Voici un exemple concret d'un cas traité par des tribunaux rabbiniques afin d'apprendre à voir et à assimiler peu à peu le « Daat Torah », le fait d'avoir un esprit et une réflexion de plus en plus en accord avec la Torah.
 

Question

Michaël est Machguia’h Cacheroute (surveillant des produits alimentaires) de son métier. Il propose ses services dans les réceptions au courant de l’année. Ce Pessa’h, sa femme est fatiguée et lui suggère donc de travailler dans un hôtel Cachère. En contrepartie, ils pourront jouir d’un séjour reposant et sans frais qui sera son salaire.

Michaël téléphone à plusieurs hôtels qui lui refusent tous ce compromis. Finalement, Ilan, qui organise Pessa’h dans les Alpes, accepte toutes ses conditions. Mais durant le séjour, le courant ne passe pas vraiment entre eux. Ilan congédie Michaël dès qu’il entend que son concurrent et voisin a besoin d’un Machguia’h. Il lui demande aussi de libérer les chambres afin de ne pas lui occasionner des frais de séjours inutiles.

Toutefois, Michaël ne l’entend pas de cette oreille car sa femme ne veut pas effectuer tout un déménagement pour seulement quatre jours. Ils vont donc rester sans pour autant effectuer aucun travail ni service. Ilan exige un paiement pour les quatre derniers jours du séjour.
 

Psak et explications

Ilan était en droit de les renvoyer de son hôtel. Aujourd’hui, il peut exiger un paiement pour les quatre jours. La raison à cela est que selon toute évidence, le contrat qui les lie est celui d’employé/employeur. Ilan, sachant que Michaël trouvera du travail, est donc en droit de le congédier. Michaël aurait alors dû accepter l’offre du voisin et évacuer les lieux. Selon la Halakha, tout se passe donc comme si la famille occupait la chambre d’hôtel sans permission et sans rien donner pour paiement.

La Halakha aurait été différente si le contrat entre Ilan et Michaël avait été d’une autre nature, à savoir une location de chambre d’hôtel pour sa famille, avec comme paiement un service de Machguia’h Cacheroute. En effet, on ne peut renvoyer un client de sa chambre aussi facilement, même si un autre hôtel à proximité dispose de chambres libres. Dans ce cas, on considère que le client a un statut de locataire avec en sus des services de la part de l’hôtel. Pour cette raison, on ne pourra pas résilier le contrat en milieu de parcours, comme on ne peut le faire pour un locataire conventionnel.

Dans notre cas, quelle que soit l’approche de Michaël et même si Ilan a bien compris l’intérêt, à savoir procurer du repos à sa femme, l’essentiel reste que l’hôtel a engagé ses services et non le contraire : Michaël ne paye pas les chambres par son travail. La raison à cela est que l’hôtel était demandeur d’un Machguia’h, donc malgré le besoin de Michaël et son histoire personnelle, l’état d’esprit reste commercial dans le sillon de tout ce qui est organisé par l’hôtel, et Michaël vient s’insérer dans ce cadre professionnel.

Si le contrat avait été l’inverse, c’est-à-dire que l’hôtel n’avait pas vraiment besoin d’un Machguia’h et que, par amitié, Ilan aurait accepté d’héberger gracieusement la famille en échange de services, nous aurions vu cette relation comme une location en échange de services. Dans ce cas, Ilan n’aurait pas pu congédier la famille, au même titre que tous les autres clients.

En revanche, Ilan aurait eu le droit de licencier Michaël car celui-ci avait trouvé une place équivalente. La famille aurait pu rester dans ses quartiers, mais elle aurait quand même dû payer comme tous les autres clients.

A ce sujet, il faut savoir que le ‘Hokhmat Chlomo (227, 20) fait une différence en fonction de celui qui a abordé l’autre. Si un ouvrier cherche un costume et entre dans un magasin en proposant ses services contre un habit, ce sera un contrat d’achat de costume. Mais si le vendeur aborde lui-même l’ouvrier et lui fait cette proposition, ce sera considéré comme un contrat d’employeur à employé.

Dans le cas de l’hôtel, on ne fera pas cette distinction selon laquelle qui a abordé l’autre, mais plutôt comme nous l’avons écrit précédemment.

 

Rav Yossef Simony

Bet-Din francophone "Michpat Chalom"
sous la direction du Rav Baroukh Chraga est actif à Jerusalem, Nathania et Ashdod
Dayanim : Rav Réouven Cohen, Rav Itshak Bellahsen, Rav Yossef Chaynin, Rav Dov Rozman, Rav Yehouda Levy et Rav Ellia Yafé.
www.Michpat-Chalom.com