Le divorce peut être une expérience des plus déchirantes. Il est très douloureux d’avoir eu un foyer et un conjoint et de voir tout s’évaporer sous nos yeux. La famille, même si elle a été déchirée par l’hostilité et l’acrimonie, était tout de même une famille, et maintenant, elle n’est plus là.
Ensuite, il y a les nombreuses batailles juridiques et financières qui font partie du processus du divorce. Le divorce est rarement simple ou amical.
Les enfants séjournent désormais une semaine chez papa et la semaine suivante, chez maman. Le père a peut-être une nouvelle épouse ou une femme qu’il rencontre régulièrement, et la mère s’est peut s’être remariée ou fréquente régulièrement un homme.
Lorsque les enfants grandissent et sont prêts à chercher un Chidoukh, les recommandations seront toujours ponctuées par ces propos tranchants : « Les parents sont divorcés » - un signal d’alarme pour certains.
On peut pousser un soupir de soulagement une fois le divorce prononcé, mais le cœur est lourd et douloureux. Oui, les conflits étaient présents. Oui, il y avait une guerre froide qui instaurait une atmosphère glaciale à la maison. Mais la solitude est très difficile à supporter.
S’ils ont de la chance, les divorcés ont de bons amis et des parents et frères et sœurs affectueux, présents pour les soutenir et les aider. Mais tout de même, la solitude subsiste, comme une ombre sinistre. Personne ne peut remplacer un mari ou une femme.
Il y a une différence entre devenir veuf/veuve et passer au statut de divorcé. Ceux qui sont devenus veufs évoquent la pitié. Nous ressentons de la compassion pour eux. Nous les invitons pour Chabbath. Nous tendons la main à leurs enfants. (Mais au bout d’un certain temps, les choses changent ; c’est déjà du passé et le veuf/la veuve est livré(e) à lui-même/elle-même et doit se débrouiller seul.)
Mais lorsqu’il est question de divorce, l’empathie n’est pas vraiment identique. Il n’y a ni enterrement, ni Chiva’ (sept jours de deuil), ni Chlochim (30 jours de deuil) pour évoquer la vie de celui qui a quitté ce monde.
Les divorcés souffrent différemment. Il y a beaucoup de commérages chuchotés à voix basse. Les gens prennent parti. Et qui peut dire quelle partie a raison ? Cela ressemble à cette histoire ancienne :
Un homme souffre d’une animosité constante qui menace de consumer son foyer. Il se rend chez son Rebbe à qui il se confie : « Mon épouse est hors de contrôle. Elle crie. Elle hurle. »
Le Rebbe acquiesce, indiquant qu’il comprend la situation et lui accorde une bénédiction.
Une heure plus tard, l’épouse entre dans le bureau du Rebbe. Elle pleure et raconte ses malheurs. « Mon mari est méchant et désagréable. Je ne peux plus continuer. » Une fois encore, le Rebbe hoche de la tête en signe d’empathie et lui accorde également une bénédiction.
A son départ, la Rabbanite entre dans le bureau. « Je ne comprends pas, déclare-t-elle. Tu compatis avec le mari et ensuite avec la femme, et tu leur donnes à tous deux une bénédiction. S’il a raison et si elle a raison, qui a tort ? »
Et le Rebbe d’acquiescer une fois de plus : « Tu as aussi raison ! »
C’est une belle histoire, mais au message profond. Chacun(e) pense avoir raison.
A ce stade, je dois ajouter un avertissement. Certains conjoints sont méchants et égoïstes. Certains peuvent lever la main et attaquer physiquement l’autre. Il existe des conjoints qui détruisent les autres par l’emploi d’un langage abusif et brisent une famille entière. Dans de telles circonstances, le divorce peut constituer un vrai soulagement.
Mais la douleur et la solitude demeurent néanmoins. Et, malgré tout, le désir de se remarier et de trouver un partenaire sensible pour guérir ces blessures affectives et psychologiques qui ne cessent de saigner, est toujours présent.
Nous sommes un peuple chargé d’assumer la responsabilité des uns pour les autres. Nous avons la responsabilité de tendre la main pour aider ceux qui rêvaient de fonder un foyer juif authentique, et qui ont vu leur rêve imploser.
Comment ? En invitant des divorcés avec leurs enfants à notre table du Chabbath. En leur faisant sentir qu’ils font partie de notre famille élargie. En tendant la main au petit garçon qui doit désormais aller tout seul à la synagogue et en devenant son « papa de Chabbath ». En demandant à la petite fille dont la maman est absente de se joindre à nos filles dans leurs activités.
Apprenez à vos enfants la signification de Hakhnassat Or’him, l’accueil des invités, l’un des piliers de notre Torah. Ma mère, la Rabbanite Miriam Jungreis, avait toujours ses casseroles remplies. Il n’était jamais problématique d’inviter un autre convive à notre table. Nous, les enfants, ne pouvions imaginer notre table sans invités, et j’ai élevé mes enfants de la même manière.
C’est l’héritage de notre ancêtre Avraham, dont la tente était ouverte de tous côtés pour que les passants puissent entrer, manger, et satisfaire leur appétit. Bien entendu, il ne se contentait pas de leur offrir un abri matériel, mais prodiguait également un refuge pour leurs âmes. Il leur enseignait comment développer leur Néchama, leur âme, pour aller toujours plus haut et respirer l’air de la Emouna, la foi.
Enfin, quelque chose peut faire toute la différence, lorsqu’il est question de réparer des cœurs brisés. Nous pouvons devenir des Chadkhanim, des entremetteurs. Mon saint père, le Rav et Gaon, le Tsaddik Avraham Halévi Jungreis, ne quittait jamais la maison sans son petit « carnet noir ».
« On ne sait jamais, disait-il. Je pourrais rencontrer un(e) candidat(e) qui correspondrait bien à untel ou unetelle. »
Mon père assistait également à mes cours à Hinéni, même lorsqu’il était très malade et avait du mal à se déplacer. « Peut-être pourrais-je trouver un Chidoukh pour un célibataire. Peut-être aurais-je l’opportunité de donner une Brakha à quelqu’un pour l’aider à trouver son âme sœur. »
Ne devrions-nous pas agir dans le même esprit ?