par un acte isolé de bravoure, le courage, le vrai, est un travail constant. Malgré les difficultés de la vie, on ne baisse pas les bras, on continue de se battre, de fournir des efforts pour atteindre son but, on continue d’y croire.
Imaginez un peu si le bébé qui apprend à marcher, se décourageait au bout de quelques chutes, s’il décidait “Tant pis, j’abandonne, après tout j’arrive à atteindre tous les endroits en marchant à quatre pattes, je reste comme je suis”, imaginez à côté de quelles merveilles il passerait. Il ne verrait jamais le ciel, le sommet des arbres, les oiseaux, il ne connaîtrait jamais la sensation de courir, de sauter ou de s’accroupir, et surtout, il ne connaîtrait jamais la satisfaction de se relever après une chute, car il ne connaîtrait pas la chute elle-même. Certes, une vie sans chutes peut paraître idéale, mais en fait, pas du tout, elle serait dénuée de défis, d’efforts, de satisfaction à se surpasser. Heureusement, le bébé n’abandonne pas, non seulement il se relève, mais avec quelle joie et quel sourire il le fait.
Je suis sûre que cette sensation de faire du sur-place, ne vous est pas inconnue. Que ce soit dans la recherche d’une maison, d’un emploi, dans la volonté de tomber enceinte, de perdre des kilos, de voir son enfant passer sous la ‘Houppa. Peu importe le but, on a toutes, à notre échelle, expérimenté ces chemins laborieux qui paraissent sans issue. On déploie tous les efforts possibles, on contacte les meilleurs spécialistes, on dépense des salaires entiers dans des nouveaux traitements, et pourtant, rien ne bouge ! On a l’impression d’être pieds et poings liés, on ne sait plus vers qui se tourner, à qui demander de l’aide. On prie, on prend sur nous de bonnes résolutions afin d’activer notre délivrance, mais rien n’y fait. La situation semble bloquée, la route sans issue.
Lorsqu’on se sent bloqué dans une situation quelconque, pensons à cet enfant qui ne laissera jamais tomber, malgré les efforts que ça lui demande. Il faut continuer à se battre pour atteindre notre objectif, et surtout ne jamais avoir ce discours défaitiste de se contenter de sa situation si on en désire plus. Hachem est à nos côtés, Il nous encourage et nous dit que le mariage, la maison de nos rêves, l’emploi sur mesure, est à portée de main, mais Il sait aussi que nous ne sommes pas encore prêts pour le recevoir pleinement et en faire le meilleur des usages. Alors, Il nous murmure “Sois patient et sois courageux, la délivrance est juste là, n’abandonne pas, Je rêve de fêter avec toi ta réussite, Je veux te porter dans Mes bras de fierté, Je veux chanter et danser avec toi, lorsque tu porteras pour la première fois ton bébé dans les bras, lorsque tu t’avanceras solennellement vers ton ‘Hatan, lorsque tu signeras ce contrat tant attendu”. Mais cette réussite doit être TA réussite, alors continue à creuser, continue à grimper, ne lâche rien, et bientôt, nous célébrerons tous ensemble la Guéoula ultime du peuple entier.