Ticha' Béav est un jour de deuil et de jeûne majeur dans le calendrier juif, commémorant la destruction des Temples de Jérusalem. Cet article explore l'évolution de Ticha' Béav à travers les âges, en mettant en lumière les différentes tragédies qui ont frappé le peuple juif et en soulignant l'importance de se souvenir, de se connecter et de se reconstruire.
Le premier Temple de Jérusalem, construit par le roi Salomon, fut détruit par les Babyloniens en 586 avant l’ère commune. Cette tragédie marqua un tournant décisif dans l'histoire du peuple juif, entraînant une période d'exil et de captivité à Babylone. Les Juifs ressentirent une profonde tristesse et une perte spirituelle immense. Ticha' Béav devint le jour pour commémorer cette destruction et rappeler la nécessité de se repentir et de se rapprocher de D.ieu.
Le second Temple, érigé après le retour des Juifs de Babylone, fut détruit par les Romains en l'an 70 de l'ère commune. Cette dévastation marqua une autre période de deuil et d'exil pour le peuple juif. Les Juifs furent dispersés dans la diaspora, et Jérusalem perdit sa place centrale en tant que lieu de culte. Ticha' Béav devint alors un symbole de la destruction et de la perte de la souveraineté juive en Terre d’Israël.
Au fil des siècles, d'autres tragédies frappèrent le peuple juif, et Ticha' Béav devint le jour pour commémorer ces événements. Les persécutions, les pogroms et les expulsions de Juifs à travers l'Europe et le Moyen-Orient furent associés à cette date. Parmi les événements notables, on trouve l'expulsion des Juifs d'Espagne en 1492 et le début de la Première Guerre mondiale en 1914, qui eut des conséquences dévastatrices pour les communautés juives.
L'une des questions essentielles que l'on peut se poser à propos de Ticha' Béav est la suivante : pourquoi devons-nous continuer à commémorer ces événements douloureux, des milliers d'années après qu'ils se soient produits ? Pourquoi ne pas simplement tourner la page et se concentrer sur des événements plus joyeux de notre histoire ?
La commémoration de Ticha' Béav ne se limite pas à se souvenir des tragédies passées, mais elle est aussi un rappel de l'importance de se connecter à notre histoire et à notre identité. En nous remémorant les souffrances endurées par nos ancêtres, nous nous connectons à leur expérience et renforçons notre résilience en tant que peuple. Nous nous rappelons également les leçons essentielles de la Sinat ‘Hinam (la haine gratuite) et de l'importance de l'unité. Dans le traité Ta'anit, il est dit : "Celui qui prend le deuil de Jérusalem mérite de voir sa joie. Mais celui qui ne le fait pas n'a pas l'occasion de voir la joie de Jérusalem" (Ta'anit 30b). Cette déclaration souligne l'importance du deuil de Jérusalem en tant que préparation à la joie future.
Bien que Ticha' Béav soit un jour de deuil, il porte également en lui un message d'espoir et de reconstruction. Le peuple juif a surmonté de nombreuses tragédies au fil des siècles et a réussi à se reconstruire à chaque fois. La création de l'État d'Israël en 1948 est un exemple de cette résilience et de cette volonté de reprendre le contrôle de son destin. Ticha' Béav nous rappelle que, même dans les moments les plus sombres, l'espoir et la reconstruction sont possibles. Il est écrit : "Consolez, consolez Mon peuple, dira votre D.ieu" (Isaïe. 40 ;1) Le Midrach (Yalkout Chimoni Yéchayahou 245) rapporte à propos de ce verset l’enseignement de Rabbi 'Hanina Bar Papa : "Les Bné Israël dirent au prophète Yéchayahou : Rabbénou Yéchayahou, se pourrait-il que tu ne sois venu consoler que la génération dans laquelle le Temple fut détruit ?"
Il leur répondit : "Je suis venu consoler toutes les générations", car il n’est pas dit : "Consolez Mon peuple, dit votre D.ieu", mais "consolez Mon peuple, dira votre D.ieu. "Ce Midrach signifie que, chaque année, après les jours de deuil sur la destruction du Temple et l’exil du peuple juif, une voix céleste retentit dans les hauteurs et proclame : "Consolez, consolez Mon peuple", et D.ieu fait souffler un vent de consolation pour Son peuple et Ses fils bien-aimés. Il les console, raffermit leurs coeurs endoloris et panse les blessures de leurs âmes. Ce n’est pas tout : D.ieu s’adresse à nous par cet appel : "Consolez, consolez Mon peuple", voulant nous dire : "Je vous demande de vous consoler et de vous ressaisir".
Ticha' Béav est un jour de deuil profondément enraciné dans l'histoire juive, commémorant les tragédies passées et rappelant les leçons importantes à tirer de ces événements. En nous connectant à notre passé, nous renforçons notre identité en tant que peuple juif et nous puisons dans notre résilience pour construire un avenir meilleur. Ticha' Béav nous rappelle également que, malgré les difficultés, il y a toujours de l'espoir et la possibilité de se reconstruire.