Un vendredi de ce mois d’Eloul, je me trouvais dans un marché de la région parisienne à faire mes courses pour Chabbath. Au milieu des cris des vendeurs, j’ai soudain prêté attention à une clameur distincte qui se faisait de plus en plus proche de là où j’étais, et j’ai aperçu une femme originaire des îles françaises qui exprimait tout en marchant un sermon de remontrances : “La vie passe vite, très vite. Au lieu de la meubler de futilités, arrangez votre conduite, éloignez-vous du chemin des fauteurs, D.ieu vous aime et ne cherche que votre bien…”, disait-elle. Surpris d’entendre un tel discours dans un cadre qui ne s’y prêtait pas vraiment, cette rencontre inattendue m’a marqué. Il n’y avait aucune référence à un culte étranger dans ces paroles, et j’ai finalement écouté de manière pour le moins imprévisible, un discours de Moussar en plein mois d’Eloul.

Un message vrai reste vrai quelle que soit la personne qui le véhicule, et parfois le destin nous lance ce message de manière originale, pour justement créer un effet de surprise qui accapare nos sens. Cette petite expérience vient illustrer un moyen qui nous a été donné pour parvenir à provoquer un réveil spirituel : si de façon générale, il est nécessaire de rester dans un même cadre dans notre quotidien pour conserver nos repères, parfois un changement ponctuel apporte une dynamique qui a pu s’effriter avec la routine. Par exemple, on conseille de toujours prier dans la même synagogue et assis à la même place, afin de pouvoir se concentrer convenablement. Mais de temps à autre, découvrir une synagogue différente, nous apporte de la fraîcheur dans la prière. Il est tout aussi bien de s’isoler dans la nature pour parler à D.ieu afin d’établir un relationnel, difficile à obtenir dans un cadre communautaire.

Le renouvellement est un besoin de l’homme, et cela même pour un grand Rav comme le ‘Hafets Haïm. En effet, son fils rapportait qu’un jour de Roch Hachana, le Rav - alors bien âgé - s’éloigna de la ville vers les champs avoisinants. Intrigué, il le suivit et lui demanda une explication à sa conduite. Le ‘Hafets Haïm lui répondit : “Aujourd’hui, c’est un jour de Jugement, et je me demande combien sont ancrés en moi les sentiments de crainte et d’amour de D.ieu ! Sans réflexion sur Sa grandeur, comment peut-on parvenir à ces niveaux ? C’est pourquoi, je suis parti dans la nature pour la rechercher !”

Nous sommes à la veille de Yom Kippour. Si l’on vous demande quelle est la caractéristique de ce saint jour, vous répondrez naturellement que l’on doit jeûner, se mortifier, s’abstenir de faire des travaux interdits ; on y prie 5 prières, séparées par les Séli’hot, que l’on conclut en sonnant du Chofar. Pourtant dans toute cette énumération, il manque le principal, le but de cette fête : la Téchouva. Comme le rapporte le Rambam, il est un devoir pour chacun, individuellement et collectivement, de faire Téchouva en ce jour, de confesser ses fautes et les regretter. Le problème, c’est que l'on est tellement pris par les Téfilot qui se succèdent, les chants, la faim, les enchères, les coings au clou de girofle, que l’on risque d’en oublier la Téchouva

C’est pourquoi, il sera parfois nécessaire de sortir du cadre habituel pour opérer un examen intérieur afin d’essayer de déceler ses défaillances et rechercher les moyens d’y remédier. Un petit isolement, un changement de synagogue pour l’une des prières, une lecture intéressante de Moussar permettront de bonifier ce grand jour de l’année. 

Nous souhaitons de bonnes nouvelles pour tout le Klal Israël, et que chacun d’entre nous soit signé dans le livre des Tsadikim, Amen