Vous connaissez toutes ces journées qui commencent - et donc qui, généralement, finissent aussi - mal. Des journées où on aurait mieux fait de rester sous les couettes, des journées où tout va de travers. Généralement, elles débutent avec une panne d’oreiller, tout le monde se lève à la bourre, dans le lot, il y a toujours un enfant grognon ou enrhumé qui ne veut pas s’habiller seul, donc les cinq minutes dont dispose d’habitude la maman pour avaler son café semi-froid passent à l’as.
Tout le monde arrive à son lieu d’école ou de travail avec une demi-heure de retard minimum, la maman doit faire face aux reproches et regards réprobateurs de la surveillante générale de chacune des écoles, et de son patron, pour couronner le tout. Au bureau, rien ne va. Elle rencontre difficulté sur difficulté, le dossier qu’elle devait clôturer il y a une semaine est toujours posé sur son bureau, elle ne le regarde même plus.
Et, comble du désespoir, il n’y a plus de café là-bas non plus. Sur la route du retour, elle s’est cassé un ongle et un talon de chaussure. Elle arrive devant le pas de la porte ses bras chargés de courses, le facteur l’y attend avec son air désolé et lui tend un énième recommandé, 3ème rappel de paiement. Elle met un quart d’heure à trouver ses clés enfouies dans une poche de son sac. Elle passe le pas de la porte, elle se déchausse de sa chaussure et demie, pose ses courses, et, avec, décide de poser tous ses problèmes.
Oufffff ! Elle s’installe confortablement dans son fauteuil dont le plaid est moelleux et réconfortant, et alors qu’elle s’apprête à attaquer à coups de spatule le pot de glace vanille noix de pécan, qui a pour composant un ingrédient secret anesthésiant qui aide à tout oublier, sa petite dernière vient se blottir contre elle et lui murmure « Maman, quand tu passes une mauvaise journée, moi aussi je passe une mauvaise journée ». PAUSE ! On rembobine !
C’est tellement vrai, une maman, contrairement à toutes les autres créatures de la planète, n’est jamais solitaire et indépendante. Ses actes, ses paroles, et même ses humeurs ont un impact sur ses enfants.
Nos petits sont le papier buvard de notre vie. Si on est joyeuse, ils sont hystériques, si on est angoissée, ils sont déstabilisés, si on fait preuve d’injustice, ils se révoltent, si on les ignore, ils attirent notre attention coûte que coûte, si on hurle, ils se taisent et se renferment, si on passe une mauvaise journée, ils passent une mauvaise journée.
Je venais d’apprendre une des plus grandes leçons de vie de la bouche de mon enfant de 5 ans. J’ai choisi de travailler, j’ai choisi d’être une femme de carrière, d’être une citoyenne active, mais ma fille, elle, n’a encore rien choisi, elle est une enfant innocente que j’ai décidé d’emmener sur terre, et, depuis sa naissance, elle me subit moi et mes humeurs.
Après une profonde réflexion et quelques cuillères de glace, cette nuit-là, j’ai pris la décision qu’il n’était plus question d’angoisser mes enfants ou de les punir de façon injuste parce que ma journée de femme active ne s’était pas passée comme je l’aurais souhaité.
J’ai donc décidé que, dorénavant, je ferais une coupure entre ma journée professionnelle et mon autre journée, la vraie, la plus importante des deux, la familiale. Je ne voulais plus que ce qui s’était passé entre les quatre murs de mon bureau influence ce qui se passerait entre les quatre murs de ma maison.
Je décidai donc de faire une coupure de 10 minutes entre mon départ du bureau et mon arrivée à la maison. 10 minutes où j’écouterai de la musique dans ma voiture, 10 minutes où j’irai boire mon café au calme dans une buvette, 10 minutes où je marcherai le long de la promenade… Pendant ces 10 minutes, je remettrai mes compteurs d’énergie à zéro pour pouvoir donner le maximum à mes enfants et mon mari, il n’était pas juste qu’ils bénéficient du fond d’essence qui me restait en réserve. Pendant ces 10 minutes, je me mettrai en condition de bien-être pour jouir de chaque instant avec ma famille. Pendant ces 10 minutes, je ferai le vide dans mon esprit de ce qui s’était passé durant la journée. Pendant ces 10 minutes, je me rappellerai où est l’important, où est mon vrai but sur terre. Je me souviendrai que, si une patronne est remplaçable, une maman ne l’est pas, que si les employés ont une vie indépendante de la mienne, mes enfants n’en ont pas.
Je suis leur moteur, je suis leur énergie, je suis celle qui les construira, je suis celle qui fera d’eux des adultes sains et équilibrés qui sauront affronter les épreuves de la vie avec foi. Je ne veux pas et je ne dois pas faillir à mon devoir. Dès aujourd’hui, je reprends les rênes de mon rôle, ce rôle qui m’est si cher, ce rôle que je chéris tant : je suis leur maman.