Avez-vous déjà tenté de communiquer avec quelqu’un que vous aimez, mais avez l’impression de vous heurter à un mur ? C’est terriblement frustrant. Peu importe ce que vous dites, peu importe ce que vous faites, il refuse de vous comprendre. Vous acquérez la conviction qu’il n’y a aucun moyen de l’atteindre.
Mais la communication est possible si vous vous y prenez comme il faut. L’histoire suivante illustre une méthode des plus effectives.
Un homme aisé, en proie au désarroi, se rendit chez un Rav âgé pour lui demander conseil.
« Rabbi, s’écria l’homme, mon fils est très malade, et je ne sais pas quoi faire avec lui. Nous l’avons conduit de médecin en médecin, mais personne n’a été en mesure de l’aider. Ils m’ont recommandé de l’interner. »
« Quelle est la nature de la maladie de votre fils ? », s’enquit le Rav.
Les yeux de l’homme reflétaient sa douleur insoutenable. « Mon fils a perdu la tête, murmura-t-il. Il s’est mis dans la tête qu’il est un dindon ! Toute la journée, il se promène en disant : gobble, gobble. Il était autrefois un brillant élève, mais aujourd’hui, il se met en position de dinde sous la table en grignotant des graines d’oiseau. Certains jours, il ne prend même pas la peine de s’habiller. Ah, Rav, que pouvons-nous faire ? Si seulement vous pouviez nous aider ! »
Pendant un long moment, le Rav garda le silence, perdu dans ses pensées. Puis, lentement, il se mit à parler : « Mon cher ami. Je vais tenter de faire ce que je peux. Donnez-moi quatre semaines pour rester seul avec lui. »
L’homme, reconnaissant, accepta et conduisit le Rav chez lui.
Le Rav s’assit sous la table, à côté de l’enfant dément. « Gobble, gobble, comment vas-tu ? », demanda-t-il au jeune malade.
« Qui êtes-vous ? », répondit-il sur un ton alarmé.
« Gobble, gobble, je suis un Rav dindon. »
« Mais c’est moi, le dindon ! », protesta l’enfant.
« C’est ok, moi aussi. Les dindons peuvent aussi devenir rabbins, tu sais. » Et sur ce, le Rav s’assit pour manger un repas complet.
« Si vous êtes un dindon, comment se fait-il que vous puissiez vous attabler pour manger ? »
« Qui a dit que les dindons devaient être sous-nourris ? Goûte, c’est bon ! »
A contrecœur, l’enfant goûta une cuillère, et lentement, se mit à manger.
Le lendemain, le Rav mit une nouvelle chemise.
« Comment se fait-il que vous soyez sur votre 31 ? Si vous êtes un dindon, c’est impossible ! », protesta le garçon.
« Pourquoi pas ? Pourquoi les dindons devraient-ils rester dehors dans le froid ? », demanda le Rabbi. « Qui a dit que les rabbins ne pouvaient être bien habillés ? Regarde, j’ai une chemise pour toi aussi. Essaie-la et tu verras que tu peux être bien habillé et rester malgré tout un dindon. »
Le garçon mit la chemise, et chaque jour qui passait, le Rav fit des progrès, pénétrant de plus en plus profondément dans la psyché du garçon, si bien qu’au bout de quatre semaines, il était en bonne voie de guérison.
La leçon est évidente. La condition préalable à la communication est l’empathie. Vous devez en réalité vous mettre à la place de la personne que vous cherchez à aider et lui parler à son niveau et dans son langage. En vous identifiant à lui, en vous mettant à sa place, il sera encouragé à s’ouvrir et à devenir réceptif à vos suggestions. Si vous voulez aider quelqu’un, vous devez montrer que vous êtes prêt à partager son fardeau, à assumer ses souffrances et même à devenir un dindon pour lui. Et si vous n’y êtes pas prêts, vous donnerez l’impression de prêcher et de faire preuve de condescendance, et en conséquence, vos propos n’auront aucun effet et produiront l’effet inverse.
Nous l’apprenons du Tout-Puissant Lui-même : lorsqu’Il voulut sauver le peuple juif, Il descendit Lui-même en Egypte. Et nos Sages de s’interroger : « Pourquoi la Bible a-t-elle employé le terme descendre ? N’aurait-il pas été plus approprié de dire que D.ieu a élevé le peuple juif à des sommets de liberté ? »
Il semblerait que l’on ne peut faire de véritable bien de loin. Si le peuple devait être libéré du joug de l’esclavage, alors D.ieu Lui-même devait descendre jusque dans leurs camps de travail. A plus forte raison devons-nous nous imprégner de la douleur de nos proches et être prêts à partager leurs problèmes si nous voulons les aider lorsqu’ils traversent une crise.
Un petit avertissement est de rigueur ici… Personne ne doit faussement interpréter cette idée en estimant que pour sauver un toxicomane, il faudrait devenir un junkie, ou pour réhabiliter un alcoolique, il conviendrait de se mettre à boire. Ce que je tiens à préciser, c’est que crier, prêcher ou faire la morale, même avec les meilleures intentions, n’aidera jamais un individu à se défaire de ses habitudes destructrices et à repartir à zéro.
Si vous êtes sincères dans votre désir d’aider, vous devez faire toutes les tentatives possibles pour comprendre la source de la douleur de votre ami puis communiquer avec lui à un niveau qu’il est à même de comprendre. Etape par étape, il pourra être récupéré et reprendre goût à la vie.
La prochaine fois que vous voulez baisser les bras en pensant : « C’est inutile. Il ne comprendra jamais, il ne changera jamais », demandez-vous : « Ai-je vraiment tenté ? Suis-je devenu un dindon ? ».