La semaine dernière, j’ai reçu une lettre d’une célibataire de trente-huit ans avec les doléances suivantes : en dépit de sa Téchouva, d’avoir renoncé à sa vie laïque, de s’être engagée à accomplir la Torah et les Mitsvot, de ses visites chez des rabbins - des Kabbalistes, et d’avoir accompli des Ségoulot, en bref, d’avoir fait tout ce qu’il faut… elle n’a pourtant pas trouvé son Bashert - son âme sœur. Elle se demandait où D.ieu se trouvait, et s’interrogeait sur le sens de tous ses sacrifices ; elle était amère et en colère contre D.ieu et considéra tous ses efforts comme vains. Voici ma réponse :
"Ma chère amie,
Tout en écrivant cet article, la section de la Torah est la Paracha de ‘Houkat. J’ai découvert que si l’on recherche comme il faut, la Paracha de la semaine offre des clarifications sur des défis auxquels nous sommes confrontés.
Vous nourrissez du ressentiment ; vous avez l’impression d’avoir été traitée injustement, que votre engagement envers la Torah et les Mitsvot a été futile, et dans votre désillusion, vous êtes en colère contre D.ieu et prête à renoncer à tout.
Examinez la section de la Torah à laquelle je me suis référée. Myriam, Aharon et Moché lui-même, les géants de notre peuple, ont vu leurs espoirs et leurs aspirations brisés. Leur rêve d’entrer en Terre Promise n’a jamais été réalisé. Ils auraient pu argumenter : « Pour cela, nous nous sommes sacrifiés ? Pour cela nous nous sommes donnés de la peine ? Le peuple a le privilège d’entrer en Erets Israël et nous non ? Où est la justice ? C’est injuste ! C’est quoi cette histoire! ». Mais ils ont gardé le silence et ont accepté la Volonté de D.ieu avec sérénité, amour, et de tout cœur. Durant tous nos longs siècles d’histoire douloureuse, les insignes, l’emblème de notre peuple, ont été une foi inconditionnelle. Peu importe où la vie nous a conduit, peu importe quelle catastrophe nous a touché, nous nous sommes attachés courageusement à notre D.ieu. Il va de soi qu’il y a eu certains individus dont la foi a flanché, qui ont disparu dans le melting-pot de l’assimilation, mais nous, le peuple juif, avons triomphé, et notre Chéma’ Israël a résonné et continue à résonner dans le monde. Je peux moi-même le certifier… Comme vous le savez peut-être, je suis une enfant de la Shoah.
De mes propres yeux, j’ai vu notre peuple, auquel le passage suivant s’applique : « Mé Nécharim Kalou - ils ont été plus rapides que les aigles… plus fort que les lions, pour accomplir la volonté de leur Créateur… ».
Je n’oublierai jamais le visage empreint de sainteté et la voix de mon révéré père, le Rav et Gaon Avraham Halévi Jungreis zatsal, qui, après notre propre libération de Bergen Belsen, a reçu la nouvelle funeste et catastrophique qu’il était le « Ben Ya’hid - le seul fils survivant » de la glorieuse famille rabbinique de mon grand-père. D’une voix tremblante, les yeux emplis de larmes, mon père s’est écrié : « Ribono Chel ‘Olam, Ich beyt nor ein zach… Je ne demande qu’une chose… que tous mes enfants, tous mes descendants restent attachés à la Torah… ».
Pensez-y et intégrez-le bien. N’aurait-il pas été justifié que mon père dise : « J’en ai assez ! Si telle est la récompense de remarquables Tsadikim, si c’est la manière dont Tu protèges Tes bien-aimés, il n’y a pas de raison que je reste ici pour me sacrifier. J’ai eu ma dose ! Je démissionne ! ».
Cela n’aurait-il pas été la réponse logique ? N’aurait-ce pas été la réaction d’un grand nombre de personnes dans notre génération qui reconnaissent les droits, mais pas les devoirs, les droits et non les responsabilités, les privilèges, et non les obligations ? Mais mon père bien-aimé et révéré, comme des millions d’autres au fil des nombreux siècles et sur tous les continents, n’avait qu’une seule requête, une prière - que la lumière de la Torah brille pour toujours dans le cœur de ses descendants…
Je vous demande d’intégrer tout ceci, d’y réfléchir et d’y réfléchir encore.
