Il y a celles qui se voient obligées de passer les Chabbathot, les fêtes et les demi-fêtes chez leur belle-famille. Il y a celles qui aimeraient bien être un peu plus invitées par leurs parents, histoire de se reposer un peu. Il y a celles qui ne savent pas dire non aux séjours envahissants de leurs enfants mariés, et celles qui aimeraient bien les recevoir un peu plus souvent… Alors comment gérer les invitations de part et d’autre à la période des fêtes ? La réponse ci-dessous !
Ilana appréhende l’arrivée des fêtes. Elle sait qu’il s’agit d’une période à haut potentiel explosif pour son couple. Son mari refuse à tout prix de renoncer à passer les fêtes chez ses parents âgés, et Ilana ne s’y sent plus très à l’aise, elle et ses 4 enfants bruyants…
Bien que Roch Hachana ne soit pas encore tout à fait à nos portes, Jocelyne s’inquiète déjà quant aux invitations qu’elle va devoir gérer. Chacun de ses enfants mariés trouvera quelque chose à redire, et personne ne sera content de l’ordre fixé. Sans compter les heures de travail à la cuisine, le service à assurer, le désordre et les cris des petits… Elle n’est plus toute jeune !
Martine aimerait bien voir un peu plus ses enfants, mais elle ne voudrait pas avoir l’air de les contraindre à venir passer les fêtes chez elle. A chaque fois qu’elle a essayé de leur forcer la main pour Chabbath, elle a bien senti qu’elle avait déclenché un court-circuit… Elle passe donc généralement la période pré-fêtes dans une extrême tension, ne sachant si elle doit parler et supplier, ou se taire et subir sa solitude en silence…
Le point commun entre Ilana, Jocelyne, Martine et toutes ces femmes pour qui les invitations liées aux fêtes prennent l’aspect d’un casse-tête chinois, c’est sans doute la difficulté à dialoguer. Les ressentiments de part et d’autre, les peurs de « vexer » et celles de garder le silence ont tous un dénominateur commun : celui de créer une atmosphère chargée de tension qui a toutes les chances de déboucher sur un conflit.
Des besoins pas toujours exprimés
S’il n’y a pas de réponse toute faite à la question : « Comment régir les invitations familiales ? », il y a en revanche un principe universel à appliquer dans toutes les gestions de conflit. Celui-ci consiste à abandonner la charge affective inhérente à la situation pour l’envisager sous un angle rationnel. Il s’agira aussi de s’armer de bonne volonté et, comme dit précédemment, dialoguer avec respect et compréhension mutuelle.
Dans le cas d’Ilana, l’équation pourrait être posée de la manière suivante : le mari d’Ilana, qui est le benjamin de sa fratrie, tient à passer les fêtes chez ses parents. Ils sont déjà âgés et il souhaite leur témoigner son amour le temps qu’il lui reste à passer à leurs côtés. Ilana, pour sa part, n’apprécie guère ces séjours qui tournent parfois au vinaigre et qui lui coûtent beaucoup en termes de nerfs et d’énergie. Elle se voit obligée d’empaqueter la moitié de leur maisonnée (sans oublier tétines, trousse de secours, barrettes assorties aux tenues) pour s’entasser le temps d’une fête dans une minuscule chambre. Elle doit également veiller à faire régner le silence et l’ordre afin d’éviter de déclencher la colère et les critiques parfois acerbes de ses beaux-parents concernant l’éducation de ses enfants.
Or, il est intéressant de constater qu’Ilana et son époux n’ont en réalité jamais pris la peine de discuter avec les parents de ce dernier quant à leurs désirs en termes d’invitation. Peut-être qu’eux ne tiennent pas absolument à voir leur fils et sa famille passer toutes les fêtes chez eux ? Peut-être même cela est-il devenu difficile pour eux, sans qu’ils n’osent rien en dire à leur fils ?
Peut-être même qu’Ilana n’a-t-elle jamais pris la peine de s’ouvrir à son mari afin de lui expliquer calmement ses difficultés ? Il est temps pour Ilana de prendre l’initiative d’une conversation franche et sereine avec son mari afin de discuter de leurs besoins respectifs. Au terme de cette discussion, au cours de laquelle les époux auront fait l’effort de formuler leurs besoins et d’écouter ceux de l’autre, il serait bon de proposer des solutions originales qui, avec un peu de bonne volonté de part et d’autres, pourront satisfaire l’ensemble de la famille.
Des solutions créatives
Ainsi, Ilana pourrait proposer :
- d’inviter elle-même ses beaux-parents pour la fête, ce qui leur fera sûrement plaisir ;
- de limiter les invitations chez ses beaux-parents à deux fêtes par an ;
- de louer ou de se faire prêter un petit appartement à proximité ;
- d’envoyer ses enfants chez ses parents à elle, tandis qu’elle et son mari se rendront chez ses beaux-parents ;
- etc.
Evidemment, les solutions proposées varient selon les familles et les configurations, mais le principe reste identique !
De même, il est probable que Jocelyne se sente terriblement gênée de devoir avouer à ses enfants que les recevoir pour les fêtes est devenu pour elle extrêmement difficile. La peur de vexer et de faire de la peine lui ôte toute velléité de faire valoir ses droits légitimes et contribuent à entretenir des malentendus malsains pour toute la famille. Ce que Jocelyne doit absolument acquérir, c’est la conviction que le fait d’exposer calmement et gentiment ses besoins ne déclenchera aucune tempête, bien au contraire ! Lorsque ses enfants entendront à quel point elle les aime et qu’elle aimerait les recevoir, mais que la chose est devenue impossible à gérer, ils se feront sans doute un plaisir d’alléger son joug et lui proposeront toutes sortes de solutions qui permettront de contenter tout le monde. Ainsi, il sera possible de :
- limiter les invitations aux fêtes de Pourim, de ‘Hanouka, ou même à ‘Hol Hamo’èd, où chacun peut rentrer chez soi après le repas en famille ;
- demander aux brus de cuisiner, afin d’imposer moins de travail à Jocelyne ;
- d’instaurer un roulement parmi les filles et les belles-filles pour les tâches ménagères pendant la fête : l’une cuisinera, la seconde s’occupera du nettoyage, une troisième du service, une quatrième des enfants etc.
- etc.
Enfin, il convient d’intégrer ce que le Rav Chakh zatsal avait coutume d’affirmer : « On ne perd jamais rien en renonçant ! » Certes, le séjour chez notre belle-famille peut sembler pesant, certes, l’on aurait souhaité avoir nos enfants près de nous pour les fêtes, mais le prix de telles exigences risque de s’avérer élevé sur le long terme. En faisant l’effort de sacrifier un tant soit peu notre confort personnel, nous contribuerons à instaurer un climat sain et serein au sein de nos familles. N’est-ce pas là finalement l’un des objectifs des fêtes juives ?