L’incroyable histoire d’amitié qui va lier un esclave hébreu, Eliakoum à un prince égyptien : Ankhéfènie, sensible à la souffrance humaine.
Sur fond de sortie d’Egypte, découvrez au fil des épisodes comment un héritier du trône égyptien s’apprête à troquer le pouvoir absolu contre une vérité qui le transcende, au fil de ses débats théologiques avec l’un des représentants de la caste la plus méprisée et la plus vile de la société égyptienne.
Résumé de l’épisode précédent :
Alors que le prince Ankhéfènie est de plus en plus intéressé par la sagesse des Hébreux, et que l’esclave Eliakoum commence à se plaire et à se perdre dans la luxure égyptienne, l’Histoire suit son cours...
Il y avait du remue-ménage ce jour-là à Goshen. La ville qui d’ordinaire était pour le moins vide, bourdonnait. Les anciens et les sages de la ville étaient tous là, regroupés autour de cet homme venus de Midiane : Moché.
A Goshen, tout le monde connaissait l’extraordinaire histoire du fils d’Amram, sauvé des eaux sournoises du Nil par Bitya, la fille du Pharaon. Mais, bien qu’immergé dans le faste du palais égyptien depuis son plus jeune âge, Moché ne quittait jamais les maisons d’études des Lévites. Sa noblesse d’âme et ses prodigieuses capacités intellectuelles lui avaient valu le respect de ses pères.
Il jouissait d’une liberté égale à celle des égyptiens, les gardes royaux lui témoignaient un respect mêlé de méfiance. Son statut était on ne peut plus flou ; membre de la cour, mais aussi fils des Hébreux, il bénéficiait d’un traitement particulier. A la cour, on ne le voyait que très peu, pour le plus grand bonheur de sa mère biologique Yokhévèd, qui put ainsi assurer son éducation religieuse, et de Pharaon qui s’en méfiait comme de la peste.
Mais tout cela prit fin lorsqu’un beau jour, pour défendre un esclave, il mit un terme à la vie d’un des agents de corvée. Ce dernier s’acharnait sur un innocent à coups de massue, pour qu’il presse sa cadence de travail. Les coups pleuvaient de toutes parts, et il s’en fallut de peu pour que l’Hébreu en perde la vie. Moché s’interposa, le somma d’arrêter, mais rien n’y fit, l’égyptien était possédé par le désir aveugle du meurtre. Moché n’eut d’autres choix que d’utiliser un des Noms divins pour secourir le misérable. L’égyptien s’immobilisa instantanément. Il rendait son dernier souffle. L’incident arriva vite aux oreilles de Pharaon qui décréta la peine capitale pour le fils adoptif de Bitya.
Personne ne saurait dire ni comment ni pourquoi les hommes de mains du roi, pourtant si aguerris, ne parvinrent à remplir leur mission. On ne les revit jamais…
Ce jour-là, Moché réapparut à Goshen. Son aspect avait changé, il n’était plus le même. Une sagesse particulière émanait de son visage. Quelque chose d’intensément profond…
Les sages l’accueillirent avec engouement. Le reste du peuple se joint aux retrouvailles. Les esprits étaient quelque peu alertes, Moché était un fugitif après tout…
Il faisait frais ce jour-là. Des oiseaux s’étaient installés sur les quelques branches sèches des arbres morts de Goshen. Leurs chants accompagnaient l’occasion. Les enfants profitaient du temps agréable pour chahuter, comme ça n’est pas la coutume à Goshen. Les femmes discutaient sur les blocs de briques qu’elles avaient confectionnées de leurs propres mains. L’ambiance était plutôt décontractée ce jour-là à Goshen…
Au milieu de la place, Aharon, le frère de Moché, l’accompagne. Plus qu’un frère, il était également son porte-parole. Depuis qu'enfant, il brûla ses lèvres dans le palais de Pharaon, Moché éprouvait certaines difficultés à l’élocution, Aharon se chargeait de lui alléger cet effort.
Les deux fils d’Amram se virent encerclés par les anciens de Goshen, les gens du peuple se tenaient à une distance plus éloignée.
