David et Shimon arrivent en courant pour assister à la finale du match de foot de leur école.
Samuel les presse de s’installer et leur demande : « Mais, qu’avez-vous fait ? Le match va commencer ! »
« Écoute, on n’était pas sûrs de venir, on hésitait avec rester étudier à la Yéchiva. On a décidé de tirer à pile ou face ! »
« Eh bien pile ou face c’est rapide ! Où est le problème ? »
« Le problème, c’est qu’on a dû tirer quarante fois ! »
Au lendemain de Yom Kippour et à la veille des fêtes de Souccot, ce temps de la réjouissance, nous allons donc lire la Paracha Haazinou. Bien sûr, cette place de choix de notre texte dans le calendrier hébraïque ne doit rien au hasard, ses enseignements et sa portée universelle ont justifié aux yeux de nos Sages qu’elle soit lue à cette période de l’année.
Ce texte interpelle à différents égards, et il nous invite à prendre du recul et de la hauteur. Il nous interpelle tout d’abord par son style qui rompt avec le mode d’écriture traditionnel de la Torah. En effet, il s’agit d’un chant, d’une poésie découpée en demi colonnes avec un langage métaphorique et qui invite le lecteur à faire travailler son imagination.
En outre, notre Paracha se place d’emblée sur un terrain historique de la longue durée, elle embrasse en quelques mots, en quelques phrases la totalité de l’histoire de l’humanité. Elle nous rappelle notamment que l’homme est le maillon d’une chaine qui relie toutes les générations, et la compréhension de la vie humaine, du rôle de chacun, et de la justice divine ne peuvent se faire qu’à travers ce temps long.
À la sortie de Yom Kippour et de la période de Téchouva intense qui l’a précédé, l’homme est donc invité à prolonger sa méditation et à ne pas repartir dans son quotidien tête baissée.
À l’image de nombreux textes que nous avons lus ces dernières semaines, ce qui importe dans notre Paracha c’est d’amener l’homme à comprendre l’esprit de la Torah, à l’intégrer dans son quotidien afin de donner un relief et une profondeur particulière à sa vie. L’application concrète des commandements est bien sûr indispensable, mais elle ne peut se faire de manière efficace, c’est-à-dire conformément à l’objectif poursuivi par D.ieu en nous confiant la Torah, qu’avec l’état d’esprit adapté. La lettre et l’esprit sont indissociables dans la Torah.
À la faveur de ce texte, Moche Rabbénou met une nouvelle fois les enfants d’Israël face à leurs responsabilités, en leur rappelant dès les premiers mots qu’ils ne doivent leur infortune qu’à leurs égarements et leur mauvaise conduite. L’homme a vite fait de se retourner vers l’Éternel lorsque les évènements ne lui conviennent pas alors que c’est d’abord vers lui-même qu’il devrait se tourner, non pas seulement pour s’accabler, même si un examen de conscience et une introspection sincères sont toujours salutaires, mais aussi et surtout pour faire des évènements qu’il vit une opportunité d’élévation.
Écoutons notre Paracha (chap. 32, versets 4-6) : « Lui, notre rocher, Son œuvre est parfaite, toutes Ses voies sont la justice même; Dieu de vérité, jamais inique, constamment équitable et droit. Est-ce lui qui a condamné Ses enfants? Non, c'est leur propre indignité, ô race perverse et tortueuse! Est-ce ainsi que vous payez Dieu de retour, peuple insensé et peu sage? »
Rachi nous précise en quelques mots ce manque de sagesse du peuple : « Et non sage : pour comprendre les événements, qu’il est en son pouvoir de rendre propices ou néfastes. »
Notre texte invite donc l’homme à ne pas rester spectateur de sa vie, mais à véritablement en devenir l’artisan, l’orfèvre pourrait-on dire. Cette conscience que l’homme doit développer en lui s’appuie non seulement sur une analyse à priori des chemins qu’il emprunte, et une capacité à choisir la voie juste à suivre, mais aussi sur une analyse à posteriori des évènements qu’il vit, et la volonté d’en faire des outils au service de son perfectionnement et de son rapprochement avec Hachem.
En effet, si l’on met de côté les cas extrêmes qui échappent à notre compréhension, l’homme conserve bien souvent la liberté ultime de donner un sens aux évènements qu’il vit et de décider de les rendre utiles ou bien stériles.
Dans le premier cas, l’homme essaiera de comprendre ce qui l’a amené dans telle situation et il réfléchira aux moyens de ne plus s’y retrouver, il s’interrogera sur les enseignements qu’il doit en tirer et il prendra des résolutions concrètes susceptibles de l’aider à s’améliorer. Dans le second cas, il s’affligera de son infortune, puis il essaiera tant bien que mal de reprendre le cours de son existence.
La sagesse à laquelle nous invite notre Paracha est d’ancrer en nous la conviction d’une perfectibilité permanente de l’homme et du monde. Et l’aventure du peuple juif coïncide précisément avec cette quête de perfectibilité, tant au niveau individuel que collectif.
En effet, l’homme n’est pas livré aux hasards de la vie, il ne doit pas affronter un déterminisme - ou une fatalité - qui le dépasse et le submerge. Nos Sages nous disent « il n’existe pas de fatalité pour Israël », l’homme est aux commandes de sa vie, il a le (super) pouvoir de décider du sens de son existence, de la voie dans laquelle il souhaite aller, et il bénéficie pour y parvenir du concours de la providence divine.
Tous les hommes ne naissent pas effectivement dans les mêmes conditions, ils ne partent pas tous du même niveau mais ils ont tous la possibilité de parcourir un chemin, selon leur sensibilité et leur histoire, vers le bien. Non seulement, ils en ont la possibilité, mais là réside le but de leur existence : apporter leur contribution au perfectionnement du monde et de l’homme.
La Téchouva nous a appris que les erreurs du passé ne préjugent pas de nos réalisations futures, l’homme peut décider à chaque instant de rompre avec ces fautes, et de s’engager vers le bien.
Dans cette période de spiritualité intense, il est effectivement indispensable de se pénétrer de cette conviction pour ne pas segmenter son existence entre le spirituel et le matériel, mais en essayant de les associer afin de donner à son existence une cohérence globale.
Avec l’aide d’Hachem, nous pourrons ainsi diffuser la spiritualité que nous vivons ces jours-ci tout au long de l’année, et essayer de vivre à proximité de notre Créateur en donnant aux évènements de la vie l’orientation positive dont ils sont porteurs.
Max est face à un dilemme cornélien. Ce soir, jour de son étude hebdomadaire avec Rabbi Chmouel, a lieu également la retransmission à la télévision de la finale de Champions League de football. Ne sachant quoi faire, Max se décide enfin à faire part de son problème à son Rabbin.
« Rabbi, excusez-moi de vous déranger, mais je ne sais pas quoi faire. Ce soir, on doit avoir notre cours, comme chaque semaine, mais à la même heure il y a une finale très importante de football à la télévision ! »
« Enfin Max, ce n’est pas un problème. À quoi servent les magnétoscopes d’après toi ? »
« Vraiment Rabbi ?! On peut enregistrer le cours de ce soir sur un magnétoscope ?... »