Notre haftara est la quatrième des textes de consolation lus à l’issue de Ticha Be Av, et tous issus du livre d’Isaïe.
Notre texte débute sur la promesse que la consolation du peuple Juif viendra directement de D.ieu avec le renouvellement du sujet « Anokhi, Anokhi menakhemkhem » « Je suis, Je suis votre source de réconfort… ». Dès lors, les Bné Israël n’ont pas à craindre leurs ennemis qui n’ont aucune consistance devant leurs ennemis.
Notre texte rappelle également la promesse d’Hachem de sauver le peuple, d’hâter la délivrance, et ils nous rappellent même en conclusion l’apaisement et la félicité de la délivrance finale : « Car ce n'est pas avec une hâte éperdue que vous vous échapperez, ce n'est pas dans une fuite précipitée que vous partirez; mais l'Eternel sera votre avant-garde, votre arrière-garde le Dieu d'Israël. » (Isaie, 52-12)
Les points communs entre la paracha et la Haftara
Comme chaque semaine, au-delà la thématique relative à la consolation, il est possible de trouver un lien entre la Haftara et la paracha.
Tout d’abord, la haftara déplore l’absence de dirigeant pour guider le peuple juif (Isaïe 51-18), alors que la paracha évoque la mitsva de nommer des juges, des officiers, et même un roi juif.
Nos deux textes évoquent l’absurdité de craindre les ennemis qui se dressent devant le peuple juif dès lors que D.ieu nous protège.
Et, nous pouvons ajouter, que le peuple Juif est appelé à se réveiller, et se séparer des mœurs dévoyés des nations auprès desquels ils vivent.
L’échos de la haftara
La lecture de la haftara de cette semaine est assez familière, tant ces versets sont restés célèbres dans la liturgie. D’une part, elle décrit de façon merveilleuse la promesse de consolation qui attend les enfants d’Israël, et notamment l’avénement de l’ère messianique, si bien que plusieurs versets de notre texte ont été intégrés au rituel de la Havadala dans le fameux texte que nous lisons à l’issue de Chabat « Veyiten lekha… ».
D’autre part, certains versets de notre haftara, ou « morceaux de versets » sont récités chaque semaine avec ferveur dans le célèbre piyout (le poème) de l’entrée de Chabat « Lekha Dodi », composé par Rabbi Chlomo Alkabetz.
Il est significatif de constater que notre Haftara est detinée à évoquer les temps messianiques alors que le chant « Lekha dodi » a vocation à accueillir le Chabat. Ce rapprochement de nos deux textes n’est pas fortuit et les Sages ont probablement voulu nous rappeler que le Chabat représente « me-ein Olam haba », « un avant-goût du Olam Haba » pour celui qui sait le vivre et l’apprécier pleinement.
Ces versets communs à nos deux textes font appel à une notion de reveil « Itoreri Itoreri » « Ouri Ouri » « Réveille-toi, Réveille-toi », « Itna’ari meafar Koumi » « Secoue toi de la poussière. Lève-toi ».
Cette thématique du réveil est un leitmotiv de notre tradition, elle exhorte l’homme à ne pas rester passif et attendre son salut du ciel, mais à se « réveiller », à se tirer de la torpeur et la banalité dans lequel le plonge la routine matérielle. L’homme doit ainsi déployer de l’énergie, des efforts pour parvenir à son épanouissement, à son bonheur tant matériel que spirituel.
Aussi, au terme des six jours de la création, l’homme doit se réveiller et s’extirper de sa vie profane pour entrer et apprécier pleinement le Chabat ; de même, pour paver la voie du Machiah’ et de la délivrance, l’homme doit se réveiller de ses mauvaises habitudes et s’engager dans la voie d’un repentir sincère.
Nous pouvons trouver dans notre texte une feuille de route pour parvenir à ces accomplissements. Le prophète nous dit tout d’abord « J’ai placé dans ta bouche Mes paroles (de Torah), Je vous ai protégés à l’ombre de Ma main afin de planter le ciel et fonder la terre » (Isaie, 51-16) . Aussi, devons nous comprendre que la voie privilégiée pour concilier la vocation spirituelle (« le ciel ») et matérielle (« la terre ») de l’homme est l’étude de la Torah et le respect des mitsvot.
A travers elles, les hommes mettent en œuvre dans ce monde des commandements d’origine divine, ils parviennent ainsi à dépasser l’esprit humain en se rattachant au Emet authentique : la volonté de D.ieu. C’est précisément à travers ce cheminement que l’homme peut faire résonner ses aspirations spirituelles avec sa vie matérielle, et échapper à la routine soporifique du quotidien.
Pour parvenir à cet idéal, Isaïe nous donne également une méthodologie concrète : « Sortez ! Sortez ! Ne touchez pas l’impur ! Soyez purs, vous qui portez les armes d’Hachem ! ». Aussi, pour se renouveler, l’homme soit d’abord s’éloigner de l’impureté, rompre avec ses mauvaises habitudes, mettre en œuvre une introspection sincère qui l’éloigne de ses passions délétères. L’étape suivante est de faire le bien « Soyez purs », multiplier les bonnes actions, les mitsvot et les actes de générosité. C’est précisément la même démarche qu’évoque le Roi David dans les Tehilim « Sour mera’ ve’asse tov » « Eloigne toi du mal et fais le bien ».
Ce n’est évidemment pas un hasard si cette haftara coïncide avec le nouveau mois de Eloul, celui du repentir et précisément du « réveil ». Nos Sages nous enseignent qu’il y a deux réveils qui se répondent dans l’harmonie du monde : le « réveil d’en bas » initié par l’homme qui signifie ainsi sa volonté de s’amender et de se rapprocher de son créateur, auquel répond le « réveil d’en haut » qui évoque l’aide providentielle de D.ieu qui élève l’homme au-delà de ce qu’il ose espérer.
Puisse Hachem nous donner le mérite de connaître, durant ce mois de Eloul, le réveil propice à une techouva, un repentir sincère, afin de nous amender, de nous rapprocher de la source pure de notre nechama (notre âme) et d’être tous inscrits et scellés dans le livre des Vivants.