Il y a près de 50 ans, vivait un Juif qui n’avait pas de gagne-pain. Il fit part de sa détresse à l’un de ses amis qui travaillait à la bourse. L’ami en question, ayant été informé de ses difficultés de Parnassa, lui proposa de lui donner 1000$, somme considérable à cette époque, qu’il investira en bourse afin de partager avec lui les bénéfices de cet apport.
Le Juif, qui était un ‘Hassid de Gour, lui répondit qu’il exposera la proposition au Rabbi, le Beth Israël, que son mérite nous protège.
Lorsqu’il posa la question au Beth Israël, il lui demanda : « Es-tu prêt à perdre également ou seulement à gagner ? », et le Juif de répondre : « D’où aurais-je de quoi perdre ? ». Le Rabbi rétorqua : « Si tu conviens d’un commun accord avec ton ami pour les bénéfices uniquement et pas pour les pertes, il faudrait demander à un Rav si un tel arrangement est autorisé ».
Le Juif habitait Bné-Brak, non loin de la maison du Rav Chemouel Halévy Wozner, et il décida d’aller lui poser la question. C’était la veille de Pessa’h et il y avait des dizaines de personnes qui faisaient la queue pour soumettre leur question au Rav. Lorsque son tour arriva et qu’il soumit sa question au Rav, ce dernier lui répondit que c’était autorisé.
Le Juif se rendit à nouveau chez le Beth Israël pour lui communiquer la réponse de notre maître. Le Beth Israël lui recommanda alors de retourner poser sa question chez le même Rav.
Le Rav Wozner lui répondit : « Est-ce vous qui êtes venu me poser cette question la veille de Pessa’h ? »
« Tout à fait », répondit-il.
Et le Rav affirma : « Sachez que j’ai fait erreur dans la réponse que je vous ai donnée. En réalité, le cas que vous m’avez soumis est interdit. Dorénavant, je prends donc sur moi Bli Néder, après avoir bien réfléchi à cela, de toujours mentionner une loi relative aux interdits de Ribbit (prêt et emprunt avec intérêt) lors de mon allocution de Chabbath Hagadol ».
Et en effet, à partir du Chabbath Haggadol qui suivit, et jusqu’à la fin de sa vie, le Rav Wozner évoquait un sujet relatif aux lois de Ribbit lors de son discours de Chabbath Haggadol, pour corriger l’erreur qu’il avait faite. Et ce, non pas parce que, à D.ieu ne plaise, quelqu’un aurait transgressé un interdit, mais à cause du stress de cette veille de Pessa’h où une erreur a involontairement été émise da sa sainte bouche.
Le Rav a pris sur lui une telle résolution. C’est terrible et effrayant, si on y réfléchit, à quel niveau d’intégrité il se trouvait, d’avoir reconnu son erreur, de tout cœur, et à s’être résolu à effectuer une réparation importante à ce sujet tout au long de sa vie…
Notre maître disait que c’est le plus grand moment de test lorsqu’un décisionnaire affirme « les propos que j’ai dits étaient erronés », et est capable de « reconnaître et ne pas avoir honte ». Un décisionnaire doit savoir que sa mission consiste essentiellement à servir Hachem, et nul ne peut saisir les paroles de Torah s’il n’a pas fait d’erreur (Guitin 43a), telle est la véritable force d’un Moré Horaa (décisionnaire) qui puise les forces de son âme des sources saintes. Il s’agit d’un moment de test – reconnaître la vérité et ne pas se justifier par des prétextes divers.
Extrait du Chévet Halévy