Constamment, la vérité du mode de vie selon la Torah nous saute aux yeux. Récemment, un scandale autour du magazine Newsweek a éclaté. Ce magazine américain, hautement tenu en estime, est lu dans le monde entier : il relatait que des soldats américains de la base militaire de Guantanamo à Cuba avaient jeté dans les toilettes des pages du Coran. Cette histoire était totalement infondée, mais en conséquence de sa publication, des émeutes antiaméricaines ont éclaté à travers le monde musulman, débouchant sur la mort de dix-sept personnes. Des représentants du Newsweek ont rapidement présenté leurs excuses, mais comment une excuse peut-elle réparer les dommages causés ? Ces excuses peuvent-elle faire revenir les dix-sept vies perdues ? Ces excuses peuvent-elles rectifier la haine et l’animosité qui a éclaté contre l’Amérique dans une région déjà volatile ? Les excuses peuvent-elles convaincre ceux qui tiennent notre pays en mépris ? Des excuses peuvent-elles réparer le tort incalculable causé à l’image des Etats-Unis ?
Des soldats américains se sont valeureusement sacrifiés pour apporter la lumière de la démocratie à des pays opprimés par les dictatures, et en un clin d’œil, l’histoire venimeuse du Newsweek a tout gâché.
Il y a des milliers d’années, la Torah nous a enseigné à veiller scrupuleusement à ce qui sort de notre bouche : « Ha’haïm Véhamavet Béyad Halachone… La vie et la mort tiennent sur la langue. » En effet, l’outil le plus puissant dont l’homme a été doté est sa langue. Elle peut être plus tranchée que l’épée et peut tuer. D’un autre côté, elle peut également prononcer des termes de sagesse visant le cœur, l’esprit et l’âme et apporter du baume au cœur à des plaies ouvertes. En conséquence, nous avons plus de lois liées au langage qu’à aucun autre domaine.
D.ieu tout-puissant nous a créés d’une telle manière que même notre physionomie est destinée à nous protéger du caractère acéré de la langue. L’homme possède des organes internes et externes. Les mains, les yeux, les oreilles, etc. sont externes, tandis que nos cœurs, reins, foie, etc. sont internes. La langue est le seul organe qui peut à la fois être externe et interne, nous avertissant que nous devons veiller à son usage et garder à l’esprit qu’avant de parler, nos langues doivent passer par deux portes : nos dents et nos lèvres. On nous met en garde de bien fermer ces portes et de réfléchir, de peser et d’évaluer soigneusement si les mots que nous nous apprêtons à dire valent la peine, ou s’il vaut mieux s’en abstenir. Une fois que nos paroles s’échappent de nos lèvres, nous ne pouvons plus les reprendre.
Mon père, de mémoire bénie, le Gaon Rav Avraham Halévi Jungreis avait l’habitude de dire : « Tant que les mots sont en toi, tu les maîtrises, mais une fois qu’ils quittent tes lèvres, ce sont eux qui sont maîtres de toi ! » « Une barrière autour de la sagesse », nous enseignent nos Sages, « est le silence ». Lorsque vous gardez le silence, personne ne peut savoir à quel point vous pouvez être stupide, insensible, et cruel.
J’écris cet article alors que nous lisons la Paracha Béhar, dans laquelle on nous enjoint de nous tenir sur nos gardes et d’éviter de prononcer des mots blessants. La plupart des gens s’imaginent que le Lachone Hara', c’est du commérage et des fausses déclarations, mais le Lachon Hara est un terme générique qui englobe toutes sortes de propos négatifs. Prenons cette histoire de Guantanamo un peu plus loin. Et si cette histoire incendiaire publiée par le Newsweek avait été vraie ? Auraient-ils eu le droit de la publier ? N’auraient-ils pas dû prendre en considération les terribles torts et violences déclenchés par la publication d’une telle histoire ?
Une histoire instructive illustre les conséquences tragiques du Lachone Hara'.
Un homme qui faisait des commérages de manière invétérée eut un jour une prise de conscience et fut troublé par la douleur, les problèmes et la détresse qu’il avait infligés par ses propos médisants. Il se rendit chez son Rav à la recherche d’une absolution.
« Rav, dit-il, je dis du Lachon Hara depuis de nombreuses années et je n’ai jamais compris le mal qu’un tel passe-temps pouvait faire, mais j’aimerais désormais me repentir… je suis sincèrement désolé de tout ce que j’ai fait. Dites-moi, Rav, que dois-je faire ? Je suis prêt à jeûner, à m’engager à toutes sortes de privations…dites-moi juste comment procéder. »
« Mon fils, le jeûne n’y fera rien. Si tu désires vraiment le pardon, suis mes instructions. » Sur ce, le Rav lui tendit un paquet rempli de plumes. « Prends ce sac et place une plume sur le seuil de chaque porte où tu pourrais avoir dit du Lachone Hara'. Lorsque le sac est vide, rapporte-le-moi. »
« Est-ce tout ce que je dois faire ? », demanda l’homme, abasourdi.
« Oui, c’est tout », répondit le Rav.
Soulagé, l’homme partit avec son sac, et tout comme son Rav le lui avait prescrit, il s’arrêta devant la porte de chaque maison dont il avait calomnié ses habitants et déposa une plume devant la porte. Le sac se vida rapidement et il retourna, d’humeur joyeuse, chez le Rav.
« J’ai fait ce que m’avez demandé », annonça-t-il. « J’ai déposé une plume devant chaque porte. Est-ce que je suis désormais pardonné ? »
« Pas vraiment, répondit le Rav. Reprends le sac et récupère toutes les plumes que tu as placées et rapporte-les moi. Alors tu seras pardonné. »
Notre homme se mit en route pour récupérer les plumes, mais il n’en trouva aucune. Abattu, il retourna chez le Rav avec le sac vide.
« Rav, j’ai vraiment tenté de les retrouver, mais toutes les plumes avaient disparu. Le vent a dû les disperser. »
« Exactement, répondit le Rav, c’est la terrible conséquence du Lachone Hara'. Le vent a dispersé tes propos partout, et il est impossible de les récupérer. »
Notre gouvernement a demandé au Newsweek de présenter ses excuses. C’est une blague. Peu importe le nombre de fois où ils se prétendent désolés, ils ne peuvent faire revenir à la vie les vies perdues ou le tort causé. Que cette histoire soit une sonnette d’alarme pour toute l’Amérique. Que ce soit une sonnette d’alarme pour nos médias imprégnés de scandales. Reprenons-nous avant que nous détruisions par notre langage, notre pays, notre monde, notre être. Remémorons-nous : Hitler a causé des ravages et décimé le monde, ni par une arme, ni par un lance-roquettes ou une bombe, mais par sa rhétorique venimeuse. En effet, « la vie et la mort tiennent sur la langue ». Quand allons-nous retenir cette leçon ?