Après quelques propos échangés, l’assemblée se mit à frémir. Les jeunes s’approchèrent, la curiosité l’emportait sur la préséance. Les Sages s’emportaient, ils vrombissaient. Les femmes se levèrent rapidement de leurs assises, rapatrièrent leurs enfants, craignant que tout ce bruit n’ameute les gardes.
Aharon et Moché étaient parfaitement sereins au milieu de toute cette agitation. Alors que les mots fusaient à toute allure dans un vacarme assourdissant, Moché leva son bâton bien haut pour que tout le monde le voie. L’assemblée se tut peu à peu. Une fois le silence gagné, il projeta son bâton avec vigueur sur le sol sec et lentement, le miracle se produisit. Le long bâton se transforma peu à peu.
Sous les yeux éberlués de l’assistance, le bois épais se distorda lentement, ses contours s’arrondirent, et il se changea en peau écaillée aux couleurs jaunâtre et marron. Un magnifique cobra apparut.
La foule était bouche bée. Les gens sentaient qu’ils étaient en train de vivre quelque chose de grandiose. Le cours de l’Histoire s’apprêtait à changer.
La foule eut un mouvement de recul. Le serpent alla se nicher au pied de Moché, le regard rivé sur ses spectateurs, dressé comme un piquet. Moché tendit sa main vers la queue du reptile, et le miracle opéra à nouveau. Lentement, la peau du serpent se raidit, elle se remplaça par l’écorce dure du bâton de bois inerte. Le public avait assisté à quelques chose de surnaturel.
Les Hébreux de Goshen se tenaient à présent devant Aharon et Moché avec un tout autre regard. Mais Moché ne s’arrêta pas là. Il profita du calme apparent pour annoncer son deuxième prodige. Il leva la main pour que tout le monde voie qu’elle était tout à fait normale. Et, sans mot dire, il la plongea dans le pan de son châle. Lorsqu’il la sortit, elle était couverte de lèpre. La foule lâcha un son de stupeur. Son bras se couvrit de craquements de peau lépreuse. Des contusions blanchâtres enveloppaient tout son bras, il le fit tourner au-dessus de sa tête pour que tout le monde puisse bien le discerner. Les femmes cachaient les yeux de leurs enfants, les visages tirèrent une mimique de dégoût.
Après quelques instants, il l’a remit dans son habit et elle reprit son aspect naturel. Les gens se regardaient confus. Seuls les anciens étaient encore un peu dubitatifs…
Moché procéda alors à son dernier signe. Il prit les eaux d’une jarre, remplie le matin-même des eaux du Nil. Élevant la jarre d’eau bien haut pour que tout le monde puisse la voir, il la fit tournoyer pour que le public reconnaisse qu’il s’agissait bien d’eau.
Puis, d’un coup, il déversa son contenu sur le sol aride. L’eau, au contact du sol, se transforma en un sang rouge, épais et visqueux. Les gouttes éclaboussèrent le public et tous sentirent l’odeur nauséabonde du sang sur leurs vêtements. Une grande mare de sang opaque s’était formée en plein milieu de la place.
L’assemblée était conquise. Les hésitations laissèrent place à une conviction religieuse, ce moment était attendu depuis tellement longtemps. Des rayons de joie illuminaient les visages fatigués des esclaves de Goshen, les larmes des vieillards se mêlaient aux rires des enfants. Les femmes étreignaient leurs enfants. Enfin ! Après tant d’années de souffrances, une lueur d’espoir à l’horizon.
Les anciens courbèrent l’échine en signe de respect pour Moché, les jeunes sautaient de joies, les enfants couraient dans tous les sens. Le sauveur était arrivé !
Les jeunes hommes entonnaient « Vive le Machia’h », « Longue vie au sauveur » !
Moché avait dit ces mots que les anciens purent reconnaître « Pakod Pakadti Etkhèm » « Délivrer, Je vous délivrerai ». Ils attendaient le moment où la prophétie de Yaakov se réaliserait. La tradition disait qu’un jour, un sauveur se présenterait au portes de la cité de Goshen avec ces mots en guise de signe de la libération.
Tamar aurait tellement voulu que son fils Eliakoum partage ce moment avec elle et ses deux filles. Enfin, nous serons libre…