Ceci dit, permettez-moi de me reporter à votre dilemme personnel.
J’ai eu le Zekhout, le mérite de fonder Hinéni, l’un des tout premiers mouvements de Ba’alé Téchouva dans le monde il y a plus de 40 ans, j’ai été impliquée dans le Kirouv (rapprochement des Juifs au judaïsme) depuis ma tendre enfance. Mon saint père était un visionnaire, bien en avance sur son époque. Au grand dam du monde ‘hassidique orthodoxe, il s’installa à Szeged (à ne pas confondre avec Sziget, un shtetel en Roumanie). Szeged était une ville cosmopolite, la deuxième plus grande ville de Hongrie, et aussi la plus assimilée. Mon père y créa une communauté orthodoxe et raviva la flamme de la Torah dans le cœur de notre peuple.
J’ai donc été abreuvée de Kirouv depuis mon jeune âge. Au fil des ans, j’ai appris qu’il est très dangereux de dire à un laïc que si seulement il agissait ainsi, les cieux s’ouvriraient pour lui et tous ses rêves deviendraient des réalités. Notre mode de vie conforme à la Torah n’est pas un magasin de bonbons… les sucettes ne tombent pas du ciel, et il n’y a pas non plus de garantie de couler des jours heureux. La vie est un test. En réalité, c’est le titre de l’un de mes livres… nos vies sont remplies de turbulences… il y a des hauts et des bas, beaucoup d’obscurité, mais aussi de la joie. Mais l’obscurité semble toujours éclipser la lumière du soleil. En un instant, le ciel s’assombrit de nuages menaçants, de tonnerre terrifiant et d’éclairs qui prennent le dessus sur nos vies, mais notre foi demeure intacte. L’héritage de nos ancêtres, l’Alliance du Sinaï sont pour toujours gravés dans notre cœur et notre âme. Nous comprenons qu’il est de notre devoir, de notre responsabilité de maintenir cette alliance, de nous y attacher et de la conserver précieusement. Nous le faisons car nous croyons et sommes engagés envers notre D.ieu, et n’attendons ni récompense ni distinctions pour notre loyauté. De même que les citoyens d’un pays savent qu’ils sont tenus de payer les impôts sans fanfare ni récompense, nous réalisons aussi que vivre dans le monde de D.ieu est un privilège, et nous devons aussi « payer nos taxes » par notre adhésion à la Torah et aux Mitsvot.
Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons renverser notre destin par le pouvoir de la Emouna, mais que nous réussissions ou non, nous devons payer nos taxes. De toute évidence, la prière et les Mitsvot sont nos armes les plus puissantes. Faisons-y appel et « Yéchou’at Hachem… - l’aide de D.ieu peut survenir en un clin d’œil ». Alors ne perdez pas la foi… ne jetez pas l’éponge. Votre Bashert vous attend peut-être au coin de la rue, et vous pouvez encore être bénie d’enfants et de petits-enfants. J’ai assisté à des histoires merveilleuses, même avec des femmes bien plus âgées que vous. Alors ne perdez pas la foi. Suivez plutôt les instructions du Roi David : « Kavé El Hachem… placez votre confiance et votre espoir en D.ieu... ’Hazak - renforcez votre cœur et continuez à prier et encore à prier » (Psaume 27).
Enfin, puis-je vous suggérer de venir dans notre centre Hinéni. Qui sait ? Peut-être que je connais quelqu’un pour vous, ou peut-être notre coordinateur de Chiddoukh, Phyllis Blackman, sera là pour vous aider. Soyez proactive ! Ne renoncez pas, ayez à l’esprit que même dans l’obscurité la plus dense, l’aube arrive. Pendant ce temps, mes Brakhot, mes bénédictions pour que vous puissiez fonder une Bayit Nééman Béisraël, un foyer juif et une vie de famille authentique."