“Car l’homme est un arbre des champs…” enseigne la Torah dans Dévarim (20, 19). Ce parallélisme entre l'homme et l'arbre nous invite à nous pencher sur les différentes facettes communes de ces deux éléments, d'autant plus que cette métaphore nous ouvre les portes de grandes leçons de développement personnel et spirituel à la fois.
Les Sages dans la Guémara (Ta’anit 5b) décrivent les caractéristiques de l'arbre à travers la parabole d'une bénédiction donnée à l'arbre. La Guémara nous décrit un échange entre Rabbi Its’hak et Rabbi Na’hman : “Au moment de se séparer l’un de l’autre, à la fin du repas, Rav Na’hman adressa à Rabbi Its’hak une dernière requête : ‘Que le maître nous bénisse !’ lui dit-il. Il lui dit : ‘Je vais te répondre par une allégorie.’”
L'allégorie de Rabbi Its’hak porte sur les différents bénéfices qu’un homme tire de l’arbre et la bénédiction qu’il confèrerait à celui-ci. Rabbi Its’hak poursuit en bénissant son ami, d’une bénédiction semblable : “Que toutes tes pousses plantées depuis toi soient comme toi… que ta progéniture soit comme toi.”
Ce que cette parabole nous dévoile sur l'arbre est une très précieuse et riche source d'enseignements quant aux capacités de l'être humain.
La sève défie les lois de la pesanteur
La première caractéristique de l'arbre est la capacité de la sève, appelée le sang des végétaux, à monter des racines vers les feuilles. Cette particularité semble défier les lois de la pesanteur. Le Rav Arié Leib Chapira, se basant sur ladite Guémara, nous délivre un merveilleux enseignement à apprendre de ce phénomène naturel.
“Plus les racines sont profondément ancrées dans la terre, plus elles ont la force de faire monter la sève jusqu’aux branches et jusqu’au sommet de l’arbre. C’est grâce aux racines que la vitalité peut parvenir jusqu’au sommet.”
L’homme aussi est capable d’inverser l’effet de la pesanteur ; c’est ce que nous demandons dans les bénédictions du matin : parvenir à briser notre mauvais penchant et l’assujettir à notre Créateur. On doit ainsi prendre cette même force de pesanteur mais l’assujettir à Hachem ! Et cela, même lors des moments difficiles, comme l'arbre en plein cœur de l'hiver qui semble si dénudé, sans vie et sans espoir de floraison, mais qui en fait prépare son renouvellement.
Nous, également, à travers le fait de puiser dans nos racines, notre Torah, notre vérité, nos valeurs, nous avons le potentiel de surmonter les difficultés et intempéries de la vie pour grandir, nous développer et nous épanouir.
La Torah nous décrit le sacrifice de Ra’hel, notre mère, qui se tut et laissa sa sœur prendre sa place sous la ‘Houppa. Réaliser la grandeur d'âme de notre matriarche doit nous aider à trouver en nous le courage de faire taire une discussion de médisance par exemple, ou à chasser des pensées négatives envers un autre Juif, en allant à contre-courant de ce qui pourrait nous paraître “naturel”.
L'arbre haut et fier
La deuxième caractéristique de l'arbre est le fait qu'il se développe en gagnant en hauteur. L'arbre s'élève majestueusement vers le ciel, révélant la beauté naturelle de son ascension. Cette particularité, appelée par nos sages Koma Zkoufa, signifie le devoir de l'homme de connaître sa valeur. L’importance de la confiance en soi apparaît dans la Torah avant l'ère du coaching… Ce n’est que celui qui prend conscience de sa grandeur qui peut véritablement être humble. Mais une personne convaincue d’être nulle et qui se persuade de ne rien valoir, ne traduit en rien la qualité d’humilité. Elle n’a simplement pas conscience de qui elle est !
L’homme intelligent est celui qui parvient à comprendre que toute sa grandeur, Hachem la lui a donnée pour se courber devant Lui et accomplir Sa volonté.
Les chroniques décrivent Le roi Yéhochafat dans ces mots : “Son cœur s'éleva dans les voies de l'Éternel.” Le roi Yéhochafat avait une attitude élevée et dévouée envers les voies de l'Éternel. Cela signifie qu'il était résolu et déterminé à suivre les commandements de D.ieu et à éliminer les pratiques idolâtres dans son royaume, à différencier de l'orgueil, défaut totalement prohibé dans le judaïsme.
En réalité, l'arbre vient nous rappeler ce fameux enseignement de nos Sages. Un Juif se doit d'avoir dans “ses poches” deux principes de vie. D’une part, ressentir la fierté de qui nous sommes et d'où nous venons. Cela nous permettra d'être plus productifs et imprégnés de cette volonté d'exprimer cette grandeur en obéissant aux lois de D.ieu et de nous réaliser.
Le second principe à ne jamais oublier : savoir être humble ! L'humilité est le sol fertile où s'épanouissent les vertus les plus nobles de l'âme. Grâce à la prise de conscience de notre valeur, nous pourrons faire le choix de la modestie et de l'annulation face au Maître du monde. Un enfant ayant confiance en lui et en l’amour de ses parents sera moins sensible ou susceptible aux remarques de ses camardes de classe. Il saura également ne pas se laisser entraîner par de mauvaises fréquentations. Il saura s’affirmer.
Donnez, donnez, donnez... rien ne se perd !
Le Rav Chapira poursuit son analyse comparative et met en exergue la capacité de l'arbre à “implanter ses branches dans la terre pour faire pousser un nouvel arbre”, et provoquer ainsi la multiplication de végétaux. De la même manière, un homme a la possibilité de transmettre son savoir, et de faire ainsi grandir le Nom divin.
Avraham, notre père, avait cette qualité d'être bon et bienfaisant. Cette bonté s'exprimait à travers sa célèbre hospitalité mais, précise Rabbénou Avraham, fils du Rambam, sa véritable générosité était celle du partage de ses connaissances. L'arbre multiplie ses plants, distribue ses fruits, et nous fait profiter de son ombre sans rien y perdre. Le Rav Chapira nous rappelle notre devoir sur terre : de la même manière, donner de notre temps, de nos connaissances, de notre savoir, de tous nos moyens avec la conviction que rien n'est perdu. Au contraire.
Lorsque nous aidons une amie en l'écoutant et en lui témoignant de l’empathie, la joie et la satisfaction que nous ressentons de la voir retrouver le sourire est un cadeau inestimable… pour nous-mêmes ! C’est une forme de bonheur que rien ne peut effacer.
La nature entière est une invitation à découvrir D.ieu. Découvrir Sa grandeur en observant Ses merveilles mais pas uniquement. Des propos de Rav Chapira, nous comprenons que l'arbre nous invite à être sensibles aux messages codés de D.ieu. En effet, tel Rabbi ‘Akiva qui réalisa la puissance de la persévérance en observant l'érosion d'un rocher, chaque phénomène naturel est une leçon de vie. Et la métaphore de l'homme comme arbre des champs nous ouvre une porte à la réflexion.
À nous donc de nous interroger et chercher à comprendre les messages de D.ieu juste en observant Son magnifique monde. Un exercice qui ne manquera pas de nous émerveiller et nous inspirer au quotidien !